ERC 2020 I Benjamin Wetzel sculpte la lumière

Le 2 septembre 2020, le Conseil Européen de la Recherche (ERC) a communiqué la liste des bénéficiaires des bourses « Starting grant ». Pour la première fois depuis la création de l’ERC, Limoges compte un heureux lauréat : Benjamin Wetzel, Chargé de recherche à l’Institut XLIM (CNRS/Université de Limoges) dont l’objet d’étude est la photonique, la science de la lumière et de ses « photons ».

En 2020, le taux de succès de l’appel ERC Starting Grant s’élève à 13.3%, avec des lauréats de 40 nationalités différentes.

L’appel ERC Starting Grant s’adresse à de jeunes chercheurs ayant obtenu leur thèse 2 à 7 ans auparavant. L’objectif est de financer des projets de recherche exploratoire sur une durée maximale de 5 ans et un budget de 1,5 millions d’euros. L’appel ERC Starting Grant 2020 a bénéficié d’un budget global de 677 millions d’euros et devrait financer 436 bourses, sélectionnées sur des critères d’excellence scientifique par des jurys internationaux.

Le CNRS compte, quant à lui, 20 projets lauréats. Plus globalement, la France est en 4e position (derrière l’Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas), avec 38 projets.

> Tous les lauréats : https://erc.europa.eu/news/StG-recipients-2020

« Sculpter » les propriétés temporelles, spectrales et spatiales de la lumière dans un système compact et à coût réduit avec le projet STREAMLINE

Tout juste 60 ans après son invention, le laser fait aujourd’hui partie de notre vie quotidienne. Au cœur des communications internet ou de systèmes servant par exemple à la lecture de disques Blu-Ray, le laser est également à la base d’applications exigeantes couvrant des domaines aussi vastes que la métrologie ou l’imagerie. Pour ces champs d’études de pointe, les sources photoniques doivent répondre à des cahiers des charges très spécifiques, par exemple en terme de durée des impulsions optiques émises ou de couverture spectrale, c.a.d. leur(s) couleur(s). Pour ajuster ces propriétés, Benjamin Wetzel, physicien du CNRS et lauréat ERC, a recours à des impulsions optiques extrêmement courtes se propageant dans des fibres optiques : « Nous travaillons typiquement avec des impulsions d’une durée de quelques dizaines de femtosecondes (10-15 s). A titre de comparaison, rapportées à une seconde, ces impulsions sont aussi courtes qu’un clignement d’œil depuis l’apparition de l’homme sur la Terre. On peut ainsi confiner l’énergie lumineuse d’une ampoule de manière à obtenir, durant un laps de temps très court, une puissance phénoménale approchant celle produite par une centrale nucléaire ». En piégeant spatialement la lumière dans ces guides d’ondes optiques, le chercheur peut alors contrôler les interactions entre la lumière et la matière lors de la propagation des impulsions dans la fibre, et ainsi modifier les caractéristiques finales du rayonnement lumineux. Bien que ces phénomènes physiques soient de mieux en mieux compris (et inoffensifs), les dynamiques dites « non-linéaires » mises en jeu, sont quant à elles complexes, et la mise en œuvre expérimentale peut s’avérer loin d’être évidente. D’une part, les systèmes pour mettre en forme de telles impulsions optiques sont coûteux, et limités par le type de propriétés ajustables. D’autre part, tel l’illustre « effet papillon », ces mécanismes physiques sont très sensibles aux conditions initiales et sont ainsi difficiles à prévoir et à optimiser par des approches numériques classiques.

Dans le cadre du projet STREAMLINE, Benjamin Wetzel souhaite directement adresser ces limitations par le développement de sources photoniques intelligentes : « Ce projet pluridisciplinaire vise à exploiter des composants photoniques fibrés et intégrés dans une architecture hybride pour la génération d’ondes optiques aux caractéristiques sur mesure et reconfigurables. L’utilisation de systèmes photoniques intégrés et actifs permettra notamment le contrôle flexible et rapide des impulsions optiques initiales, conditionnant ainsi les dynamiques complexes de propagation via des approches d’apprentissage automatique (machine learning). » Au-delà des aspects fondamentaux de l’étude, cette approche est vue comme un moyen efficace de « sculpter » les propriétés temporelles, spectrales et spatiales de la lumière dans un système compact et à coût réduit. En particulier, le projet vise au développement de nouveaux systèmes d’imagerie « dynamique » présentant des performances améliorées et un fonctionnement aisé au quotidien pour un utilisateur « non spécialiste ».

Contact :
Benjamin Wetzel,

 

 

 

 

Légende photo couverture : Illustration d’un train d’impulsions ultra-rapides : Représentation spectro-temporelle (spectrogramme) d’un ensemble de 16 impulsions, mesuré expérimentalement après mise en forme par un dispositif photonique intégré. Les impulsions ont ici chacune une durée d’approximativement 100 fs (100 x 10-15 s) et individuellement séparées par 1 ps (10-12 s).