Éducation environnementale et enculturation Environmental education and enculturation

Kizito Tioro KOUSSE 

https://doi.org/10.25965/trahs.4994

Pour qu’une pratique idéale, un comportement moral puissent se développer et se maintenir dans le temps, il faut aller à la base de la socialisation de l’homme. Le comportement écocitoyen n’échappe pas à cette règle. L’éducation en matière d’environnement découle de la nécessité d’intégrer la bonne gérance des ressources naturelles, de la qualité du climat dans les modes de vie et des politiques publiques de transformations sociales et techniques. L’éducation environnementale sous-tend des politiques éducatives dans tous les secteurs des préoccupations environnementales : la famille, l’école, les universités, l’alphabétisation, l’Etat, la société civile, les organisations non gouvernementales, les institutions nationales et internationales. L’objectif vise à sensibiliser afin de matérialiser les engagements des citoyens, des apprenants dans les écoles et les universités en matière de sauvegarde de l’environnement. Il s’agit de consolider dans l’esprit des apprenants que l’environnement fait partie intégrante de la vie sociale, et que, c’est en raison de cela que sa sauvegarde doit prendre en compte les générations futures. La promotion de l’éducation environnementale dans tous les ordres d’enseignement et de l’éducation est l’assise d’une éthique environnementale, socle de l’écocitoyenneté. La promotion de l’éducation écocitoyenne devra privilégier le renforcement des capacités des différents apprenants afin de leur permettre de mieux faire face aux enjeux actuels et futurs des préoccupations environnementales. L’enculturation revient alors à promouvoir l’information, l’éducation environnementale et l’écocitoyenneté en lien avec les valeurs culturelles, dans le but de permettre l’émergence de comportements éco-éthiques de grande envergure dans la quotidienneté des hommes et des femmes.

Para que una práctica ideal, un comportamiento moral se desarrolle y se mantenga en el tiempo, es necesario acudir a las bases de la socialización humana. El comportamiento eco-ciudadano no es una excepción a esta regla. La educación ambiental surge de la necesidad de integrar el buen manejo de los recursos naturales, la calidad del clima en los estilos de vida y políticas públicas para las transformaciones sociales y técnicas. La educación ambiental sustenta las políticas educativas en todos los sectores de la preocupación ambiental : familia, escuela, universidades, alfabetización, Estado, sociedad civil, organizaciones no gubernamentales, instituciones nacionales e internacionales. El objetivo pretende sensibilizar a fin de materializar los compromisos de los ciudadanos, los educandos en las escuelas y universidades en términos de salvaguarda del medio ambiente. Se trata de consolidar en la mente de los educandos que el medio ambiente es parte integral de la vida social, y que es por ello que su salvaguarda debe tener en cuenta a las generaciones futuras. La promoción de la educación ambiental en todos los niveles de enseñanza y educación es el fundamento de una ética ambiental, el fundamento de la ecociudadanía. La promoción de la educación eco-ciudadana debe centrarse en desarrollar las capacidades de los diferentes educandos para que puedan enfrentar mejor los desafíos actuales y futuros de las preocupaciones ambientales. La enculturación consiste entonces en promover la información, la educación ambiental y la ecociudadanía en relación con los valores culturales, con el objetivo de permitir la emergencia de comportamientos ecoéticos de gran escala en la vida cotidiana de hombres y mujeres.

Para que uma prática ideal, um comportamento moral se desenvolva e se mantenha ao longo do tempo, é necessário ir até a base da socialização humana. O comportamento do ecocidadão não foge a esta regra. A educação ambiental nasce da necessidade de integrar o bom manejo dos recursos naturais, a qualidade do clima nos estilos de vida e nas políticas públicas de transformação social e técnica. A educação ambiental está na base das políticas educativas em todos os sectores da preocupação ambiental : família, escola, universidades, alfabetização, Estado, sociedade civil, organizações não governamentais, instituições nacionais e internacionais. O objetivo visa sensibilizar de forma a materializar os compromissos dos cidadãos, educandos nas escolas e universidades em matéria de salvaguarda do ambiente. Trata-se de consolidar no espírito dos educandos que o meio ambiente é parte integrante da vida social, e que é por isso que sua salvaguarda deve levar em consideração as gerações futuras. A promoção da educação ambiental em todos os níveis de ensino e educação é o fundamento de uma ética ambiental, o fundamento da ecocidadania. A promoção da educação do ecocidadão deve se concentrar na capacitação de diferentes alunos para capacitá-los a enfrentar melhor os desafios atuais e futuros das preocupações ambientais. A inculturação equivale então a promover a informação, a educação ambiental e a ecocidadania em relação com os valores culturais, com o objetivo de permitir a emergência de comportamentos eco-éticos em larga escala no quotidiano de homens e mulheres.

For an ideal practice, a moral behavior to be able to develop and be maintained over time, it is necessary to go to the basis of human socialization. Eco-citizen behavior is no exception to this rule. Environmental education stems from the need to integrate good stewardship of natural resources and the quality of the climate into lifestyles and social and technical transformation policies. Environmental education underlies educational policies in all sectors of environmental concerns : family, school, universities, literacy, State, civil society, non-governmental organizations, national and international institutions. The objective aims to raise awareness in order to materialize the commitments of citizens, learners in schools and universities, in terms of safeguarding the environment. It is a question of consolidating in the minds of the learners that the environment is an integral part of social life, and that it is for this reason that its safeguard must consider future generations. The promotion of environmental education in all levels of teaching and education is the foundation of an environmental ethic, the foundation of eco-citizenship. The promotion of eco-citizen education should focus on building the capacities of different learners to enable them to better face the current and future challenges of environmental concerns. Enculturation amounts to promoting information, environmental education and eco-citizenship in connection with cultural values ​​in order to allow the emergence of large-scale eco-ethical behaviors in the daily life of men and women.

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Introduction

La persistance de la crise environnementale en interpelle plus d’un et nécessite de varier les alternatives de solutions. Il ne s’agit pas pour nous d’affirmer que des tentatives n’ont pas existé, loin s’en faut, mais plutôt de présenter une piste comme alternative et contribution aux conditions de possibilité pour changer véritablement de cap, pour marquer un tournant décisif dans la quête de solutions à la crise environnementale avec un renouveau fondé sur une nouvelle relation avec la nature.

Dans les sociétés modernes, la considération de l’environnement comme un bien commun n’est pas suffisamment intégrée dans le processus d’éducation depuis l’enfance. C’est cette faille qui explique en partie les difficultés des adultes d’aujourd’hui à se décider à trouver des solutions, et ce nonobstant les engagements et résolutions pris. Les mobiles sont l’absence d’une éducation permanente à l’écocitoyenneté dans les familles, les écoles, les universités ainsi que le manque de volonté politique et la pression économique. Ce sont ces déterminants qui nous amènent à mettre en lien l’éducation environnementale et l’enculturation.

Par enculturation, il faut entendre le processus par lequel un être humain apprend, assimile et met en pratique des valeurs et traditions de son groupe à toutes les étapes de sa vie et de ses comportements. En d’autres termes, elle désigne la transmission des valeurs positives à l’enfant dès sa tendre enfance.

Pour notre présente analyse, l’enculturation porte sur les valeurs, les cultures et traditions liées à la sauvegarde de l’environnement. Par conséquent, nous pensons que l’éducation des jeunes enfants pourrait présenter une lueur d’espoir face à l’échec des générations précédentes à trouver des solutions en raison de leurs multiples atermoiements et de ce que l’on appelle « le syndrome de l’acrasie » (Koussé, 2021 : 540). L’enculturation est la boussole qui doit montrer que les générations actuelles n’ont pas droit à l’erreur. L’enfant ne mesure peut-être pas la portée de la sauvegarde de l’environnement aujourd’hui, mais l’éducation et l’enculturation, lorsqu’elles sont bien utilisées comme des canaux de transmission de valeurs pour un développement humain authentique, peuvent lui inculquer des valeurs écologiques, ou sagesses écologiques, en attendant qu’il soit en capacité d’apporter sa contribution dans le futur, par des actes écologiques concrets, responsables et libres.

Pour J-B. Sanou (2021 : 34) dans ce sens, « le bien commun comme l’ensemble des conditions de vie d’ordre naturel, socio-politique, économique et moral, doit être considéré comme le droit fondamental de toute personne humaine, avant même que celle-ci ait la possibilité d’y contribuer par son travail et par ses services ». C’est cette conviction qui a motivé notre thème intitulé « Education environnementale et enculturation ».

Notre problématique est formulée à travers la question suivante : la persistance de la crise écologique n’est-elle pas une crise de l’éducation, ou du moins le signe d’une éducation environnementale en crise ? Notre hypothèse est que préserver l’environnement ne se décrète pas, mais s’apprend ; cela suppose que l’on initie aux valeurs écologiques dès le plus jeune âge, et d’afficher une volonté manifeste à l’âge adulte. L’éducation en général, et celle des enfants en particulier, participe de la réalisation de l’écologie intégrale, entendue comme l’imbrication et l’interaction entre l’environnement humain et l’environnement naturel. L’éducation est la clé de la conscience collective d’une origine commune, d’une communauté de nature, d’un avenir partagé et d’un engagement à l’unisson pour le salut de tous. En effet, « une bonne éducation scolaire dès le plus jeune âge sème des graines qui peuvent produire des effets tout au long d’une vie » (Pape François, 2015 : 195).

Notre approche est à la fois intellectuelle et pédagogique, et consiste à explorer les politiques d’éducation environnementale en rapport avec l’écocitoyenneté qui est un défi pour les générations actuelles et futures. La méthodologie mise en œuvre pour analyser notre problème est l’éducation relative à l’environnement pour une alliance entre l’humanité et l’environnement. C’est une méthodologie qui permet d’aborder des thématiques qui mettent l’éducation et l’enculturation au service de la sauvegarde de l’environnement, et par ricochet au service de l’humain. Pour cerner davantage la portée de notre problème central, il convient de poser les questions suivantes : quels sont les fondements de l’éducation environnementale ? Quelles sont les chances de l’opérationnalité de l’éducation environnementale et de l’enculturation ? Quel rapport peut-on établir entre éducation environnementale et participation du public ? Répondre respectivement à ces questions constituera l’ossature de notre présente réflexion.

I. Les fondements de l’éducation environnementale

L’humanité parvient-elle à s’entendre sur les grands dossiers de l’environnement ? Les politiques environnementales sont-elles à la hauteur des enjeux ? L’environnement planétaire s’est dégradé à un rythme exponentiel à cause de l’interaction actée de l’homme et de la biosphère. Il devrait donc être possible pour les êtres humains habitant la biosphère de s’entendre sur les questions écologiques essentielles pour sauver la planète terre. Mais, constate K. T. Koussé,

l’humanité a longtemps montré des signes de résistance aux questions éthiques environnementales. Elle a confiné la sagesse biosphérique et libérer la valse des productions et festivals économiques (2021 : 536).

De notre avis, l’éducation revêt une importance capitale pour la promotion de la gérance vertueuse de l’environnement. L’éducation environnementale vient en réponse au constat de l’échec des engagements en faveur de l’environnement. « Si l’on s’employait à modifier, par le biais de l’éducation le comportement des hommes, on peut penser qu’au cours des prochaines années, l’orientation nouvelle des comportements permettrait de résoudre, au moins partiellement, les problèmes en jeu » (UNESCO-PNUE, 1993 : 3). Le comportement idéal vis-à-vis de l’environnement n’est pas un acquis, il faut compléter, augmenter et maintenir le comportement humain idéal à l’égard de l’environnement, par l’éducation.

I.1. Eduquer, c’est prévoir un avenir radieux

L’homme est un être qui a le souci de l’avenir. Nous comprenons pourquoi M. J. Herskovits affirmait que :

l'homme vit dans plusieurs dimensions. Il se meut dans l'espace, où le milieu naturel exerce une influence constante sur lui. Il existe dans le temps, qui lui donne un passé historique et le sentiment de l'avenir. Il poursuit ses activités au sein d'une société dont il fait partie et il s'identifie avec les autres membres de son groupe pour coopérer avec eux à son maintien et à sa continuité (1967 : 8).

L’éducation est avant tout une projection dans l’avenir de l’individu et de la société. On éduque en vue d’un idéal pour demain en amont et en aval. Par conséquent, les générations futures constituent une préoccupation centrale de l’éducation. A entendre E. Kant,

l’homme ne peut devenir homme que par l’éducation. Il n’est que ce que l’éducation fait de lui […]. C’est au fond de l’éducation que gît le grand secret de la perfection de la nature humaine (1967 : 8).

Le mot éducation est appréhendé de plusieurs façons. En d’autres termes, son sens varie selon le contexte dans lequel il est employé. C’est cette ambiguïté que G. Miafaret (1973 : 7) souligne au travers de son propos : » une très grande confusion règne dans la définition des termes utilisés dans le domaine des sciences de l’éducation, ce qui donne lieu à de très nombreuses discussions stériles ». On a l’impression qu’il est quasiment impossible de définir congrument le mot éducation. Mais, selon son étymologie latine « educatio », il veut dire l’« action d’élever ». Même si, au départ, les éleveurs et les agriculteurs étaient considérés comme des éducateurs parce qu’ils aident les animaux et les plantes à croître physiquement, force est de signaler que dans le cas de l’homme, le mot a un sens moral qui consiste en la formation du caractère, et un sens intellectuel qui consiste en la formation de l’esprit.

L’éducation d’un enfant voulait signifier l’élever au sens de satisfaire ses besoins essentiels de nourriture, ses besoins physiques et corporels. Mais, avec l’aspect moral et intellectuel, on passe du corps (physique) à l’esprit ou au psychique. Dans cette logique, l’éducation en est venue à désigner l’action d’aider au développement de l’esprit. C’est cette définition que tente de donner O. Reboul lorsqu’il dit que :

 l’éducation est l’action qui permet à un être humain de développer ses aptitudes physiques et intellectuelles ainsi que ses sentiments sociaux, esthétiques et moraux, dans le but d’accomplir autant que possible sa tâche d’homme ; c’est aussi le résultat de cette action (1971 : 12).

L’éducation est toujours finalisée ; c’est pourquoi il faut toujours se poser la question fondamentale suivante : éduquer en vue de quoi ? Autrement dit, en quoi consiste la formation et le développement ? L’éducation de l’homme doit être holistique (corps et esprit). L’action d’éduquer est un processus, une évolution, un mouvement, une démarche de changement dans le bon sens, dans la réalisation de l’idéal recherché. L. Morin et L. Brunet soutiennent que :

l’essence de l’éducation, c’est donc d’être un processus, c'est-à-dire un changement. Eduquer, c’est changer, faire qu’on devienne autre […]. Car on doit bien sûr supposer qu’il ne peut s’agir de n’importe quel changement, de n’importe quel devenir autre. Eduquer, c’est changer pour le mieux. (1992 : 28).

Enseigner des valeurs et l’idéal de vie est essentiel en éducation. C’est en raison de cela que « le terme même d’éducation comporte l’idée d’une valeur, d’un but à atteindre, d’un mieux possible et souhaitable ; c’est ce que suggèrent les synonymes : élever, former, perfectionner » (O. Reboul, 1971 : 101).

Comment capitaliser tout cela en éducation environnementale et en enculturation ? C’est là un effort de notre part pour l’effectivité de l’écocitoyenneté, des écogestes dans la quotidienneté.

I.2. Education et éthique environnementale

La crise environnementale est une question de comportement lié au mode de vie engendré par le développement technoscientifique et le changement de mentalité. L’éducation environnementale implique un détour attentif et affectif en ce qui concerne le rapport au monde de la personne, vers son idéal recherché. L’éthique environnementale, considérée comme une éducation relative à l’environnement, vise le comportement humain idéal à l’égard de l’environnement, lequel peut être naturel, indépendamment de l’homme, ou perspectiviste, c'est-à-dire construit. Dans ce sens, en dehors de l’éducation scolaire, l’éthique environnementale fait son apparition dans des mouvements écologiques, dans des législations, réglementations de l’environnement, aux niveaux national et international (établissement de règles, promulgations de lois). Les mouvements, associations écologiques, les lois et les règles traduisent la commisération morale collective et individuelle à l’égard de l’environnement. Au niveau des juridictions, il faut être réaliste, on peut désobéir à ces lois et réglementations pour moult raisons. D. Bachelart remarque que :

le rapport de nos sociétés aux valeurs morales a changé. Les individus n’acceptent de respecter des normes imposées par une contrainte extérieure que s’ils considèrent qu’elles sont le produit de leurs choix personnels. Ils s’estiment maîtres de leur propre système de valeurs et ils se donnent le choix de juger au cas par cas si les normes établies par les institutions doivent être suivies. L’impératif d’être soi-même est devenu la valeur essentielle. Mais comment dans ces conditions soumettre le « moi » au minimum de contraintes collectives sans lesquelles il n’est pas de société possible ? (2009 : 38).

L’éducation environnementale vise à réduire drastiquement les attitudes éco-éthicides par l’éveil de la sensibilité et de la conscience cosmique afin d’orienter les individus vers la concrétisation du but ultime de la sauvegarde de l’environnement ; ce but ultime, c’est aussi inculquer un comportement idéal personnel vis-à-vis du milieu de vie, défaire les mentalités consuméristes. L’éducation est un moyen pour faire participer les masses consciencieusement à la recherche de solutions en leur apportant des connaissances et les motivations nécessaires. Pour gérer les questions environnementales,

on pourrait y parvenir par le moyen de l’éducation environnementale dont l’objectif est de former une population mondiale qui connaisse l’existence et l’importance des problèmes d’environnement et de développement ainsi que des problèmes annexes, et qui ait les connaissances, les compétences, l’état d’esprit, la motivation et la volonté nécessaires pour s’employer individuellement et collectivement à résoudre les problèmes du moment et à éviter qu’il n’en apparaisse de nouveaux (UNESCO-PNUE, 1993 : 3).

Être un citoyen responsable passe nécessairement par le processus idéal de socialisation. Peut-on transformer le comportement des enfants dans ce sens ? Oui, dans une mesure, on peut le transformer avec une éducation appropriée. Nous voulons soulever ici quelques points. Au niveau primaire, on n’a pas besoin de grands discours écologiques pour changer le comportement des enfants. Il faut s’adapter à leur niveau, leur environnement. L’éducateur des enfants doit être formé à cette dimension de l’éducation environnementale. Il a besoin d’être formé également aux questions environnementales et à leur évolution dans le temps.

L’éducation environnementale permet de mettre les enfants dans les dispositions à faire un saut qualitatif dans la sauvegarde de l’environnement. Les sciences de l’éducation doivent être capables, dans ce sens, de repenser, sinon redéfinir les itinéraires pédagogiques de l’éthique environnementale de façon à faire grandir les enfants avec une conscience écocitoyenne effective, une responsabilité vis-à-vis des générations futures, une liberté responsable et assumée dans l’avenir. « C’est seulement en cultivant de solides vertus que le don de soi dans un engagement écologique est possible » (Pape François, 2015 : 194). L’éducation à l’environnement et à la liberté responsable incite à des comportements qui ont une incidence directe ou indirecte sur la sauvegarde de la nature. Mais il faut éviter de s’attendre à un constat instantané des résultats. L’éducation environnementale est un ensemencement dont les résultats sont attendus à long terme.

II. Les chances de l’opérationnalité de l’éducation environnementale et de l’enculturation

L’éducation relative à l’environnement (ERE) est une préoccupation mondiale. La Charte de Belgrade de 1975, inspirée de la conférence de Stockholm de 1972, précise les objectifs, les principes directeurs des programmes de l’éducation environnementale qui concernent l’individu et le grand public. Comme objectif, il s’agit de former une population mondiale consciente et préoccupée par les problèmes environnementaux qui menacent l’humanité. Il faut donner les connaissances aux populations, la motivation de s’engager collectivement et individuellement, leur donner les outils pour réduire les problèmes environnementaux nouveaux.

II.1. Education relative à l’environnement (ERE) et égalité d’accès à l’éducation

L’éducation environnementale a besoin de l’égalité en matière d’accès à l’éducation. Dit autrement, l’inégalité d’accès à l’éducation est un obstacle à l’éducation environnementale, surtout dans les pays en voie de développement. Par conséquent, l’éducation doit s’étendre au plus grand nombre en mettant l’accent sur l’accès des milieux défavorisés afin de les motiver à s’intéresser aux questions environnementales. Cela suppose que les riches font montre d’engagement écocitoyen également. L’inégalité d’accès à l’éducation peut créer des disfonctionnements intergénérationnels en matière d’écocitoyenneté. « L’éducation progresse dans la plupart des pays quel que soit leur niveau de développement. Toutefois, des inégalités persistent dans la scolarisation des jeunes générations et le niveau de l’éducation des adultes » (PNUD, 2019 : 47). Il ne faut pas se contenter de relever les défis de l’éducation au préprimaire et au primaire. Le postprimaire, et surtout le secondaire et le supérieur ont également besoin du maintien des apprenants au cours de ces cycles.

Le préprimaire, le primaire et le postprimaire ne suffisent pas à motiver la conscience écocitoyenne tout au long de la vie d’un individu, ou aussi longtemps que possible. L’engagement écocitoyen dépend de l’incidence de l’éducation environnementale et de la maturité des apprenants par rapport à ce qu’ils peuvent faire. La maturité chez l’être humain répond à des étapes au cours du développement psychomoteur, de l’enfance jusqu’à l’âge adulte en passant par l’adolescence. L’éducation, pour permettre de garantir la conscience écocitoyenne, doit faire de l’éducation environnementale une chaîne du préprimaire au supérieur. Or,

l’essor rapide de l’éducation dans les pays en développement a entraîné la scolarisation de millions d’apprenants de première génération que leurs familles ne peuvent pas aider s’ils peinent à suivre le programme d’études (PNUD, 2019 : 57).

Ces situations ne permettent pas aux apprenants de s’intéresser aux questions environnementales. Leur préoccupation, c’est comment survivre, s’intégrer dans la société moderne en pleine mutation. Finalement ils finissent par développer les mêmes attitudes vis-à-vis de l’environnement que ceux qui n’ont pas été à l’école et qui n’ont pas la conscience écologique assez développée. L’environnement a moins de chance de bénéficier d’attitudes écocitoyennes de leur part. Les écogestes n’ont pas la chance d’être appliqués. L’éducation environnementale a besoin d’une baisse des inégalités socioéconomiques pour prospérer dans les pays en voie de développement. A défaut, il faut compter sur un dépassement de soi, de ses conditions économiques dérisoires pour sauvegarder l’environnement. Or, cela est un effort qui demande un mental d’acier dans un monde matérialiste, individualiste et exhibitionniste, où les apparences, l’avoir, priment l’être et les valeurs de la sobriété. Au départ, les jeunes peuvent être animés de bonne volonté. « Toutefois, confrontés à la dure réalité quotidienne du monde qui les entoure, au luxe et à la facilité apparents du monde capitaliste, les jeunes se prennent à rêver à un monde différent. Qui pourrait leur en vouloir ? » (D. Gay-Sylvestre, 2012 : 43). Il faut se donner les moyens éducatifs pour éviter l’aggravation d’une telle impasse soulignée ici par Gay-Sylvestre. Sa question « qui pourrait leur en vouloir ? » face aux mirages du monde moderne montre combien l’éducation environnementale a et aura fort à faire.

L’éducation environnementale doit cesser d’être un endoctrinement et inciter à la prise de conscience, à l’engagement libre et responsable. Comme le souligne D. Bachelart,

en éducation à l’environnement, le danger d’une morale dogmatique et d’une emprise sur l’humain est très présent et l’urgence des changements semble peu compatible avec le temps long de l’éducation. L’éthique en éducation peut être considérée comme un processus d’interrogation et de pensée critique (2009 : 36).

Nous voulons signifier que la nécessité de l’éducation environnementale ne vise pas à mettre désormais les enfants (apprenants) en première ligne dans la lutte contre la crise environnementale, mais de maximiser sur les adultes responsables de demain qui seront en première ligne. Les enfants d’aujourd’hui n’ont pas à jouer le rôle des parents actuels dans les questions environnementales. Il faut les préparer à cette responsabilité dans l’avenir. Ce sont les enfants d’aujourd’hui qui seront les initiateurs des politiques publiques de demain. Par conséquent, il convient de les préparer aux enjeux des défis écologiques futurs. Celui qui éduque à l’environnement doit donner l’exemple lui-même car, on éduque plus par ce que l’on fait, que par ce que l’on dit ou écrit.

II.2. L’éducation environnementale et la veille technoscientifique

L’éducation environnementale a dépassé au jour d’aujourd’hui le cadre des plantations d’arbres, des recyclages d’objets solides non biodégradables etc. Le rôle de l’enculturation dans l’éducation environnementale est la veille scientifique et technologique. L’engagement pour la cause de l’environnement nécessite des hommes et des femmes capables de comprendre le progrès technoscientifique, ses implications et ses impacts sur l’environnement. La conscience et l’engagement écocitoyen d’un individu, d’un groupe d’individus peuvent être influencés par la force alléchante du progrès technologique en vogue. Le progrès technoscientifique est une force sociale qui influence les mentalités, les comportements, et qui peut détourner facilement des comportements écocitoyens déjà amorcés.

L’éducation environnementale va consister à préparer à la compréhension des transformations et à prévenir les changements du paradigme social dominant. L’éducation environnementale, c’est aussi critiquer les nuisances du progrès technoscientifique et du développement. En d’autres termes, c’est savoir lire les discours scientifiques et technologiques pour déconstruire les mystifications du développement et les pratiques écosophobes. Une telle lutte ou veille nécessite un bon niveau d’éducation, un bon niveau de culture et d’informations environnementales. Les scientifiques ne sont pas immaculés. En effet, très souvent, « même si les scientifiques ont conscience des éléments irrationnels qui interviennent dans leur activité, ils ont tendance à les refouler, ou du moins à les écarter comme étant de peu de conséquence » (W. Broad. ; N. Wade, 1987 : 159). Celui qui méconnaît les mécanismes et les systèmes de la technoscience ne peut pas dénoncer une telle attitude des scientifiques.

La force sociale de la technoscience qui structure la société et détermine la condition de l’homme peut conduire à la division autour d’un idéal écologique et social parce que cette force a désarticulé les points de vue. Or, pour citer Y. Akakpo,

une société désarticulée, n’ayant pas de fin fonctionnelle cohérente, ses sous-systèmes fonctionnent et se projettent comme des monades. Sa fonctionnalité souffre de déficit d’unité ou de cohésion et n’obéit pas forcément à un projet (2019 : 33).

L’objectif de la puissance technoscientifique est de disposer techniquement des choses : l’homme et la nature. En disposant des choses, elle peut bouleverser des objectifs écocitoyens. La veille scientifique et technologique réside en cela. Les sociétés contemporaines sont des sociétés d’innovations technologiques, des nouveautés, des espaces de liberté de choix de comportement et de consommation. L’environnement se trouve sous la pression perpétuelle des activités anthropiques qui accélèrent la dégradation de la biosphère et le réchauffement climatique. La veille technoscientifique est un impératif par l’éducation environnementale car,

il faut donc considérer, dans le sens du caractère ouvert du monde moderne, qu’il y a, en général, une certaine pression, toujours très forte et de plus en plus forte, que la rationalité opératoire, par la médiation de la puissance souveraine, la puissance économique et financière, la puissance de l’information, exerce sur l’individu, la société, l’histoire et la temporalité des choses. (Y. Akakpo, 2019 : 29).

L’information est un élément essentiel du progrès technoscientifique que l’éducation environnementale doit intégrer car elle sert dans une large mesure les enjeux économiques de ce progrès. L’information investit la société afin de l’adapter à la logique de l’économie. Elle est capable de soumettre la société et les individus à une redéfinition, une révision des visions écocitoyennes. Des comportements écocitoyens peuvent être abandonnés à cause de l’information liée aux innovations technologiques. Les médias peuvent être d’un apport inestimable en éducation environnementale à ce niveau en donnant l’information juste au grand public.

III. Education environnementale et participation du public

L’éducation environnementale et l’enculturation font partie des fondements assurant le succès des politiques environnementales et la durabilité de la conscience écocitoyenne. Elle est une pédagogie de la participation du public parce qu’il y a une imbrication entre la participation du public et l’écocitoyenneté. Elle détermine et oriente les politiques et comportements qui intègrent de façon effective la conscience écocitoyenne.

III.1. Education environnementale efficiente et responsabilité écocitoyenne du public

On peut dire que l’éducation et l’enculturation intègrent la place et le rôle du public dans les décisions concernant le développement en général, et la sauvegarde de l’environnement en particulier. La responsabilité écocitoyenne du public est incontournable pour une éducation environnementale efficiente. Il n’y a pas un modèle type de participation publique à imposer ou à appliquer. Elle peut prendre plusieurs formes différentes, selon les pays, les communautés, le contexte socioéconomique, institutionnel, culturel, sociopolitique, technologique, et même selon la nature du projet de développement. L’éducation environnementale, selon le niveau, doit permettre de cerner ces différents contextes et leurs implications.

La participation du public ne veut pas dire se limiter aux décisions ou propositions des populations. Si c’est le cas, les experts ne serviront à rien dans la sauvegarde de l’environnement, et les projets de développement ne vont pas répondre forcement aux objectifs fixés et attendus. La participation du public est à la fois horizontale (entre populations elles-mêmes) et verticale (entre autorités et populations). Finalement, la participation du public ne revient-elle pas, dans une certaine mesure, à une quête de son adhésion ? La participation du public est un domaine qui met en jeu des intérêts divergents et souvent conflictuels. L’engagement du public s’appuie souvent sur les conseils avisés et connaissances des experts en environnement ou en politiques publiques de développement. Par conséquent, si l’on peut cacher certains éléments aux populations pour servir des intérêts égoïstes inavoués, ce ne sont pas tous les éléments au service de ces intérêts qui peuvent êtres cachés pour toujours. D’autres sont dévoilés au grand jour et finissent par faire l’objet de dénonciations et de revendications.

La planification concertée accorde de l’importance aux acteurs en s’appuyant sur l’interaction, le dialogue, les échanges afin de dégager une logique commune à la sauvegarde de l’environnement et la mettre en évidence. Par la concertation entre experts et public éclairé, on peut arriver à un consensus écocitoyen. Dans les échanges et le dialogue, les contradictions y sont révélatrices des divergences à partir desquelles on extrait une solution commune, consensuelle et originale. La concertation entre dans le cadre du principe de la gestion intégrée et négociée de l’environnement et des ressources naturelles d’une part, et d’autre part, assure une légitimité accrue et retrouvée des décisions.

L’éducation environnementale constitue un pont entre les décisions stratégiques des experts, les points de vue du public, la gestion de l’environnement, des ressources naturelles, l’aménagement du territoire, la sélection des projets, et les implications technoscientifiques, environnementales et sociales. C’est dans ce sens que A. Thibault (1995 : 9) estime que « l’élu décideur doit inviter les citoyens à l’accompagner dans l’exercice du pouvoir principalement dans des manières qui touchent les gens et celles qui confrontent les valeurs ». La participation publique permet d’améliorer la décision, le projet par la prise en compte sélective des considérations socioéconomiques, culturelles et environnementales. Elle facilite la gestion des inconvénients sur l’environnement à l’échelle locale.

Par conséquent, il faut éviter l’illusion qui consiste à considérer le public comme un conglomérat de simples citoyens incapables de comprendre la complexité des questions environnementales, de la réalité socioéconomique et doivent déléguer leur pouvoir de décision à des experts. Le public n’est pas nécessairement naïf. Il y a dans le public, des experts hors de la sphère politique, étatique et institutionnelle qui s’associent aux populations pour renforcer leurs participations avec des propositions et des arguments qui peuvent s’imposer aux gouvernements. Les experts hors de la sphère étatique se constituent souvent en formateurs des populations en leur donnant régulièrement les informations nécessaires pour qu’elles les utilisent pour se défendre. Cette manière de procéder est une forme d’éducation également qui augmente le nombre de personnes sensibilisées et engagées. L’éducation environnementale a l’impérieux devoir d’atteindre une masse critique d’acteurs pour être significative sur le plan de la conscience écocitoyenne au quotidien.

III.2. L’enculturation et la responsabilité des générations futures

L’enculturation est le soubassement culturel de l’individu d’une société donnée. C’est par elle que l’on transmet à l’enfant les normes, les valeurs morales partagées par la société. Elle est le processus par lequel les initiés aux questions culturelles et traditionnelles transmettent ces valeurs et mœurs aux enfants du groupe social dès leur plus jeune âge. Le comportement futur de ces enfants est fonction de la réception de la transmission des bonnes valeurs. Ils commencent par le statut d’agents récepteurs, patients, passifs à leurs débuts parce que conditionnés par les fondamentaux de la famille, de la culture de leur société. Au départ, l’enfant est un instrument provisoire de mise en œuvre d’un idéal commun selon les valeurs concernées en attendant l’âge adulte pour s’engager en toute liberté.

A l’âge adulte, enfant qu’il était hier devient un agent acteur qui a le sens de la responsabilité, de la liberté, du jugement de valeur de ses actions. Il a son mot à dire maintenant, mais pas n’importe comment. Il y a des enjeux majeurs, et c’est en raison de cela qu’il convient d’avoir permanemment des vases communicants entre les étapes du processus de socialisation en matière d’éducation environnementale, de la famille jusqu’à l’université, en passant par les autres milieux de formations. Nous présentons ici les résultats auxquels nous sommes parvenus en sept (7) grands piliers afin de permettre à l’humanité future d’assumer pleinement ses responsabilités écocitoyennes :

  • L’égalité d’accès à l’éducation : l’éducation pour tous, qu’elle soit de type familial, scolaire et alphabétique, est nécessaire au départ de l’éducation environnementale. Même si l’impact n’est pas une décision personnelle, elle a le mérite de viser un large public à la base et de poser les fondements de l’engagement écocitoyen futur chez les apprenants. C’est un ensemencement utile à long terme. Tous les acteurs véritablement écocitoyens sont essentiels : parents, éducateurs, l’Etat, la société civile, les ONG, experts hors de la sphère étatique etc. Les éducateurs des jeunes apprenants ont besoin de formations sur l’éducation relative à l’environnement afin de mieux rendre ce service, tout en gardant à l’idée que celui qui éduque à l’environnement doit être le premier à donner l’exemple.

  • L’importance des Universités dans le relai : les questions environnementales sont complexes à un certain niveau de décision et d’élaboration de projets de développement. Les universités doivent prendre le relai dans l’éducation écocitoyenne ; d’où la nécessité de vases communicants entre les différents acteurs, les différentes institutions d’éducation et de formation, en fonction des étapes du processus de socialisation et d’éducation.

  • La veille technoscientifique : l’éducation environnementale est aussi une veille technoscientifique. En effet, la compréhension des différentes mutations sociales n’est pas donnée à tous. Elle nécessite une formation de haut niveau, à défaut une culture scientifique à la hauteur des mutations sociales, des innovations technologiques et surtout à la hauteur des défenseurs de la modernité en face. La critique du progrès technoscientifique du point de vue écologique est une éducation à l’environnement.

  • La participation du public : les politiques environnementales nécessitent la participation du public dans les projets de développement. Sur cette base, l’éducation environnementale permet de cerner les différents contextes et les réalités propres à chaque société.

  • La justice sociale : l’éducation relative à l’environnement est une promotion de la justice sociale :

les effets des changements climatiques et de la technologie sont certes universels, mais ils ne touchent pas tous les pays de la même manière. Par conséquent, divers éléments sont nécessaires pour tracer une trajectoire propre à chaque pays, sur la base d’un diagnostic des déterminants des inégalités (PNUD, 2019 : 276).

  • Eduquer à l’environnement, c’est travailler à réduire les inégalités d’accès aux ressources naturelles, les inégalités liées aux impacts négatifs que subissent des populations dont les actions sont moins responsables de la crise environnementale d’origine anthropique.

  • L’éducation environnementale est un pont : elle constitue un pont entre les décisions des autorités politiques, des experts et la vision des populations vivant sur un territoire donné. Elle peut conduire au courage civique, c’est-à-dire à la capacité des gouvernés à dire courageusement non à des projets des autorités et des experts qui ne sont pas en faveur des populations concernées. Elle impose par conséquent, dans ce cas de figure, la voie du consensus, du dialogue assorti de points, de méthodes de suivi et d’évaluation consensuels.

  • La prise en compte des valeurs culturelles endogènes : il s’agit d’éviter aux générations futures d’agir sans une base culturelle endogène. En effet, l’environnement est perspectiviste, c’est-à-dire un construit social, culturel. Les sagesses écologiques endogènes propres à chaque société doivent servir de guide également. Nous entendons par sagesses écologiques endogènes, les traditions et valeurs culturelles d’une société qui prônent la sauvegarde de la nature. Il est nécessaire de transmettre ces traditions et valeurs culturelles aux générations futures.

Si tous les acteurs, quels qu’ils soient, locaux, scientifiques, gestionnaires ou simples citoyens ont des représentations, intimement liées à leurs savoirs qui déterminent leur façon d’appréhender le monde, alors c’est cette diversité des savoirs locaux qu’il faut préserver, sans vouloir viser à une illusoire unanimité pour aborder la question des relations des sociétés à une nature devenue un construit social (Allard et al., 2006 : 312).

Si l’environnement est un construit social, culturel, il convient de développer des politiques publiques endogènes en éducation relative à l’environnement avant d’affronter la dimension cosmopolitique à l’échelle internationale. Il faut savoir partir de soi pour comprendre le système dominant du monde afin de se donner les moyens culturels pour tracer son propre itinéraire ouvert à un monde globalisé.

Disons que l’éducation environnementale a des enjeux multiples et complexes. C’est la prise en compte de chacun de ces enjeux qui empêchera de réduire l’éducation environnementale à une simple formation des enfants aux questions environnementales élémentaires : planter des arbres, jeter les objets souillés dans la poubelle, poser des écogestes comme éteindre la lumière… Il faut les préparer à affronter les défis de la modernité, à comprendre les mécanismes des nouvelles technologies, des modes de vie, causes majeures de la crise environnementale.

Conclusion

L’effectivité de l’écocitoyenneté ne peut se réaliser sans une éducation environnementale de masse afin de reconfigurer les mentalités, les institutions, les comportements en fonction de cette nécessaire effectivité. L’ampleur de la crise écologique est le résultat du parcours d’un « habiter » humain sur la terre qui induit aujourd’hui à des réaménagements qui prennent en compte le rapport au milieu de vie marqué par des mutations, des actions anthropiques, avec pour effets boomerang des impacts attentatoires à l’homme et à l’environnement. La responsabilité face à la crise environnementale est intimement personnelle et collective. Chacun est appelé à se soucier des générations présentes et futures dans son mode de vie et de penser.

Le jeune enfant doit être initié à cette responsabilité dès l’enfance dans son processus d’éducation. Ce souci doit se traduire par des actions concrètes au niveau de tous les acteurs de la chaîne de l’éducation environnementale. Pour ce faire, il est impossible, premièrement, de dissocier ce qui relève de la pensée scientifique de l’engagement politique, écocitoyen ; deuxièmement, de dissocier ce qui relève des dynamiques sociales concernant l’accès, l’usage et le contrôle des ressources du chantier de l’assainissement des rapports humains avec l’environnement.

Le temps long de l’éducation semble incompatible avec l’urgence du comportement écocitoyen aujourd’hui. Ce temps est long certes, mais nécessaire pour avoir dans l’avenir des adultes engagés, convaincus et convaincants dans la lutte pour la cause de l’environnement de façon durable. L’éducation environnementale ne servira à rien si elle ne touche pas la sensibilité des enfants pour les sauver de l’insensibilité cosmique dans l’avenir, à l’âge adulte. Par l’enculturation, il faut rebâtir à la source, la fraternité écologique homme-nature.