Un événement exceptionnel il y a 210 Ma : la chute d’une météorite

A la marge des formations sédimentaires du Trias, à l’extrême ouest du Limousin, près de Rochechouart, une formation géologique originale affleure sur près de 300 km2 ; près de la ville de Rochechouart on rencontre des roches singulières appelées brèches (elles sont constituées de morceaux anguleux de roches diverses réunis par un ciment). Comme le montre la carte géologique (ci-dessous), cette formation affleure de manière discontinue sur un cercle de 20 – 25 Km de diamètre. Ces brèches, qui ne peuvent se deviner d’après la topographie sont le résultat de l’impact il y a 210 millions d’années (fin du Trias), sur les roches du socle limousin (granites, gneiss…) et près de la bordure de la mer aquitaine au début de l’ère secondaire, de la chute d’une météorite pierreuse riche en fer dont le diamètre est estimé à un peu plus d’un kilomètre et le poids à 5 milliards de tonnes. Par comparaison, cette météorite était dix fois plus petite (10 km de diamètre et cratère de 200 km) que celle de Chicxulub au Mexique qui est sans doute à l’origine de la disparition de nombreuses espèces animales il y a 65 millions d’années à la limite Crétacé – Tertiaire.

Carte géologique de la région de Rochechouart montrant la diversité de faciès (voir photographies ci-dessous) d’après  .

Par suite de l’érosion à l’ère tertiaire qu’on ne sait pas bien évaluer, à Rochechouart nous n’avons pas assez d’indices pour déterminer la taille initiale du cratère d’impact ni l’importance des dégâts mais chacun s’accorde à dire qu’il furent considérables sinon cataclysmiques : séisme associé de magnitude extrême (plus de 9), compression estimée à 10 – 35 Gigapascals (GPa) et métamorphisme de choc associé, flux de chaleur très important avec vaporisation de la météorite elle-même, conséquences visibles dans un rayon de plusieurs centaines de kilomètres et destruction de tous les êtres vivants sur des surfaces du même ordre, retombées de poussières etc.

types_de_meteorites-f5664


Tableau montrant la diversité de la composition des météorites

Cet événement a pu être partiellement reconstitué à une date assez récente (les premiers travaux en 1967 ont été conduits par F. Kraut) avec l’étude des modifications enregistrées par les roches sous-jacentes qui ont été affectées (cassures inhabituelles des quartz qu’elles renferment). Parmi les figures les plus connues, outre les brèches, citons les cônes de percussion, les quartz clivés et les pseudotachylites (roches fondues par friction). La cartographie des brèches encore épargnées par l’érosion postérieure que l’on estime à une centaine de mètres (?) montre une répartition zonée et concentrique des faciès de brèches. Il s’agit pour l’essentiel de produits de retombée.  



Vue d’une carrière montrant la base de l’impact de la météorite. Cl HB

On distingue habituellement les brèches de retombée (les plus abondantes) et les brèches de dislocation :   Au sein des brèches de retombées qui sont toujours polygéniques, on reconnaît, depuis le centre (là où le choc de l’impact a été le plus fort) vers la périphérie :   – pour des pressions énormes, supérieures à 100 GPa, les brèches (photo n°1 ci-dessous) sont très riches en verre (donc largement fondues) souvent de couleur jaune et bulleuses (à titre de comparaison, la formation du diamant est estimée entre 5 à 10 GPa ou plus de 150 km de profondeur) ; dans ces faciès qui présentent aussi des figures d’écoulement (photo n°2) très nettes, les fragments de gneiss (à peine reconnaissables) sont peu nombreux et de petite taille ; – des brèches rouges dans lesquelles les éléments de socle bien visibles sont aisément déterminables et le ciment qui les englobe composé en proportions égales de verre et de poussières soudées ; on y rencontre une espèce particulière de silice de haute température (photo n°4) ; – des brèches vertes (type Chassenon) contenant encore du verre, mais aussi beaucoup de poussières consolidées (photo n°3).  

Quatre faciès d’impactites en sections polies. Légendes dans le texte Cliché G. Colombeau, Université de Limoges


  Dans les brèches dites de dislocation (les moins transformées) les fragments de gneiss sont bien reconnaissables, ils appartiennent à un seul faciès (ce sont des brèches dites monogéniques) et la granulométrie des morceaux est relativement homogène ; ces brèches résultent de la fragmentation sur place des roches impactées.   Des anomalies géochimiques ont été mises en évidence dans ces impactites : des anomalies en nickel et chrome (deux fois plus que la normale) et une forte anomalie (cinq fois plus) par rapport à la moyenne de la croûte continentale en potassium (K2O) avec des teneurs atteignant (ou dépassant) très souvent 10 %. Fortes concentrations également en iridium (0.1 à 1 µg/Kg) qui est un élément rare à la surface de la Terre, mais plus commun dans le noyau de la Terre et des autres planètes et dans les météorites.  

où voir des traces de la météorite ?

Autour de la ville de Rochechouart en Haute Vienne