Chapitre III – Paris Vingtième, l’âge d’homme

https://doi.org/10.25965/ebooks.161

p. 36-53

Sommaire

Texte

Comment Simon Jeanjean encore tout jeune s’en vint à Paris en compagnie de ses tantes, et comment il y rejoignit son père, sans pour autant lui en vouer quelque reconnaissance que ce soit. Ses archives nous informent sur ses débuts professionnels et syndicaux, sur son service militaire, jusqu’à son mariage avec Blanche, béni par les Sœurs de Saint-Vincent-de-Paul, jusqu’à la naissance de leur première née, Marie-Denise dite Denise.

Le déménagement à Paris

« En 1904, papa a dit "Je ne veux pas faire mon service allemand". Et tout le monde est parti à Paris : le grand-père, les trois sœurs, et papa. » Tel apparaît d'abord le souvenir des vieilles dames dans l’interview : Go to the west ! Qui m'aime me suive ! Mais les archives donnent quelques précisions différentes. Simon était encore mineur. Cette phrase de l'interview est d'ailleurs complétée par la suivante : « Le grand-père, quand papa a décidé de venir à Paris, il leur a cherché un logement. Il leur a fait déménager les meubles... » Ce que nous ignorons, c’est depuis quand le père (le "grand-père", Lucien Jeanjean) avait quitté Ambérieu-en-Bugey, depuis quand il était installé à Paris, et s’il remit les pieds à Metz à son retour d’Algérie où il avait servi dans la Légion jusqu’en 1882. On sait seulement qu’il se trouvait établi à Ambérieu en 1885 et que Simon y naquit en 1886.

Les circonstances du déménagement nous sont connues par les lettres conservées, reçues à Metz par les tantes et Simon, et archivées par lui. C’est un dialogue à trous – comme plus tard, la correspondance de guerre nous apparaîtra à travers le filtre de l'album, sous l'unique point de vue du poilu collationnant ses propres cartes postales reçues par sa femme et ses tantes à Paris – les réponses donnant à deviner les questions. Ces lettres concernant le déménagement, datées d’octobre à décembre 1903 sont au nombre de huit, dont cinq déchirées en morceaux que j’ai reconstituées. En morceaux, mais soigneusement rangées. Trace d’une solide rancune, décidément, du fils pour ce drôle de père pas drôle, mais suivie d’un repentir conservatoire. Le déménagement, en préparation depuis des mois en 1903, eut lieu au début de l’année 1904. Simon, à 17 ans, était mineur pour quelques années encore. Les courriers préparatoires ne l'impliquent donc que partiellement.

Note de bas de page 1 :

Rappel : pour la transcription des courriers, l’orthographe est rétablie mais le vocabulaire et les tournures de phrases propres au scripteur sont conservés.

La première lettre en notre possession (2246-2247) est signée du père, Lucien Jeanjean, et adressée à ses trois sœurs, tantes de Simon. L’orthographe est plus soignée que dans les courriers anciens du légionnaire, mais la ponctuation reste incertaine, ignorant notamment l’usage de la majuscule en début de phrase1 :

Paris le 7 octobre 1903 – Chères sœurs s et fils – Je réponds de suite à votre lettre qui nous a tous bien fait de la peine de votre situation à Metz. Mais aussi beaucoup plus de plaisir de savoir que nous serons tous réunis. Si vous saviez comme Édouard est content. Enfin, bref là-dessus, il aurait mieux valu il y a 30 ans et même quand je suis revenu du service de prendre cette résolution...

La lettre fait allusion, pour commencer, à une situation pénible « qui nous a fait bien de la peine ». Nous aimerions en savoir plus sur ce qui semble avoir été le motif décisif du déménagement. S'agit-il d'une difficulté financière ou matérielle déjà ancienne, mais dont Lucien Jeanjean n'aurait pris connaissance que par un courrier récent ? D'une difficulté nouvelle liée à un changement de situation familiale ou sociale (décès d'un parent, perte d'un soutien matériel, d'un logement) ? D'un accident, d’un nouveau règlement, bref d’une contrainte leur rendant la vie difficile ou impossible à Metz ? Quel que soit cet événement, il lui inspire le regret de ne pas en être venu là plus tôt, et l'amènera dans la suite de la lettre à tenter de se justifier, voire de se disculper et de tenter de rassurer ses correspondants sur son dévouement à leur égard. Les « malentendus » en question, dont le détail sous-entendu nous échappe, semblent avoir pesé lourd.

Il aurait mieux valu il y a 30 ans et même quand je suis revenu du service, écrit-il. Trente ans, cela nous renvoie à l'annexion allemande. Lucien Jeanjean, âgé de quarante-trois ans en octobre 1903, n'en avait que treize en 1873. J’y vois donc un reproche adressé à ses sœurs, à ses parents, à tous ceux-là qui sont restés, qui auraient mieux fait d’opter pour la France quand il en était encore temps, alors que lui-même était trop jeune pour en décider.

Autre chose. Si vous saviez comme Édouard est content… On peut le comprendre a priori, venant du cadet (demi-frère certes, mais qu’importe le demi pourvu qu’on soit des frères). Les petits frères nourrissent souvent une admiration de principe pour leurs aînés. Si la prétendue joie d’Édouard devait reposer sur une fréquentation ou cohabitation antérieure, il faudrait qu'ils se soient connus précédemment à Metz. De toutes façons, cette joie est d’abord celle du père, Lucien, à la perspective de ces retrouvailles à Paris. La réunion promise serait pour lui une réhabilitation – la fin espérée du « malentendu » évoqué un peu plus loin… Et j’imagine assez bien qu’Édouard, si ressemblant et conforme à son père, fût en attente de toutes sortes de plaisirs en compagnie du chouette grand frère annoncé. Simon, drapé déjà de probité candide et de lin blanc, était plus que fréquentable, avec un caractère bien trempé. Réciproquement je ne lui vois nulle part manifester la moindre estime pour cet Édouard, gentil assurément, mais au regard un peu vide.

La suite de la lettre est à l’avenant, d’un optimisme prometteur :

...Mes chères sœurs il ne faut vous tourmenter de rien, nous nous occuperons de vous trouver un logement pour le moment où vous viendrez car il faut que je vous explique comment les logements se louent : le 8 octobre c'est le terme, et le 14 novembre le demi-terme. L'on loue ordinairement pour le terme ou le demi-terme. Nous laisserons passer le demi-terme de novembre, et nous chercherons un logement vacant de manière à louer pour le terme de janvier qui est le huit, quand nous aurons trouvé ce qui pourra vous convenir. Nous donnons le denier à Dieu à la concierge, car c'est la coutume à Paris et le logement est retenu et en rentrant il faut payer un terme d'avance. Maintenant pour le restant vous n'avez rien à vous occuper : quand vous arriverez, vous descendrez chez nous de manière que vous puissiez vous retourner et vous éviter toute dépense inutile. Je ne veux pas autrement car chez moi c'est chez vous et il ne faut pas revenir là-dessus. Je ne comprends pas comment Lucie me demandait si je voulais. Malgré tous nos malentendus je suis toujours votre frère et votre obligé. Elle n'avait qu'à nous dire de chercher un logement, et c'était bon…

Le contentieux en question n'a donc jamais coupé les ponts, même s’il y insiste pesamment : malgré tous nos malentendus, je suis toujours votre frère et votre obligé. Ensuite sont détaillés doctement quelques points d'organisation. Mais on devine entre les lignes qu’il n'a encore rien fait et que l'appartement reste à trouver. Le « Denier à Dieu » est simplement l’acompte ou les arrhes. Denier à Dieu, ou « de Dieu », l'expression a varié ; j’ignore en quoi cela peut concerner Dieu. Dans une lettre suivante, datée du 27 octobre (2250) où Lucien Jeanjean annoncera avoir enfin pris une option ferme et l'avoir versé, il l'orthographiera « dernier adieu », ce qu’on se gardera d'interpréter comme un lapsus révélateur.

...Maintenant je vous ai expliqué pour la 1ère combinaison au cas où vous amèneriez votre mobilier, répondez nous le plus vite possible. Expliquez nous comment vous voulez faire, de manière que je puisse vous donner tous les conseils pour vous éviter les frais et les embarras. Maintenant un logement de deux pièces et une cuisine il faut compter de 320 à 350. Je ne vois rien de plus à vous dire, quand vous nous aurez de nouveau écrit comme vous comptez faire, je pourrai vous donner tous les conseils comment il faudra faire, encore une fois ne vous faites pas de mauvais sang, vous aurez un chez vous à Paris.

Julie et Édouard se joignent à moi en attendant le plaisir de vous embrasser tous

Votre frère et père – Lucien Jean

Les courriers suivants nous permettent de suivre les progrès de l'entreprise. L'organisation semble précise, tout est prévu pour les meubles, qu'elles peuvent choisir de revendre ou d'apporter si elles y tiennent, on s'arrangera. Nous avons parlé des meubles qu’elles ont fait suivre, que la famille aura conservés ensuite et que nous avons perdus ; s’y trouve déjà la table à rabats des couturières. Un logement est trouvé rue du Pressoir, à deux pas de chez Lucien et les siens. C'est « au premier sur une cour qui est assez gaie car c'est une entrée d'un établissement de bains » (2251). Opération bénéfique, puisque les parisiens en profitent pour déménager eux aussi en se rapprochant des arrivants – qui n'en furent pas nécessairement ravis. Ainsi emménageront Simon et ses tantes dans ce premier logement, 14 rue du Pressoir donc – Lucien et Julie s'installant au 18 – non loin du boulevard de Belleville, à la pointe nord-ouest de ce 20e arrondissement qui restera leur territoire d'élection.

Note de bas de page 2 :

Le Parc de Belleville fut créé dans les années 1980 (ouvert en 1988) sur l’emplacement d’une ancienne carrière de gypse.

(Un peu plus tard, après son mariage probablement et pendant toute la durée de la guerre, Simon installera sa nouvelle famille au 46 Villa Faucheur, 1 rue des Envierges, de l'autre côté au nord et au-dessus de l’actuel Parc de Belleville2, en attendant plusieurs déménagements ultérieurs, toujours dans le 20ème comme on le verra.)

Il y a trois pièces, la première vous pouvez faire votre salle à manger et y mettre un grand lit, dans cette pièce se trouve un grand placard formant cuisine comme cela se fait à Paris, il y a un réchaud à trois trous et une pierre à évier. Dans la deuxième pièce vous pouvez y faire votre chambre bien entendu avec un grand lit et la troisième serait un peu plus petite mais assez grande pour pouvoir y mettre un lit-cage et y travailler (loc cit, 2251)

Espace bien exigu pour loger trois femmes et un jeune homme, même pour « y travailler ». Les sœurs Jeanjean étaient couturières. Il leur conseille ensuite instamment, ainsi qu'à Simon, de se munir de toutes recommandations propres à aider à leur insertion professionnelle et scolaire : pour elles, de la part des Sœurs de Saint Vincent de Paul, ou de Saint Joseph où Lucie allait couper les robes ; et pour Simon tous ses certificats principalement de la maîtrise car Julie ira le présenter à l'abbé Fontaine celui qui a fait faire la première communion à Édouard (2254-2255). Lucien Jeanjean n'a de cesse, quant à lui, de citer et de mettre à profit les relations issues de son ancien travail à Montigny-lès-Metz et autres. L'amicale des Alsaciens-Lorrains à Paris fonctionne bien. Quant à cette mention de Montigny-lès-Metz, elle répond au moins à la question de savoir s’il revint habiter sa région natale, par l'affirmative.

Note de bas de page 3 :

Cf. L'insertion des émigrants [alsaciens et lorrains] en France et à l'étranger, In Alfred Wahl, op.cit ., chap. V, p. 341 et suiv.

Il existait de nombreuses associations suite aux immigrations issues de l'Option3. Simon faisait partie des Enfants de Metz, comme nous l’apprendrons par la suite. Si nous n'en voyons pas trace dans ses archives, en revanche on y retrouve quelques certificats tout ce qu'il y a de plus catholiques. Et pour ce qui est des recommandations ou bulletins scolaires élogieux, on a vu que Simon en était abondamment nanti.

Note de bas de page 4 :

Énorme mouvement démographique, social et culturel analysé par Maurice Crubelhier dans Les citadins et leurs cultures, in La ville de l'âge industriel, Le Seuil (Histoire de la France urbaine), p. 371 et suiv. Voir notamment « Le cas de Paris », p. 391 : « La population de Paris a doublé une première fois de 1801 à 1851, une seconde fois de 1851 à 1876... L'afflux de provinciaux a été le facteur décisif de ces multiplications. »

Prévu en 1903, le déménagement des trois Lorraines et de leur neveu eut lieu au début de l'année suivante. Et ainsi vinrent les Jeanjean participer à cet afflux de provinciaux4 gonflant la capitale et qui y restèrent.

Les débuts professionnels

Seuls quelques certificats de travail, quelques photos rarement datées, jalonnent cette première période de la vie parisienne (et professionnelle) de Simon Jeanjean. Le jeune Simon avait 18 ans. Portait-il déjà un binocle, des moustaches à crocs, pour avoir l'air d'un homme ? Si oui, cette photo où on le voit avec cravate et col cassé pourrait dater de cette époque (1402). On se vieillit en général, à cet âge-là, on fait l’essai de son système pileux. Ce Jeanjean-là, nous l’avons vu, cultivait les idées et slogans réactionnaires hérités de son milieu catholique ultra. Il devait s’exprimer avec un bel accent lorrain traînant, voire germanique, mais que l’effet mimétique aura vite estompé. Comme il fait sérieux, un peu absent avec son éternel strabisme. Est-ce sous cet aspect qu'il rencontra pour la première fois sa future, et quand ? Poursuivit-il des études ? Il semble bien qu'il soit entré, en arrivant à Paris, de plain-pied dans la vie active, il faut bien vivre.

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Du 15 mars au 30 août 1904, il fut employé de bureau au service de Julien Levinger comme l'indique un premier certificat (2001). Ce nom peut être celui d'un natif d'Alsace ou de Lorraine, mais ne nous dit rien sur son activité. Le deuxième certificat est plus précis : du 26 septembre au 17 novembre 1904, Simon Jeanjean (« le nommé Jean Simon ») est comptable chez A. Landeau (2002). L'en-tête, en bandeau et en belles lettres ornées dans le style de cette Belle époque, nous apprend qu'il s'agit d'une « Fabrique de Supports de Carcasses d'Abat-Jour et d’Écrans – Spécialité pour Confiseurs & Cartonnages riches ». Une illustration, en haut à gauche, représentant un lustre ou une couronne, est accompagnée de ce complément d'information : « Travaux de Fil de Fer et Laiton en tous genres (support breveté) – Fantaisies – Modèles ». On peut noter au passage que les « carcasses d'abat-jour » ne sont pas sans rapport avec son futur emploi définitif chez Tourniéroux pour les « Becs Visseaux ». Simon Jeanjean y développe des compétences (de comptable, de contremaître, de secrétaire) applicables à des activités diverses, et qu'il mettra au service de ses engagements militants, comme trésorier ou secrétaire. Sa carrière présentera une belle continuité.

Un troisième certificat, produit justement par la Société Tourniéroux, représentants dépositaires de fabriques françaises et étrangères, et daté du 4 octobre 1907 (2003), atteste que « depuis le mois d'août 1905 jusqu'à ce jour, (…) Monsieur Simon Jeanjean était employé chez nous comme magasinier expéditionnaire et qu'il nous quitte pour accomplir son service militaire ». Il aura donc eu – sauf lacune des archives – une activité professionnelle depuis son arrivée à Paris, de façon continue à l'exception d'une interruption de la fin de 1904 à août 1905.

Troisième essai réussi. Simon Jeanjean fut toute sa vie au service de la maison Tourniéroux, fidèlement, en temps de paix comme en guerre.

Anticipons un peu : un nouveau certificat, signé Tourniéroux et daté de juin 1930, déclarera que « M. Simon JEANJEAN a été employé chez moi depuis le mois d'août 1905, a débuté comme magasinier-expéditionnaire et quitte ce jour comme directeur ». En 1930 en effet, Simon Jeanjean dut présenter sa démission à Léonard Tourniéroux, patron fondateur, qui prenait sa retraite. C'est à cette fin sans doute que fut rédigé le curriculum vitae suivant daté du 10 octobre 1929 (2010). Nous y trouvons quelques précisions complémentaires sur la biographie de Simon Jeanjean :

JEANJEAN Simon – 140, rue de Ménilmontant, Paris XXème.
Né le 30 Janvier 1886 à Ambérieu-en-Bugey (Ain), élevé par mes grands-parents paternels à la suite du décès de ma mère, en Lorraine alors annexée, de ce fait je n'ai pas de diplôme.
Ai débuté en 1905 à la Maison TOURNIEROUX & Cie, articles de quincaillerie et d'éclairage, alors 137 Faubourg Saint Denis, en qualité de magasinier facturier, jusqu'à mon service militaire (octobre 1907) accompli au 45ème Régiment d'Infanterie à Laon.
À la libération Monsieur Tourniéroux, qui avait transféré sa maison 24 rue des Petites Écuries, me demanda de revenir en qualité de facturier comptable, emploi que je remplis pendant trois ans. Atteint d'anémie, je demandai et obtins la représentation de la maison pour la petite banlieue...

Première précision utile : « élevé... en Lorraine alors annexée, de ce fait je n'ai pas de diplôme ». La formulation est vague, laissant entendre au moins que sa condition et son histoire ne lui ont pas permis d'atteindre un niveau d'études élevé – d'où un début de carrière au degré le plus bas de l'échelle. La deuxième précision est d'ordre médical : atteint d'anémie. Cette pathologie fut, semble-t-il, une des conséquences d'une longue série de blessures, de troubles, de complications qui se succédèrent pendant la guerre et ensuite. La guerre, nous allons la revivre avec lui par le menu dans les chapitres suivants, on peut donc faire l’économie de la suite du CV. Ensuite il finira de gravir en quelques années les échelons, juste reconnaissance de ses compétences :

(…) Après ma démobilisation, M. TOURNIEROUX me demanda, son associé l'ayant quitté, de remplir les fonctions de directeur, emploi que j'occupe encore actuellement, avec charge de
1°) surveiller et diriger le personnel,
2°) recevoir les commandes et en assurer l'exécution,
3°) recevoir les offres de services, faire les achats courants (les marchés étant établis par mes soins et signés par M. TOURNIEROUX),
4°) établir les prix de revient,
5°) rédiger les tarifs et préparer les albums,
6°) répondre aux demandes de prix, renseignements, etc... des clients, correspondre avec les fournisseurs,
7°) surveiller les ordres des représentants et voyageurs, établir leurs comptes de commissions.
J'ai sous mes ordres : trois employées à la comptabilité – deux sténo-dactylographes – une débitrice – trois magasiniers – un chauffeur-livreur. – Paris, le 10 octobre 1929.

Jolie liste de responsabilités. Ce sont aussi des tâches quotidiennes qui le rangent, quoique occupant les fonctions de directeur, du côté des exécutants. Ce n'est pas lui qui signe, c'est le patron, Monsieur Tourniéroux.

Note de bas de page 5 :

Pour plus d'informations sur les techniques d'éclairage, voir le bel ouvrage illustré de Philippe Deitz, Histoire des luminaires, histoire des hommes, Editions du Perron, 2009, 592 p. Les Becs intensifs Visseaux sont cités p. 421, comme fonctionnant à basse pression (brevet déposé).

Léonard Tourniéroux était originaire de Limoges, comme tous les autres Tourniéroux d’ailleurs, ce patronyme étant exclusivement représenté en Haute-Vienne sur la carte des noms de famille. Si l'en-tête de notre certificat annonce simplement L. Tourniéroux et Cie, représentants dépositaires de Fabriques françaises et étrangères, nous savons qu'il fut principalement, par la suite, le représentant exclusif des « Becs Visseaux à Paris. Les Becs Visseaux ne survécurent probablement guère à l'époque de Simon Jeanjean, si ce n'est au camping, où l'on peut encore de nos jours continuer d'utiliser des lampes à gaz à manchon de soie vissés sur des camping-gaz ou « bleuets ».5

Syndicaliste et militant associatif

Ces certificats et courriers professionnels ne nous disent rien de l’engagement syndical de Simon Jeanjean, tel n’est pas leur objet. Mais nous pouvons en juger par ailleurs. « Membre du Syndicat des employés » dès 1904, comme nous l’apprend son CV (2013), il fut lui-même « fondateur de la section de Ménilmontant en 1910 », en outre membre de la société de secours mutuel la Fraternité commerciale et industrielle à partir de 1905.

Le syndicalisme chrétien était né le 13 septembre 1887 avec la création du Syndicat des employés du commerce et de l'industrie, lequel devait déboucher en 1919 sur la fondation de la Confédération Française des Travailleurs Chrétiens (CFTC), regroupant 321 syndicats et se réclamant de l’encyclique Rerum Novarum. Ce qui en fait un syndicat non seulement chrétien mais essentiellement catholique, en attendant d’autres évolutions, bien plus tard, toujours suivies de près par un Simon Jeanjean aussi farouchement militant que solide à son poste de trésorier de la section locale CFTC (2 rue Henri Chevreau, Paris 20ème). La médaille de Chevalier du Mérite social en 1947 (mention concluant la partie action sociale du CV cité ci-avant) viendra couronner cet engagement – et restons-en pour l’instant aux années 1900. Une photo de groupe (1406), commémore la Promenade de la Section de Ménilmontant du Syndicat des employés à Montmorency, le dimanche 7 septembre 1913. Ces messieurs y posent debout en costume, avec leurs épouses assises au 1er rang.

Mais je me vois mal conclure ce chapitre sans évoquer un des lieux majeurs de la sociabilité « jeanjeantienne » : le Cercle catholique Saint Rémy de Ménilmontant, 4 rue d’Eupatoria, Paris 20ème.

Note de bas de page 6 :

C’est parfois de mauvais gré. Ainsi dans la carte (633) du 28 février 1919 : « Bertrand peut être tranquille ce n'est pas moi qui l'aiderai à remonter le cercle, j'ai d'autres chats à fouetter et pour les remerciements qu'on en a ! Je sors d'en prendre ! C'est tout de même curieux comme les gens deviennent aimables quand ils ont besoin de vous ! »

Note de bas de page 7 :

Plus précisément, il s’agit des noces d’or de M. et Mme Coulmeau, célébrées le 22 décembre précédent. Plusieurs documents des archives s’y rattachent : invitation (2617), menu (2618). Même graphie que dans le menu de la promenade à Chantilly (2615) cité ci-après.

Note de bas de page 8 :

Voir notamment Maurice Agulhon, Le cercle dans la France bourgeoise, 1810-1848. Étude d’une mutation de sociabilité, Paris, Armand Colin, 1977 (Cahiers des Annales n° 36).

Note de bas de page 9 :

Rien ne permet a priori d’attribuer ces jolis documents au Cercle St Rémy, si ce n'est la couleur et les caractères, issus de la même machine à écrire - appartenant sans doute au curé de la paroisse – que celle ayant servi à imprimer une autre invitation du Cercle, quelques années plus tard.

Adhérant de la première heure, il y restera fidèle jusqu’en 1938 comme nous l’apprend sa lettre de démission pour raison de santé (2214). Il demande alors à se retirer du Conseil d’administration, mais on a toutes raisons de penser qu’il en fut, bon gré mal gré6, la cheville ouvrière d’un bout à l’autre. C'était un cercle réservé aux messieurs, mais qui organisait des activités réunissant les familles, si l'on en croit au moins une photo des archives. Celle-ci (1405), malgré l’absence de toute mention écrite autre que celle de l’année – 1913 – est un souvenir du Cercle Saint Rémy7. Nous aimerions en savoir plus sur les activités et missions de ce cercle – appellation qui vous a un petit parfum très XIXe (siècle), réservé à un mode de sociabilité survivant outre-Manche, mais en voie de disparition au XXe de ce côté-ci. Une telle sociabilité bourgeoise8 connote une facette de l'habitus Jeanjean en concurrence avec d’autres marqueurs plus populaires. Plus tard, le Cercle sera rebaptisé « Association Saint Rémy de Ménilmontant ». Mais nous n’y sommes pas encore. Dans une carte postale envoyée à ses tantes en 1917 (417), Simon Jeanjean évoquera une excursion (à Abbeville) qu’il n’a pas oubliée, vous vous rappelez, la promenade du Cercle avec le père Marot pendant mon service. C’était en 1907, dix ans auparavant, ce qui va nous amener à la période du service militaire. De la même année datent les souvenirs d’une journée festive à Chantilly, le 30 juin 1907. Nous en avons le menu, déjeuner et dîner (2615). Le carton de table (2616) est au nom de « M. Jean ».9

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(2615)

Le service militaire

Note de bas de page 10 :

Date confirmée par le certificat de son employeur Tourniéroux (2003).

Note de bas de page 11 :

Dossier consulté aux Archives Départementales de la Seine.

Né en 1886, Jenjean est de la classe 1906, mention figurant en tête de son livret militaire (2601). Ledit livret constate qu'il est arrivé au corps le 8 octobre 190710. J’ai d’abord cru, pour ma part, qu'à cette date il était déjà sous les drapeaux, d’après une carte postale reçue de son ami Marcel Joubert à la caserne, datée du 26 septembre (484). Mais il faut croire que Joubert avait anticipé, et que Simon trouva sa carte en arrivant sur place, justement adressée à : Simon Jean, soldat au 45ème de ligne, 5ème Compagnie, Fort de Laniscourt par Mons en Laonnais – Aisne. Le dossier militaire du soldat Jeanjean Célestin, matricule 381711, fait état des dates et étapes significatives : Mis en route le 8 octobre 1907 – soldat de 3ème classe ledit jour – secrétaire de 3ème classe le 26 octobre 1908 – soldat de 2ème classe le 15 janvier 1909 – envoyé en congé le 26 septembre 1909… (à suivre, on le sait, en 14, mais on était loin de s’en douter en 1909).

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(1416)

Les archives Jeanjean contiennent par ailleurs une magnifique plaquette photographique (1416 à 1435), présentant fièrement le 45ème R.I. à Laon, à travers une vingtaine de photographies, chacun à sa place en jolies rangées autour de leurs chefs respectifs : le colonel, le Drapeau et sa garde ; les officiers, très chics, chacun posant à sa manière, arborant leurs décorations ; les sous-officiers idem, regards en toutes directions ; la musique, tous assis, les instruments en bandoulière ou posés sur les genoux ; les tambours et clairons (debout) ; la section hors-rang – où l'on peut reconnaître le porte-drapeau, son fort regard et sa belle moustache ; et enfin une photo pour chacune des douze compagnies, généralement au garde-à-vous et fixant l'objectif.

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(1428)

En bas de la page consacrée à la 5ème compagnie est précisée, de sa main, la position de Simon Jeanjean : 3ème rang, 2ème à droite. Il paraît grand, dépassant hors de sa rangée et plutôt mal aligné. Mais si l'on en croit ses certificats unanimes de bonne conduite, ce ne fut sûrement pas par mauvaise volonté. Il aurait plutôt l'air gêné, comme s'il avait du mal à adopter la position indiquée. C'était probablement un exécutant plein d'application. Le livret militaire le donne comme assez bon tireur (2601, page l) alors qu'il était myope comme une taupe (on apprend aussi qu'il ne sait pas nager). Je retiens cette image de lui, homme d'ordre, obéissant, mais difficilement intégrable, pas très à l'aise dans son corps, et se fondant difficilement dans la masse. Tous traits que sa fille, ma marraine, a hérités de lui.

(En 1907 a eu lieu aussi le mariage d'Édouard. Sur la photo 1439, vue au chapitre précédent, Simon, 21 ans, en uniforme marqué du numéro de son régiment, a l'air complètement décalé au milieu de tous ces gens.)

Quelques cartes postales de « l’album rouge » remontent à la période du service militaire. Celle du 23 août 1908 adressée à ses tantes (400), permet d’en revivre quelques instants. « Je suis donc forcé d'avoir encore recours à vous cette semaine, écrit-il entre autres choses, c'est fort embêtant car si il ne m'envoie rien pour les manœuvres je serai certainement gêné. » Ce « il » est évidemment son père, toujours aussi négligent.

Note de bas de page 12 :

Pièce n° 2610 : Ordre d’appel sous les drapeaux.

S’étant acquitté de ses obligations militaires – du moins pouvait-il le penser – d'octobre 1907 à septembre 1909, il fut appelé en outre pour 23 jours d'exercice en septembre 1911, toujours à Laon dans son corps de rattachement (261012). Ce qu'ayant fait notre homme allait pouvoir fonder une famille. Quand, où, dans quelles circonstances rencontra-t-il sa future femme, avant, ou après le service militaire ? Nous l’ignorons. Elle n'est pas sur la photo du mariage d'Édouard (non, ce n'est pas elle, cette brunette au visage poupin à côté de Simon soldat, avec cette coiffure surmontée d'un chignon en forme de chou à la crème). Et leurs filles n'en savaient pas grand-chose non plus, qui au demeurant ne conservaient que des notions plus ou moins brumeuses sinon nulles de cette préhistoire de leur roman familial.

Blanche et sa famille d’origine : Stef / Wattebault

En revanche, nous reconnaissons Blanche Jeanjean sur une photo-carte prise sur la plage de Trégastel en 1910 (1009). Cette photo représente un groupe féminin, une quinzaine de jeunes femmes posant sur la plage, les unes assises dans le sable devant les autres debout. Trois d'entre elles, dont Blanche que nous reconnaissons debout, la première à gauche, sont munies d'une épuisette. Il y a aussi deux sœurs à cornettes.

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Note de bas de page 13 :

Vattebault est l'orthographe la plus courante. Ce serait en fait une erreur. Si l'on en croit une réponse de la mairie du 20e arrondissement (2243) à une demande de Geneviève Jeanjean datée du 22 février 1965, la juste orthographe est bien "WATTEBAULT"...

Note de bas de page 14 :

Acte de naissance de Blanche (2037)

Sur Blanche, née Vattebault (ou plutôt Wattebault13) qui en avril 1912 deviendra Blanche Jeanjean pour la vie, nous savons assez peu de choses. Elle n'a pas conservé toutes les archives de son clan comme l'a fait son mari. On trouve dans l'album deux cartes de Nice (24, 29), datées de février 1910, adressées à Blanche Vattebault, l'une à son adresse, 3 rue des Lilas, Paris 19ème, l'autre à Maison Laurent Roux, 10 place des Victoires. On verra plus loin que Nice est un des lieux de référence de sa famille. Elle est parisienne, née le 2 avril 1888, d’Édouard Wattebault et de sa veuve Catherine-Blanche [née] Stef, demeurant rue de la Mare à Paris 20ème14. Première fille elle s’appela Blanche comme sa mère dont c’était le prénom usuel. Demeurant rue de la Mare, c’était donc une voisine, de la même paroisse que Simon où ils se rencontrèrent très probablement. Elle n'a jamais connu son père dont elle fut la fille posthume – point commun avec Simon qui lui n'avait jamais connu sa mère. Nous savons par les marraines que Blanche Jeanjean exerça le métier de secrétaire-dactylographe.

Les archives nous le confirment, où se trouvent trois certificats la concernant. Le premier, émanant de la société G. Leblanc – ancienne maison Laurent-Roux, fondée en 1858, 10-12 Place des Victoires – atteste que Mme Jeanjean y fut employée en qualité de « dactylographe » (sic, en capitales et entre guillemets) du 16 août 1910 au 31 octobre 1924 (2015). Cette période inclut les années de guerre, pendant lesquelles on verra Simon s'inquiéter sans cesse de savoir si elle a toujours son travail et si elle défend ses droits. Le second certificat nous apprend qu'elle travailla au service de la société Stendhal-Publicité – 11 rue Stendhal, Paris 20ème – en qualité d'employée et de dactylographe, du 23 novembre 1926 au 31 octobre 1938 (2016). Troisième employeur, la Croix Rouge Française se déclare également extrêmement satisfaite des services de Mme Jeanjean depuis le mois de mai 1944 jusqu'au 1er novembre 1946 (2017), date à laquelle elle l'avisera de son licenciement pour raisons économiques (2044).

Blanche et Simon, c’est un peu la cigale et la fourmi. Celui des deux qui a les pieds sur terre, qui fait attention, qui connaît le prix des choses, qui va à l’église au moins une fois par semaine, qui tient les comptes, qui écrit des lettres aux administrations, qui range les papiers, bref qui suit toutes les affaires et qui s’y investit, c'est Simon la fourmi, pas Blanche. Reflet prévisible de leur extraction sociale, elle plus bourgeoise que lui ? On en connaît d’autres exemples. C'est toujours lui, quelques années plus tard, qui à distance veillera à ce qu'elle pense à réclamer ci ou ça, qu'elle frappe à telle ou telle porte pour trouver ou garder du travail, pour remplir la marmite. On le verra constamment dans sa correspondance de guerre, il n'est pas administrateur et comptable pour rien. Elle, c'était la « dame aux chapeaux », nous ont dit ses filles, elle en portait toujours et aimait beaucoup en acheter (c'est même cela, racontent leurs filles, qui sur le tard lui fit prendre conscience d'une maladie dont elle était affectée, la maladie de Paget, dont un des symptômes est une déformation des os du crâne ; d’abord inexplicable et incongru, ce phénomène avait commencé par les faire rire). De fait, elle porte presque toujours des chapeaux sur les photos. Une coquetterie dont sans doute Simon se moquait gentiment, comme d'une trace de ses origines. D'où une représentation double de cette femme, dont les photographies, d'autre part, nous renvoient une image dépourvue de toute affectation : voir sa moue d'enfant ou d'adolescente boudeuse, notamment sur la photo la plus ancienne de la famille maternelle (1401), où Blanche figure à gauche auprès de sa mère et de ses frère et sœurs ; voir ses apparitions ensuite, sur la plage de Trégastel déjà évoquée, plus tard en mère de famille peu soucieuse de paraître. Moins reconnaissable assurément que lui, et moins photogénique.

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Note de bas de page 15 :

Chapitre 10 – La famille maternelle ; les photos, et suivants.

Note de bas de page 16 :

Du côté de chez Swann, in À la recherche du temps perdu, vol I, Gallimard (Bibliothèque de la Pléiade), page 19.

Note de bas de page 17 :

Ces deux photos ont été prises à Bangkok, dans les années 20. L’une montre Henri Laurent en bel uniforme blanc à médailles et casque colonial ; l’autre les deux époux en costumes clairs très élégants, lui debout auprès d’elle assise, dans un décor et des meubles évoquant l’Asie du Sud-Est.

L’observation de quelques photos de famille dont celle-ci (en bien mauvais état) commentée par Geneviève et Monique, constitue un moment de l’interview15. S’il faut en croire cette photo, Blanche aurait eu cinq frères et sœurs. Par recoupement avec d’autres photos et avec les dires des marraines, j’y vois de gauche à droite Blanche, sa mère, Jeanne, Marthe, Georges, Suzanne et Marguerite. Il y en a principalement deux, Jeanne et Marthe, que mes marraines, encore au soir de leur vie, ne portaient pas dans leur cœur. Elles les trouvaient snobs, hautaines. Elles se souvenaient d’un certain jour de leur adolescence où leur dédain les avait particulièrement mortifiées. Notre personnalité sociale est une création de la pensée des autres, écrit Marcel Proust16 ; il peut arriver que cette pensée s’exprime par les yeux de façon aussi blessante qu’une flèche aiguisée. Le pompon pour la tante « Jeâânne » (mimique hautaine de ma marraine, avec nez pincé). On retrouve Jeanne en photo à Nice et à Bangkok où elle accompagna son mari Henri Laurent (1408, 140917). Marthe, au milieu de la photo, laisse aux sœurs Jeanjean un souvenir semblable. « Sa fille, pharmacienne, n’a pas daigné continuer à nous voir ». Notons ce côté « Marie-Chantal » d’une partie au moins du clan Stef-Wattebault. On s’en gausse, chez les Jeanjean, avec l’assentiment de Blanche. Quand tu verras ta mère, n'oublie pas de lui “ présenter mes hommages ”, lui écrira Simon sur une carte postale en 1915 (74), avec des guillemets en forme de petit doigt en l’air. Blanchette Jeanjean n’était pas du genre à faire des chichis, ayant changé de nom et de tasse de thé.

Note de bas de page 18 :

L’orthographe de son nom était bien « Wattebault » (voir note précédente à ce sujet) est écorchée dans tous les documents. Mais l’intéressé n’était plus là s’en plaindre.

Note de bas de page 19 :

Photo-carte portant adressée à Monsieur et Mme Jeanjean, 46 villa Faucheur, Paris XXe, à l’occasion des vœux de Nouvel an, et signée Juliette. Mention manuscrite ajoutée par Simon : Vattebault Bazemont.

Au fait, j’ai dit plus haut que la mère de Blanche avait deux noms, Stef et Wattebault. C’est du moins ainsi que le disaient Geneviève et Monique, disant « Streif ou Stef », et ne sachant pas bien d’où venait cet autre nom. On ne leur jettera pas la pierre, je n’y comprends rien moi-même. D’après son acte de naissance (2037), Blanche – née le 2 avril 1888 – est « fille posthume de Édouard Vattebault18 et de Catherine Blanche Stef, sa veuve ». Pourquoi – comment – ce nom de Stef se serait-il transmis à ses filles, ou à certaines d’entre elles ? Je sais notamment que Marguerite s’appelait Stef de son nom de jeune fille (1440). Il m’est arrivé de supposer que certaines des tantes de la photo fussent les demi-sœurs de Blanche Jeanjean, et que cela pourrait éclairer quelques différences entre leurs personnalités. Au demeurant, la famille maternelle était assez diverse. Nous croiserons, au fil de l’épisode suivant de bien braves agriculteurs, les « cousins de Bazemont », fermiers en Seine-et-Oise (aujourd’hui Yvelines), au sujet desquels Simon ne tarira pas d’éloges (101619).

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Note de bas de page 20 :

Usage caractéristique du « à », glissant du complément d’objet indirect ou secon au complément de nom en place du « de ».

Ensuite nous vient en main une photo du mariage de Marguerite (1440), sans date mais qui doit avoir suivi de près celui de Blanche et Simon, soit entre 1912 et 1914. Simon y a ajouté la mention manuscrite « Mariage de Marguerite Stef (maman à Geo) ». Geo Chardonnay était un cousin proche des Jeanjean. Il y a des courriers très affectueux de sa main, il est de la même génération que les filles, ils ont dû passer souvent des vacances ensemble. La mention « Maman à Geo » sous-entend cette familiarité. « Maman à Geo »… J’y vois aussi le côté peuple, décidément, de Simon Jeanjean20. On retrouvera, avec plaisir, ce style oral tout simple sous sa plume, dans les cartes postales de la période de guerre (bien différent de la prose soignée dont il use dans les courriers administratifs, syndicaux et politiques écrits à la machine).

Quant à l’état de la photo déchirée, voici ce qu’elles en disent : « C’est la femme de notre cousin (sans doute le cousin Georges, le seul homme de la photo Stef-Wattebault) qui nous a envoyé cette photo-là quand notre cousin est mort... La cave a été inondée, donc la photo a été très abîmée. Elle nous l’a quand même envoyée, et ça, je lui en suis reconnaissante ». Une exception à l’animosité anti-Stef des filles Jeanjean.

Leur tante Suzanne – la plus jeune, en bas à droite de la photo – est celle qui leur est la plus sympathique. Suzanne, épouse Guillot, eut pour fille Nicole, épouse Bauer, qui sera la mère de Stéphane, de Muriel et de Magali – Magali que nous connaissons bien, qui est donc la petite-nièce de Monique et Geneviève. Je dois m’y arrêter, puisque cette branche annexe de la famille Jeanjean est la seule que je connaisse directement. Nous avons noué amitié depuis bien longtemps, ma femme Joss et moi, avec Magali et Jean-Pierre. Leurs deux fils avaient à peu près le même âge que les deux nôtres. Ils ont joué ensemble à Lardy, chez Geneviève et Monique où nous nous sommes connus. Magali vouait une très grande affection aux « deux mamies », juste retour de la tendresse attentive qu'elle a toujours reçue d'elles. C’est toujours avec plaisir qu’ils venaient à Lardy, les Fourcaud, ou que les mamies leur rendaient visite à Cahors, jadis. Nous nous sommes occupés d'elles ensemble, dans leurs dernières années. Et c’est avec une grande tristesse que Magali les a vues décliner de plus en plus et puis s’éteindre.

J’aurais aimé, arrivé à ce point de mon récit, pouvoir sortir de mon chapeau un arbre généalogique – fût-il lacunaire – des Stef-Wattebault, c’est-à-dire de l’ascendance maternelle de mes marraines, comme je l’ai fait des Jeanjean. Je ne m’y risquerai pas. Les tantes étant d’ailleurs fréquemment mariées, ces noms déjà différents de Stef et V-Wattebault se changent en d’autres, Laurent, Guillot, Chardonnay etc. On s’en tiendra donc aux notions floues transmises par mes informatrices, oublieuses, par exemple – du moins ne m’ont-elles pas dit se souvenir – du fait que leur père n’avait jamais connu sa mère, ni leur mère son père.

Les sœurs de Saint-Vincent de Paul

Revenons à Trégastel. On est là tout près d'un des berceaux identifiés de la famille de Blanche. Sur la photo-carte (1009) prise sur la plage en 1910, nous avons vu deux sœurs de Saint-Vincent de Paul, alias Filles de la Charité, reconnaissables de loin à leur incroyable coiffe découpée dans un rectangle de coton amidonné. Les sœurs de SVP (abrégeons) ne sont jamais loin dans la vie des Jeanjean. Depuis Metz dont nous savons que les tantes les fréquentaient régulièrement avant d'émigrer à Paris où elles les fréquentèrent pareillement, en passant par celles-ci photographiées sur la plage en compagnie de Blanche future épouse Jeanjean, on n'a pas fini de les voir voleter, ces cornettes ailées, autour des Jeanjean. Elles semblent chez elles sur cette plage et sur la photo-carte, bien qu’engoncées dans leur lourd vêtement, grande robe noire, cornette au vent et plastron blanc, tranchant sur les autres jeunes femmes dont la tenue, même à cette époque qui nous semble lointaine où l'on protégeait sa peau constamment du soleil et des regards, ne brime en rien leur féminité. Blanche est une des moins coquettes mais pas la moins jolie. Et l'accoutrement des religieuses décidément fait tache au milieu d'elles, proclamant leur retrait du « monde » – et ainsi font d’autres femmes aujourd’hui pareillement par religion. Du moins les visages des sœurs, ombragés et clôturés par la cornette comme par des œillères, ne sont-ils pas entièrement voilés. D'autres photos plus tardives, en noir et blanc puis en couleur, montreront de ces femmes en noir rendant brièvement visite à leurs familles, dans les albums de la famille Jeanjean. On voit ainsi une troupe de vieilles sœurs autour de Denise déjà âgée, s'égayant sur la terrasse de la maison de Lardy.

Trégastel aussi demeurera un lieu de référence pour la famille. Il se trouvera parmi les dernières archives Jeanjean une chemise intitulée Décès Mme Jeanjean où l'on peut compter pas moins de 54 billets ou lettres de condoléances (dont une de mon père) reçus par Simon Jeanjean pour la mort de Blanche, survenue en 1962 lors de vacances dans les Landes. Une de ces lettres, signée de Sœur Antoinette, de l'ordre des Filles de la Charité, commence par ces mots : Monsieur, – En rentrant de Trégastel, je trouve le faire-part du retour à Dieu de votre chère épouse.... Il faut savoir que la commune de Trégastel – une des plus petites des Côtes d'Armor – héberge, et hébergeait déjà en 1962, une importante institution religieuse bien connue de la famille, assez pour que le nom de Trégastel implicitement suffise à la désigner. Il s’agissait du Castel Sainte Anne, fondé en 1882 par les sœurs des Saints Cœurs de Jésus et de Marie, rejointes en 1899 par les sœurs de SVP à la Fondation Foucher de Careil (du nom de la fondatrice, la comtesse Amélie Foucher de Careil). Cette présence ecclésiastique persiste jusqu’à nos jours, où il n’est pas rare de croiser encore quelques soutanes et cornettes modernisées et parfois exotiques, telles les sœurs coréennes du Bon sauveur. Une plage de Trégastel porte d’ailleurs encore l’appellation de Grève des curés.

Note de bas de page 21 :

Manuel des Enfants de Marie immaculée, à l’usage des réunions externes dirigées par les Filles de la Charité, Paris, Dumoulin & Poussielgue, 1904, 669 pages.

La familiarité avec cet ordre a été sans nul doute un des atomes crochus existant entre les futurs époux. Blanche, en novembre 1904, a été reçue dans l’Association des Enfants de Marie Immaculée, canoniquement érigée chez les Filles de la Charité de Notre-Dame de la Croix de Ménilmontant, ainsi qu’en atteste un formulaire signé de la directrice, Sœur Madeleine, et du Directeur et Curé de la paroisse l’Abbé Frisch, figurant en page d’avant-titre du Manuel des Enfants de Marie immaculée21 à l’usage des réunions externes dirigées par les Filles de la Charité (3668). C’est assez dire à quel point les sœurs de SVP avaient leur place attitrée, d’une certaine manière prédestinée de longue date, dans la famille Wattebault-Jeanjean (« dans leur ADN », comme on a coutume de dire à présent), en attendant de s’y imposer grièvement plus tard.

Et puis Blanche et Simon se marièrent, et ils voulurent beaucoup d’enfants. On a cru pouvoir dire que Simon n'était pas « né coiffé », ou l’était a priori moins que sa femme. Le soin porté aux apparences – besoin de reconnaissance, certes, mais aussi, plus simplement, de plaisir et de lien social – se manifeste dans l'organisation de toutes sortes de fêtes où l'on mit les petits plats dans les grands, dans la participation à des festivités où l'on se faisait prendre en photo avec costume-cravate et faux-col ou robe magnifique, seul, à deux, en groupe, dans des banquets, devant des églises, ou plus court vêtu en vacances, et dont on conservait le souvenir et les images, tant mieux pour nous. À commencer par celles du mariage, le 13 avril 1912.

Le mariage

Note de bas de page 22 :

De Guillaume Apollinaire

Note de bas de page 23 :

De Igor Stravinsky

Note de bas de page 24 :

De Blaise Cendrars

Note de bas de page 25 :

Roue de bicyclette, premier ready-made de Marcel Duchamp.

Note de bas de page 26 :

Carré noir sur fond blanc

Note de bas de page 27 :

Première parution de Du côté de chez Swann, à compte d'auteur chez Grasset.

Arrêtons-nous aux deux années 1912 et 1913. Dernière étape avant le grand saut inimaginable de 14-18. Pour les Jeanjean, 1912 c'est l’année du mariage, 1913 celle de la naissance de Marie-Denise, dite Denise ; et 14 comme pour tout le monde, le souvenir d'une allégresse d'abord, qui était une erreur, et on y pense toujours à cette erreur-horreur dès qu'on parle de ces années-là. Et pourtant quelle floraison ne fut-ce pas, ces années-là ? 1913, jalon de la modernité : Alcools22, le Sacre du Printemps23, la Prose du Transsibérien24, Duchamp25, Malevitch26, La Recherche du temps perdu27... À nos yeux oui, mais pour Jeanjean ? le cadet de ses soucis ?

Commençons par le mariage. Les archives nous permettent d’en revivre les moments par le menu – c’est le cas de le dire. L'organisation de la cérémonie a été déléguée à une entreprise spécialisée en « Cérémonies nuptiales », la Maison Albert Riondel, 14 boulevard Montmartre. Entreprise fort bien rodée si l'on en croit le courrier suivant (2274), entièrement imprimé à l'exception des mentions particulières laissées à remplir (soulignées). Daté du 9 avril 1912, il est adressé à Monsieur Jeanjean, Maison Tourniéroux, 24 rue des Petites Écuries (peut-être l’employeur participe-t-il aux frais) :

J'ai l'honneur de vous rappeler que vous devez me faire parvenir au plus tard le mercredi 10 avril les documents ci-après qui me sont nécessaires pour l'organisation de votre cérémonie :
1°) la liste des personnes à faire prendre par les voitures, en ayant soin de mentionner les noms et adresses et nombre d'invités à chaque domicile. Ils seront tous prévenus par nos soins de l'heure à laquelle la voiture sera mise à leur disposition et des différentes évolutions de chaque landau.
2°) l'ordre du cortège d'après les préséances et selon l'entrée à l'église.
3°) le plan de la table qui établira d'une façon définitive le nombre de vos convives.
Recevez, Monsieur, mes salutations empressées
Le Directeur (signé par tampon : Albert Riondel)
Réunion du cortège : 3 rue des lilas – Mairie : sera faiteéglise : N.D. de la Croix Ménilmontant – Déjeuner ou Lunch : Porte Dorée – Dîner : ........ – Soirée : ....... – Retour du Coupé : ..........

Pas de lunch, pas de dîner, pas de soirée, pas de coupé ; les lignes sont biffées. Ce n'est pas un mariage de première classe. Mais les invités sont amenés en landau, le protocole est bien réglé. La réunion du cortège a lieu 3 rue des Lilas, chez Vattebault. On verra plus loin le menu. Il est question ici du mariage à l'église. Celui en mairie a déjà eu lieu. Le service – lettres simples typo, enveloppes papier vélin, 1 berline de 9 à 5h (17h), 3 landaus de 9 à 2h (14h), 16 déjeuners dînatoires à la Porte Dorée – est facturé (2022) au tarif forfaitaire de 300,00F, tout compris (pourboire des cochers, maître d’hôtel, groom), payable pour 1/2 chez M. Jeanjean, Villa Faucheur, 1/2 chez Mad. Vattebault (sic), 3 rue des Lilas, le lundi 15 avril 1912. Signé : Riondel.

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La facture porte sur 16 déjeuners dînatoires, mais sur la photo (1404) nous ne voyons que 15 personnes : au premier rang (assis) de g. à dr. : Lucie et Célestine Jeanjean, Mme Wattebault mère de la mariée, les mariés Simon et Blanche, Lucien Jeanjean père du marié, et Pauline Jeanjean (les trois tantes sont là). Au second rang (debout) de g. à dr. : un jeune homme qui, d'après les autres photos que nous en avons (mais sans que nous comprenions mieux son degré de parenté avec les Jeanjean), pourrait être Victor Lemoine ; les autres sont les sœurs de Blanche et leurs conjoints : Suzanne, Henri et Jeanne Laurent, X (peut-être le mari de...) Marthe ; et enfin les époux Chardonnay, Marguerite et son mari (futurs parents de Geo, déjà mariés ou encore seulement fiancés). L'invité absent de la photo pouvait être Édouard, le frère de Simon, ou Julie Moyet-Jeanjean. Cette photo, ainsi que l'autre représentant les deux jeunes mariés (1403), a été prise dans les salons de la Porte Dorée par J. Mulot (« Photographe de la Bastille », Boulevard Beaumarchais à Paris depuis 1898).

Est aussi facturée la location de vaisselle, par Le Grand Dépôt E. Bourgeois, Porcelaines et cristaux, 21 rue Drouot (2275), la plus grande maison du monde d’après l’en-tête orné. Soit : 48 assiettes plates, 12 assiettes creuses, 1 soupière, 1 saladier, 1 saucière, 1 légumier, 4 raviers, 4 plats ronds, et 2 plats ovales, qui n'étaient donc pas pris en charge par Riondel.

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Autre facture : celle de l'église N.D. De la Croix de Ménilmontant, s'élevant à Cinquante-trois francs. La cérémonie avait eu lieu ce même jour, 13 avril 1912, à midi.

Le menu, conservé lui aussi (2614) était décliné comme suit :

Note de bas de page 28 :

Mot effacé illisible.

Mariage de M. Jeanjean & Melle Vattebault :
Potages : Printanier – Perles de roche – Hors-d’œuvre variés – Relevés : Bouchées à la Reine – Truites saumonées sauce mousseline – Entrées : Filet de Bœuf à la Broche - (… ?28) côte d'azur – Légumes : Petits pois Bonne Femme – Asperges en branches – Rôti : Dindonneaux – Chapons de la Bresse – Salades – Entremets : Bombe Réjane – Gâteau breton – Desserts : Fruits – Biscuits – Petits Fours – Vins : Madère – Bordeaux-Médoc – Champagne – Café-Liqueurs

Dernière trace enfin de cette réjouissance : la traditionnelle plaisanterie du faire-part de « deuil », bordé de noir (2613) :

De Profundis ! ! !
Les familles St Rémy, Bertrand, Catet, Coulmeau père, Coulmeau fils, Guérin, Lefèvre, Billon, Lemoine, Denizot, Lebouc ont la douleur de vous faire part de la perte douloureuse qu'elles viennent d'éprouver en la personne de
Mademoiselle Vie de Garçon, née Jeanjean
survenue ce jour dans sa 26ème année, dans la paix du ménage.
La cérémonie a eu lieu dans la plus grande intimité à Paris, le 11 avril 1912, en la mairie du 20ème arrt ; l'enterrement à Fity s/ Champagne, par Ménilmontant, Seine.

Le mariage civil a donc été célébré deux jours avant la cérémonie religieuse. Les invités n'étaient pas forcément les mêmes. Des noms cités ici, nous reconnaissons celui des cousins Lemoine-Poulain et celui de Coulmeau, père et fils, du Cercle paroissial Saint-Rémy de Ménilmontant. On y trouve peut-être aussi ceux des collègues de travail, dont celui de Lebouc qui apparaîtra plusieurs fois dans la correspondance de guerre, de même que ceux de Billon et de Lefèvre.

Note de bas de page 29 :

L’invitation à cette fête, tapée visiblement avec la même encre et la même machine que les jolis cartons afférant à la sortie à Chantilly en juin 1907 – voir ci-avant – a permis d’identifier ces derniers sans trop d’hésitation.

(NB. Les noces d’or de M. Coulmeau père, le 22 décembre précédent, avaient donné lieu à une belle invitation. Objet : Noces d’or de M. Coulmeau… Madame n’était pas mentionnée. Elle était forcément là, Madame, comme en témoigne une belle photo de groupe datée de cette année-là, de gens tirés à quatre épingles dont les époux Jeanjean (1405). Cette photo, qui porte la date de 1913 ajoutée au crayon sans autre commentaire, peut difficilement ne pas être celle des noces d’or de M. et Mme Coulmeau, doyens et héros de la fête, placés au centre, et ce serait donc plutôt décembre 191229)

Enfin figuraient dans la même chemise, intitulée Mariage Simon et Blanche Jeanjean de l’écriture de Simon, deux lettres reçues d'Ambérieu-en-Bugey, signées Rousseau (Émile, oncle et parrain de Simon). L'une datée du 8 avril (2276-2277), commence par ces mots : Simon, Malgré notre silence persistant nous parlons souvent de toi. Tous nos vœux t'accompagnent, etc. La suite est chaleureuse. L'autre lettre, datée du 22 mai (2278-2279), et adressée à Simon et chère nièce, est pour dire qu'il attend les photographies du mariage avec impatience. Il donne d'ailleurs quelques nouvelles, notamment d'Ambérieu, qui a changé et « que tu ne reconnaîtrais pas »– ce qui laisse à penser que Simon y était retourné depuis sa petite enfance. Ainsi par exemple, « nous avons l'aviation civile et militaire dans la plaine (...) à 20 mn d'Ambérieu. Nos rues sont dénommées et numérotées », etc. C’est la seule trace qui nous reste de relations suivies de Simon Jeanjean avec sa famille maternelle.

(Se trouve aussi dans ces archives, toute proche de cette même chemise, une enveloppe de photos consacrée aux Noces d'or, cinquante ans plus tard, c'est-à-dire en 1962, de Blanche et Simon Jeanjean. Les maîtres de cérémonie sont Monique et Geneviève, jeunes femmes pimpantes, tout sourire au milieu des nombreux amis, des enfants des amis, dont moi-même, pour fêter leurs vieux parents qui n'y voient plus guère, assis la plupart du temps ou marchant en s'aidant d'une canne. Raccourci saisissant.)

Nous sommes encore en 1912. Belle époque, profitons-en. Au début de l'année suivante, le 20 janvier 1913, Blanche met au monde la petite merveille première née, Marie-Denise. Ils s'installent rue des Envierges, Villa Faucheur. Une nouvelle vie commence… Lune de miel ?

Autres versions

Pour citer ce document

Péchenart, J. (2022). Chapitre III – Paris Vingtième, l’âge d’homme. Dans Les petits cailloux de Simon Jeanjean : Souvenirs et archives. Université de Limoges. https://doi.org/10.25965/ebooks.161

Péchenart, Jean. « Chapitre III – Paris Vingtième, l’âge d’homme ». Les petits cailloux de Simon Jeanjean : Souvenirs et archives. Limoges : Université de Limoges, 2022. Web. https://doi.org/10.25965/ebooks.161

Péchenart Jean, « Chapitre III – Paris Vingtième, l’âge d’homme » dans Les petits cailloux de Simon Jeanjean : Souvenirs et archives, Limoges, Université de Limoges, 2022, p. 36-53

Auteur

Jean Péchenart
Conservateur de bibliothèque, désormais à la retraite, titulaire d’une licence de Lettres classiques, d’une licence de Sciences de Éducation, et d’un DEA de Sciences de l’Information et de la Communication, Jean Péchenart a été successivement enseignant de lettres classiques en Moselle, Sarthe, Loiret et dans le Puy-de-Dôme ; puis comédien ; bibliothécaire-adjoint et formateur ; enfin conservateur au Service Commun de la Documentation de l’Université de Limoges (de 1993 à 2011), section Santé puis Lettres, et coordinateur pédagogique de la Licence professionnelle Métiers des Bibliothèques et de la Documentation. Plus récemment impliqué au Centre Régional du Livre en Limousin, enfin à l’Association des Amis de Robert Margerit. Auteur par ailleurs de quelques textes et articles, et de deux livres Tête-Bêche et Bon Voyage les Fechner, publiés aux éditions Solilang, collection Salves d’Espoir.
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