Énonciation et forme du sens  : identité lexicale et variations sémantiques des mots manger, aimer et raison

Khadiyatoulah Fall
et Doumbé Bétoté Akwa

Les mots sont-ils dotés d'un contenu sémantique stable correspondant à ce qu'on appelle communément « sens premier » ou « sens stable » dont toutes les valeurs subséquentes peuvent être dérivées « par extension » ? Le mot est-il a priori polysémique et recèle-t-il une pluralité de sens que l'environnement n'a plus qu'à filtrer ou à activer ?
S'inscrivant dans une perspective énonciative et constructiviste, et à partir de l'étude des unités lexicales manger, aimer et raison dont ils proposent une caractérisation en termes de forme schématique, les auteurs répondent à ces questions par des propositions théoriques et méthodologiques qui permettraient de mieux appréhender l'identité d'un mot. Après avoir montré les lacunes des propositions des dictionnaires ainsi que les limites de la distinction sens propre / sens figuré, de celles de la distinction sens concret / sens abstrait, de celles du recours à l'étymologie et de celles de la notion de polysémie dans les tentatives de définition du mot, les auteurs concluent qu'il y a une insuffisance conceptuelle à poser l'identité d'un mot à partir d'un sens de base ou comme catalogage de valeurs. Les auteurs optent pour une caractérisation du mot par ses propriétés opératoires, caractérisation qui passe par un travail de désémantisation qui amène à faire la part, pour chaque mot, entre ce qui lui revient en propre et ce qui provient de son environnement linguistique.

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