Motivation des personnes victimes d’un accident vasculaire cérébral dans l’auto-rééducation à domicile par le jeu vidéo Motivation of stroke victims in self-rehabilitation at home through video games

Axelle GELINEAU ,
Hugo LANDAIS ,
Anaick PERROCHON ,
Iouri BERNACHE-ASSOLLANT 
et Stéphane MANDIGOUT 

https://doi.org/10.25965/trahs.3926

Cet article tend à réfléchir sur les facteurs motivationnels liés à l’usage de jeux vidéos dans l’auto-rééducation des membres supérieurs des patients victimes d’un Accident Vasculaire Cérébral à domicile. L’enjeu est notamment de procurer aux utilisateurs un outil utile pour leur rééducation tout en maintenant leur motivation. A partir de la littérature, nous avons recensé divers facteurs se rapportant à la dimension de la motivation. Il ressort de ces lectures que la compréhension explicite des personnes est nécessaire pour augmenter l’intérêt des usagers pour des programmes vidéo ludiques. L’expérience utilisateur est au cœur des stratégies de développement des futurs dispositifs, et il est nécessaire que cette démarche se poursuive dans le domaine de la rééducation neurologique à domicile.

This article aims to reflect on the motivational factors related to the usage of video games in the self-rehabilitation of upper limbs of stroke patients at home. The stake is especially to provide users with a useful tool for their rehabilitation while maintaining their motivation. From the literature, we identified various factors relating to the dimension of motivation. From these readings, it appears that an explicit understanding of people is necessary to increase the interest of the user in playful video programs. User experience is at the heart of development strategies for future devices, and it is necessary that this approach be continued in the field of neurological rehabilitation.

Sommaire
Texte intégral

« Home ! Sweet Home ! » (litt. « Foyer ! Doux Foyer ! »)
Sir Henry Rowley Bishop, compositeur anglais

Introduction

Note de bas de page 1 :

https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/accident-vasculaire-cerebral-avc

L’Accident Vasculaire Cérébral (AVC) est l'une des principales causes de mortalité dans le monde et la première cause de handicap neurologique acquis de l'adulte. On recense approximativement plus de 140 000 nouveaux cas par an en France, soit 1 AVC toutes les 4 minutes (INSERM1). C’est un véritable fléau de santé publique pouvant être lourd de conséquences sur l’autonomie de la personne. Les séquelles suite à l’AVC peuvent entraîner des limitations dans les activités de vie quotidienne, provoquant une restriction de participation sociale et pouvant impacter la qualité de vie des personnes (Gadidi et al., 2011 ; Mayo et al., 2002).

Les déficiences motrices des membres supérieurs sont fréquentes après un AVC. Elles peuvent être gravement invalidantes et persister au stade chronique (Langhorne et al., 2009). Les problèmes psychologiques tels que la dépression, l'anxiété, l’émotivité et le syndrome de stress post-traumatique sont des complications courantes après un AVC et peuvent avoir un impact sur tous les aspects de la récupération (Gurr & Muelenz, 2011). Cela peut amener les personnes à manquer de motivation pour participer aux activités de la vie quotidienne ou à la réadaptation (Gurr & Muelenz, 2011 ; Cheng et al., 2015).

Les personnes âgées sont les plus touchées par l’AVC. En effet, 75 % des AVC concernent une personne de 65 ans et plus (Bohic, 2012), ce qui accélère la diminution d’activité et la perte d’autonomie. Au-delà de la perte d’activité due à l’AVC, la démotivation est un problème majeur chez la personne âgée (Hazif-Thomas & Thomas, 2007). La revue systématique de Tang et al. (2020) suggère que la satisfaction des besoins psychologiques fondamentaux et la motivation sont associées aux indicateurs de bien-être. Elles sont positivement associées si les indicateurs de bien-être sont positifs (comme par exemple le sens de la vie, la satisfaction dans la vie, l’affect positif, l’estime de soi, etc.) et négativement associés si les indicateurs sont négatifs (comme la dépression, l’apathie, etc.) (Tang et al., 2020). Il est important de comprendre les facteurs qui contribuent au bien-être des personnes âgées. La prise en compte de la dimension motivationnelle est alors indispensable, et notamment sur le lieu de vie.

Note de bas de page 2 :

https://solidarites-sante.gouv.fr/affaires-sociales/autonomie/consultation-place-des-personnes-agees/concertation-grand-age-et-autonomie/

Une priorité au maintien à domicile est affirmée dans le rapport de la concertation Grand âge et autonomie, du 28 mars 20192. Les Français font valoir une nette préférence pour le maintien à domicile, notamment en lien avec la préservation d’une sphère d’autonomie et de liberté, voire dans le choix des conditions de sa vie. Malgré le souhait d’une très grande majorité de Français, rester chez soi peut s’avérer ne pas toujours être la solution optimale. D’autant plus quand s’installe une perte d’autonomie physique et surtout cognitive. L’accompagnement de la personne se révèle alors nécessaire.

L’auto-rééducation à domicile peut, sous certaines conditions, être proposée pour assurer la continuité des soins. L’auto-rééducation, c’est faire par soi-même, les exercices de rééducation qui ont été préalablement prescrits et expliqués par son thérapeute. L’auto-rééducation est un travail complémentaire à la rééducation dite « traditionnelle », réalisée lors de l’hospitalisation ou en cabinet libéral. Elle a pour objectif de poursuivre le travail en autonomie à domicile, sans supervision professionnelle. La poursuite de la rééducation au domicile peut favoriser le maintien des acquis et limiter la perte d’autonomie de ces personnes.

A contrario, les acquis obtenus lors de la rééducation/réadaptation en centre ou en institution peuvent ne pas être exploités lors du retour à domicile. On peut craindre notamment un manque de motivation de l’usager à faire sa rééducation par lui-même (Jurkiewicz et al., 2011). Lorsque les exercices sont prescrits à faire à la maison, l'adhésion est souvent faible car les exercices peuvent être considérés fastidieux et inintéressants ; il est alors difficile de maintenir la motivation du patient (Miller et al., 2017). L'adhésion aux prescriptions d'exercices à domicile non supervisés est faible chez les personnes victimes d'un AVC (Jurkiewicz et al., 2011 ; Miller et al., 2017). La motivation est citée comme un obstacle important.

Maintenir la motivation des patients dans leur prise en charge rééducative est une tâche importante, mais difficile à atteindre par les professionnels de santé (Maclean & Pound, 2000). Bien que la motivation soit loin d’être l’unique déterminant dans l’adoption et le maintien d’une activité, nous devons considérer avec attention cette dimension afin de trouver des solutions motivantes et pérennes pour favoriser l’auto-rééducation des personnes en autonomie à domicile.

Aujourd’hui, la conception de nouveaux dispositifs se veut centrée vers les utilisateurs. En effet, la norme ISO 9241-110 présente les sept principes d’interaction, ayant été identifiés comme importants pour la conception et l’évaluation des systèmes interactifs. Un de ces principes est l’engagement de l’utilisateur, et plus spécifiquement centré sur la motivation de ce dernier. Il est alors stipulé que « le système interactif présente les fonctions et informations de manière engageante et motivante en favorisant une interaction continue avec le système ». Seulement, il n’est pas toujours évident de savoir ce qui motive véritablement les personnes à utiliser tel ou tel système, et de savoir comment faire pour les motiver, le cas échéant.

Note de bas de page 3 :

https://eduscol.education.fr/numerique/dossier/apprendre/jeuxserieux/notion

A l’ère du numérique, la question de l’usage de nouveaux dispositifs à vocation thérapeutique de type « Jeux Sérieux » (« serious game3 ») se pose pour motiver ces personnes dans leur auto-rééducation sur le lieu de vie (Perrochon et al., 2019). Ce sont des jeux vidéo ludiques avec des objectifs sérieux. Les jeux thérapeutiques font partie des nouvelles interventions non médicamenteuses que l’on peut proposer aux patients, par des entraînements physiques et cognitifs dans des environnements ludiques. Les thérapies basées sur la réalité virtuelle sont de plus en plus utilisées depuis quelques années pour augmenter les habilités motrices et les capacités cognitives chez les personnes avec des restrictions de participation et d’activité comme à la suite d’un AVC (Laver et al., 2017). Par ailleurs, ces nouvelles thérapies privilégient de nouveaux environnements ludiques et stimulants. Ce contexte stimulant a été identifié comme un élément bénéfique au maintien de la motivation des patients post-AVC (Maclean et al., 2002). Comprendre la motivation des personnes à utiliser les serious game peut faciliter le processus de mise en œuvre.

Dans le cadre de cet article, nous souhaitons apporter des éléments théoriques sur le concept de motivation en lien avec la pratique d’une activité physique et analyser les différents outils utilisés actuellement pour évaluer la motivation des patients victimes d’un AVC dans leur rééducation des membres supérieurs basé sur le jeu vidéo à domicile. Également, nous tenterons de montrer comment cette auto-rééducation par le jeu vidéo peut influencer la motivation des patients.

Concept de la motivation

Bien que de nombreuses définitions aient été proposées, la notion de motivation peut être étayée selon la théorie de l’auto-détermination (Self-determination theory) (Deci & Ryan, 1985). Cette théorie reste à l’heure actuelle le modèle le plus heuristique pour comprendre le concept de motivation. Selon ces auteurs, il s’agit d’un continuum allant du concept de l’amotivation (absence de motivation) à la motivation intrinsèque (qui vient de l’individu lui-même), en passant par la motivation extrinsèque (produite par des stimuli extérieurs à l’individu). La motivation extrinsèque réfère à l’engagement dans une activité dans un but non inhérent à l’activité physique, soit en vue d’obtenir quelque chose de plaisant, soit afin d’éviter quelque chose de déplaisant une fois celle-ci terminée (Deci & Ryan, 1985). La motivation intrinsèque renvoie à la pratique volontaire d’une activité pour le plaisir et la satisfaction que l’on en retire.

Nous supposons que l’utilisation des jeux sérieux chez les patients pourrait être un bon moyen d’améliorer leur motivation intrinsèque, motivation qui semble être la plus importante à solliciter pour améliorer l’adhésion à des programmes d’auto-rééducation. Trois besoins sont ainsi primordiaux pour donner lieu à une tâche épanouissante et par là même intrinsèquement motivante : la compétence (competency) ; l’autonomie (autonomy) ; les relations sociales (relatedness).

Facteurs motivationnels et auto-rééducation par le jeu sérieux

Poltawski et al. (2015) ont identifié certains facteurs qui peuvent influencer la motivation intrinsèque à faire de l'exercice après un AVC et qui renvoient chacun aux trois besoins psychologiques fondamentaux évoqués précédemment. Il existe dans la littérature un large consensus sur le fait qu’une motivation dite intrinsèque (donc la plus autodéterminée car pour simplifier on pratique pour le plaisir de l’activité en tant que telle) est la plus bénéfique sur de nombreuses variables comportementales, cognitives, émotionnelles (augmentation des performances, diminution du stress, burnout, émotions positives) et ceci dans de nombreux domaines (sport, travail, éducation…). Donc l’objectif de ces « jeux sérieux » serait d’essayer de stimuler cette motivation intrinsèque, notamment en activant les leviers dits des trois « besoins psychologiques fondamentaux ».

Dans notre cas particulier d’auto-rééducation à domicile, de multiples facteurs personnels et environnementaux sont impliqués dans le manque de motivation des patients, dont plusieurs pourraient être pris en compte dans la planification des programmes de rééducation. Premièrement, la motivation à faire de l'exercice après un AVC qui pourrait être particulièrement associée au sentiment de bien-être psychologique qu'elle favorise. Deuxièmement, une approche de l'exercice physique « dé-médicalisée » et basée sur le mode de vie serait particulièrement attrayante pour les survivants d'un AVC à long terme. Enfin, il faut garder à l’esprit que certaines personnes préfèrent participer à des ateliers collectifs car ils ressentent un soutien social et motivationnel (Northcott et al, 2016), alors que d’autres préfèrent faire de l’exercice seul.

Une série de croyances et d'attitudes personnelles et externes peuvent influer sur la motivation à faire de l'exercice, et ces facteurs varient d'un individu à l'autre. La prise en compte de ces facteurs dans la conception des programmes d'exercice destinés aux personnes victimes d'un AVC à long terme peut renforcer leur attrait et encourager un plus grand engagement dans l'exercice (Poltawski et al., 2015).

Afin de comprendre l’effet des interventions par jeux sérieux sur l’état motivationnel du patient, il est important d’utiliser des outils d’évaluation adaptés. De nombreuses mesures auto-déclarées existent pour évaluer ces trois domaines de motivation décrites par Deci & Ryan (1985). Dans le cadre de cet article nous avons centré nos recherches sur des études proposant un programme d’auto-rééducation des membres supérieurs à domicile, chez des patients post-AVC, ce travail étant en lien avec le projet Européen RGS@home sur lequel nous travaillons.

Motivation auto-déclarée de l’activité physique

Avant le début de l’intervention, évaluer la source de motivation de chaque sujet en matière d’activité physique peut apporter des informations pertinentes pour la suite du programme de prise en charge. Il y a par exemple le Behavioural Regulation in Exercise Questionnaire2 (BREQ-2) (Markland & Tobin, 2004). Cette échelle couvre un continuum motivationnel allant de l'auto-motivation (Intrinsèque, Identifiée, Introjectée) à l'absence de motivation pour l'exercice (Amotivation) en passant par le contrôle externe (Externe). Les résultats du BREQ-2 dans l’étude contrôlée randomisée de Thielbar et al. (2020) ont indiqué une motivation mieux contrôlée intérieurement chez 20 patients post-AVC, après 4 semaines d’utilisation du système de The VERGE®. Ainsi, les patients se sont, semble-t-il, engagés dans l'exercice pour une récompense interne telle que le plaisir de l'activité et une meilleure estime de soi. Cela se rapporte à la notion de motivation intrinsèque (Thielbar et al., 2020).

Motivation auto-déclarée des objectifs de la thérapie

Nous pouvons mesurer en amont la motivation liée aux conséquences de l’intervention, reflétant le niveau de dévouement du patient aux objectifs de la thérapie. L'échelle d'optimisation du contrôle primaire et secondaire (Optimization in Primary and Secondary Control Scale) (OPS) (Heckhausen et al. 1999), constitue alors un instrument pouvant répondre à ce critère. Par exemple, les résultats de Dodakian et al. (2017) indiquent une forte motivation pour la thérapie de réadaptation. L’étude était menée chez des patients post-AVC bénéficiant d’un programme de 28 jours de télé-rééducation avec un jeu sérieux à raison d’une heure d’exercices standardisés et une heure de jeu libre. En amont, les patients avaient une motivation élevée liée aux conséquences pour la thérapie de réadaptation, un très bon soutien social et un optimisme général élevé. Il sera important d'évaluer l'observance de la thérapie de télé-réhabilitation à domicile chez les participants moins motivés, ayant moins de soutien social et moins d'optimisme pour mieux comprendre dans quelle mesure les résultats actuels s'appliquent à l'ensemble des personnes victimes d'un AVC.

Motivation auto-déclarée par l’expérience

Afin d’évaluer l’expérience subjective des participants dans le cadre d’une activité, l'une des mesures les plus récentes et les plus utilisées est l'Inventaire de Motivation Intrinsèque (Intrinsic Motivation Inventory, IMI) (McAuley et al., 1989 ; Ryan, 1982). L’IMI est une méthode de mesure multidimensionnelle comportant 6 sous-parties évaluant par rapport à l’activité : l’intérêt et le plaisir du sujet (interest/enjoyment), la compétence perçue (perceived competence), l’effort et l’importance accordée (effort/importance), la valeur et l’utilité (value/usefulness), la pression et la tension ressenties (pressure/tension), et le choix perçu dans l’exécution (perceived choice). La sous-échelle « intérêt et plaisir » est considérée comme une mesure d’auto-évaluation de la motivation intrinsèque. Les autres sont considérées comme uniquement prédicteurs positifs ou négatifs de la motivation intrinsèque.

Concernant les études relatives à notre domaine, certaines l’utilisent en comparaison pré (après une semaine d’entraînement) - post (après avoir complété le protocole) implémentation du dispositif ludique à domicile (Fluet et al., 2019). Deux groupes de sujets étaient présents dans l’étude de Fluet et al. (2019) : le groupe de motivation intrinsèque renforcée et le groupe de contrôle non renforcé. Les réponses aux items individuels sont restées relativement stables entre le pré-test et le post-test pour chaque groupe, avec tout de même une légère augmentation pour le groupe expérimental (groupe où la motivation était renforcée). Ces données préliminaires suggèrent que l'amélioration de la motivation intrinsèque pourrait avoir un impact sur l'entraînement non supervisé des personnes victimes d'un AVC.

D’autres auteurs utilisent l’IMI uniquement en post-intervention basée sur l’expérience (King et al., 2012 ; Nijenhuis et al., 2017 ; Thielbar et al., 2020). Les résultats sont globalement encourageants pour ce type de thérapie à domicile selon les utilisateurs. Concernant l’étude de King et al. (2012), les résultats positifs de l'IMI, notamment pour l'intérêt/le plaisir et la valeur/utilité, suggèrent que les participants ont été motivés par les jeux sur ordinateur, en combinaison avec le programme d’entraînement. Néanmoins, le faible choix perçu dans la gamme d’exercices proposés peut souligner que la sélection de jeux ne répondait pas entièrement aux besoins ou aux attentes des patients.

Dans l'ensemble, il est raisonnable d'interpréter que l'intervention a motivé et engagé les participants à un point tel que des recherches supplémentaires seraient justifiées, notamment pour comparer l'efficacité de l'intervention avec des approches de traitement qui fournissent une motivation extrinsèque explicite et/ou la thérapie traditionnelle en ambulatoire ou en groupe. En effet, King et al. (2012) n’avaient pas de groupe contrôle dans leur étude, ce qui ne permet pas de savoir si la motivation fournie dans cet essai à domicile est réellement supérieure à celle fournie par d'autres interventions. À l'exception de Fluet et al. (2019), aucune des études n'a rapporté de données de suivi de l'IMI. Pourtant, cela semblerait pertinent de comparer les données perçues et les données d'expérience.

Mesures de la motivation évaluées par le clinicien

Certains auteurs privilégient les entretiens pour évaluer la motivation des utilisateurs. Chen et al. (2019) ont analysé par une étude qualitative l'acceptation par les utilisateurs du système de télé-réhabilitation en se basant sur la Théorie Unifiée de l'Acceptation et de l'Utilisation de la Technologie (UTAUT) (Venkatesh et al., 2003). Il s’agit d’un modèle d'acceptation et d'utilisation des systèmes d'information/technologies de l'information. Ils ont présenté des résultats concernant 4 facteurs : l'attente de performance, l'attente d'effort, l'influence sociale et les conditions facilitantes.

Les patients ont fait état d'une amélioration de la motivation externe (vidéoconférences avec les thérapeutes, contact avec les soignants, les membres de la famille ou les amis) et interne (témoignage des progrès réalisés et diminution de la résistance et du fardeau) pour effectuer leurs exercices. Concernant l'intention comportementale, les participants ont expliqué vouloir utiliser le système à l'avenir, pour améliorer la capacité à adapter la difficulté du jeu et pour améliorer la capacité à montrer les progrès au fil du temps (Chen et al., 2019). Les auteurs rapportent que dans l'ensemble, les motivations externes et internes qui ont poussé les patients à rester dans le programme de télé-réhabilitation ont réduit l'effort perçu pour s'engager dans ce programme. Trois dimensions sont ressorties : l’expérience ludique du jeu, la motivation à l'utilisation, et la flexibilité du lieu et du moment des séances de rééducation.

Conclusion

À l’heure actuelle, encore trop peu de données objectives viennent étayer les hypothèses qui sont faites quant au lien motivation/adhésion aux jeux sérieux dans les programmes d’auto-rééducation des membres supérieurs chez les patients post-AVC. Dans de nombreuses études cette dimension n’est pas évaluée ou seulement évoquée sans outils d’évaluation. Or, des outils existent pour évaluer la motivation en intention d’usage et à l’issue de l’expérimentation. Par ailleurs, peu d’études prennent en considération l’intention d’usage avant de proposer la rééducation à domicile au moyen de jeux sérieux. Il convient de noter la nécessité de travaux supplémentaires visant à clarifier le chevauchement ou la disparité entre les mesures de motivation auto-déclarées et celles basées sur la performance.

Les champs de recherche sur les facteurs humains et les gérontechnologies se sont développés de manière considérable. Les études actuelles basées sur les jeux sérieux dans les programmes d’auto-rééducation des membres supérieurs chez les patients post-AVC ne mettent pas un accent particulier sur l’interférence de l’âge dans l’évaluation de la motivation. Dans ce cadre, des études futures pourraient s’intéresser à l’âge comme critère de comparaison afin d’identifier des solutions aux problématiques médicales, psychologiques, économiques ou sociologiques qui en découlent.

Dans les études futures, il serait utile d’analyser les liens possibles entre la motivation et d’autres dimensions telles que les symptômes dépressifs, l’humeur, afin de mieux appréhender les effets de ces jeux sérieux sur la motivation des patients. En effet, la connaissance de l’état émotionnel des patients est un facteur à prendre en considération car cela peut impacter la motivation.

De plus, nous pensons qu’impliquer les patients sur leurs lieux de vie dans le processus de développement des futurs dispositifs constitue une approche nécessaire. Les réalités du terrain peuvent aider à identifier la source des écueils que les utilisateurs rencontrent dans leur quotidien pendant leur auto-rééducation.

Il serait intéressant de poursuivre les investigations basées sur le suivi de la motivation sur le long terme, ce qui permettrait de mesurer de manière quantifiable ses possibles interdépendances avec l’évolution du patient pendant sa rééducation.