Joseph TONDA, Afrodystopie. La vie dans le rêve d’Autrui, Paris, Éditions Karthala, 2021, 268 p., ISBN : 978-2-8111-2859-3

Herman Ghislain NGOMA 

Sommaire
Texte

1. Prolégomènes à l’Afrodystopie

Note de bas de page 1 :

 Joseph Tonda désigne par « abstraction réelle » le rêve attribué à un « être » invisible, sous le joug duquel vivent les populations africaines et occidentales (2021, p. 31 et p. 250).

Note de bas de page 2 :

Il est à souligner que le point de vue de Florence Bernault sur Le Souverain moderne participe au décryptage des maux manifestes en Afrodystopie, en somme dans le rêve du Souverain moderne. Elle a également participé à la définition de l’Afrodystopie avec Joseph Tonda dans un article à quatre mains (2009).

1Afrodystopie. La vie dans le rêve d’autrui : tel est le titre, hétérogène dans sa composition, du dernier essai du sociologue et anthropologue gabonais Joseph Tonda, paru aux éditions Karthala, en 2021. À l’origine, un espace, l’Afrique centrale, précisément le Congo et le Gabon, en proie à des maux causés par des habitudes culturelles qui semblent s’opposer : tradition/modernité ; paganisme/christianisme. Des maux que Tonda passe déjà au crible de ses analyses dans La Guérison divine en Afrique centrale (Congo, Gabon) (2002), qui débouche sur la construction d’un outil conceptuel capable d’examiner les sociétés africaines : l’allégorie du Souverain moderne. Celui-ci se révèle constituer une force qui régit tout ce qui se passe en Afrique centrale depuis les débuts de l’ère coloniale en passant par les indépendances et jusqu’à aujourd’hui. Dans Le Souverain moderne. Le corps du pouvoir en Afrique centrale (Congo, Gabon) (2005), le souverain considéré est présenté selon la sociologie de Tonda comme « une puissance hégémonique » (2005, p. 7) qui gouverne à sa guise les populations de cet espace, réduites à l’état de sujets. En plongeant ces derniers dans des convulsions frénétiques, le Souverain moderne se déploie dans un espace qui échappe à la réalité et apparaît à la fois comme seul maître et « abstraction réelle »1. Mélangeant réalité et fiction, le Souverain moderne marque, en effet, la permanence d’une caporalisation et d’une balkanisation des peuples et des espaces qui nourrissent l’image du pouvoir depuis la traite négrière. Joseph Tonda parvient à cristalliser, par le biais de cette figure, un ensemble d’oppositions : dominants/dominés, riches/pauvres, colons/colonisés, fiction/réalité etc. Le Souverain moderne apparaît de fait comme « l’ensemble des rapports qui, pour Tonda, gouvernent la production du monde de l’après-colonial, et imposent à ceux qui sont pris dans ses rets une culture du tourment, de la persécution, et de la violence retournée sur soi » 2 (Bernault, 2006, p. 159). C’est sur ces aspects que Joseph Tonda apportait déjà un éclairage dans L’Impérialisme postcolonial. Critique de la société des éblouissements (2012), désignant par ce dernier terme la société dans laquelle vivent les populations d’Afrique changées en sujets-victimes des rêves du Souverain moderne. Tous les soubresauts conjoints aux discours que connaît l’Afrique centrale donnent alors à penser cette société comme une dystopie : une Afrodystopie.

Note de bas de page 3 :

 Lesdites cultures africaines, décrites par les « sciences sociales et humaines », sont souvent habitées par les autres cultures avec lesquelles elles ont été en contact du fait de l’esclavage et la colonisation (Tonda, 2015, p. 31-33).

2Cet essai s’inscrit dans la lignée des textes qui font date dans les sciences humaines, contribuant de surcroît à la critique post-coloniale à la suite de L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident d’Edward W. Saïd (1978, traduit en 1980), de L’Invention de l’Afrique. Gnose, philosophie et ordre de la connaissance de Valentin Yves Mudimbe (1988, traduit en français en 2021), de L’Atlantique noir. Modernité et double conscience de Paul Gilroy (1993, traduit pour la première fois en français en 2003), d’Afrotopia de Felwine Sarr (2016), ou encore de De la postcolonie. Essai sur l’imagination politique dans l’Afrique contemporaine d’Achille Mbembe (2019). Certains de ces écrits déploient une critique africaine faite par des Africain(e)s et des Afrodescendant(e)s. Afrodystopie. La vie dans le rêve d’Autrui (2021), de Joseph Tonda a, par ailleurs, mis à profit la critique dans une perspective large à partir des manifestations de « la valeur » en Afrique centrale (Congo, Gabon), qui s’étend à plusieurs espaces au-delà de l’Afrique : Europe, Amérique et Asie. L’ouvrage semble par son titre s’opposer d’emblée à l’Afrotopia de Felwine Sarr. Ces deux textes se distinguent également par leurs objets. Afrotopia se propose d’identifier et de déconstruire les phénomènes susceptibles d’empêcher la transformation de l’Afrique en un espace de bonheur, en s’appuyant sur les cultures dites africaines3. Toutefois, si Afrotopia travaille à construire les meilleures conditions de vie pour les populations d’Afrique à partir de ses usages et coutumes endogènes, le problème du contact entraînant des « éblouissements » continue de se poser. De ce fait, le principe proposé par Sarr consistant à concevoir une utopie africaine dépouillée de toute influence laisse transparaître une critique contre l’Occident, alors qu’Afrodystopie s’emploie à analyser le rêve de « la valeur » dont sont victimes, conjointement, les Africains et les Occidentaux.

3Le sous-titre du livre de Joseph Tonda, conçu comme un indice clair de la thèse du texte – La vie dans le rêve d’Autrui –, permet à l’auteur d’annoncer comment, par l’analyse des discours des chefs d’État, des hommes politiques, des imaginaires blancs, et en particulier des populations de l’Afrique centrale et des Afro-descendants, il questionnera ce qu’il nomme « la valeur ». Celle-ci apparaît dès lors comme une variable, « une composante de la violence des imaginaires colonialistes et impérialistes » (Tonda, 2021, p. 15), inconsciente, et qui façonne pourtant les individus et leur manière d’agir. Cette « valeur » produit un espace de tension permanente tant chez les dominants que chez les dominés, tant dans la fiction que dans la réalité. Toutes ces descriptions du rêve de « la valeur », qui configurent cet espace du malheur, entrent comme en chiasme en résonnance avec la perspective commune de l’utopie. L’utopie, au sens où l’entend Thomas More, désigne un « “lieu du bonheur”, [qui] est dans son principe un lieu de Nulle-part, c’est-à-dire un lieu invisible ou imaginaire » (Tonda, 2021, p. 49). Cet espace n’existe donc pas, ou serait une fiction. La dystopie, à la différence de l’utopie, représenterait, par opposition, un espace en proie à des phénomènes catastrophiques, privatifs, négationnistes etc., qui ressemble trait pour trait au continent noir qui, comme le souligne Joseph Tonda, « n’existe pas » (Tonda, 2021, p. 28). 

4Dans Afrodystopie, cependant, ces concepts sont cristallisés dans un segment du sous-titre, à savoir : « le rêve d’Autrui », disséminé dans le texte au travers d’habitudes et de configurations discursives observées et analysées sur le terrain des recherches de l’universitaire : le Congo et le Gabon. Il faut souligner que « le rêve d’Autrui » incarne, selon la terminologie développée par Joseph Tonda, des éléments matériels et des désirs attachés aux populations africaines, afro-descendantes, impérialistes, qui se manifestent à travers des phénomènes de l’ordre des imaginaires, tant chez les dominants que les dominés. Incarnant ces imaginaires dans son rêve, « Autrui » rend possible la rencontre de paradoxes réunis à l’occasion de combinatoires alliant réalité et fiction, mais également la vie et la mort. Pour Joseph Tonda « Autrui » relève de la vie psychique des peuples. Il rêve capitalisme, esclavage, colonisation, impérialisme, néo-colonialisme. L’objectif escompté par cet essai est exposé de façon explicite dans le chapitre 3 : il s’agit de donner à entendre, contre l’immense « bruit » de l’impérialisme post-colonial, « les produits du travail de l’union de la valeur du Capital et de la puissance africaine dans l’Argent » (Tonda, 2021, p. 51). Autrement dit, cet ouvrage vise à rendre possible la perception de l’activité de la « valeur » dans l’inconscient collectif tant des Africains que des Occidentaux. Afrodystopie. La vie dans le rêve d’Autrui s’insère dans le cadre des études postcoloniales, dans une perspective de déconstruction des rapports de forces et des oppositions telles que : colonialisme/postcolonialisme ; colon/colonisé ; Afrique/Occident ; tradition/modernité ; dominant/dominé. Tonda propose néanmoins un dépassement de ces rapports dialectiques, en inscrivant sa réflexion sous le signe d’un examen des produits historiques et sociaux de ces différentes dyades conceptuelles, en s’intéressant aux manifestations de la violence aliénante, esclavagiste, impérialiste et néocolonialiste. Il passe de la sorte au spectre de son analyse des sociétés africaines subsahariennes contemporaines, les manifestations d’un imaginaire qui est avant tout le produit de la rencontre de plusieurs cultures, indéfectiblement liées par des échanges, mais également des rapports de forces, construits sur un temps historique long.

2. Afrodystopie : une autopsie postcoloniale

5Le corps du texte est composé de onze chapitres qui se subdivisent en plusieurs points, l’ensemble étant encadré par une introduction et une conclusion. Sont ainsi proposés, d’une part, la description des variantes du « rêve d’Autrui » et ses manifestations, et, d’autre part, les interprétations du fonctionnement interne du rêve de ce que Tonda nomme « la valeur ».

Note de bas de page 4 :

Le terme « continent noir » est une expression à tel point idéologiquement chargée que son usage viderait ici la pertinence de tout propos. La fécondité du terme, symptôme dommageable des utopies coloniales et francophones, doit interroger, afin de nous aider à diagnostiquer l’agent pathogène, l’« abstraction réelle », des tensions observables sur le continent africain et à travers le monde. Selon Tonda, « le continet noir » n’existe pas. Il serait, en effet, une utopie en ce qu’il constituerait le lieu de jouissance du bonheur de la valeur ; et une dystopie parce qu’il serait également le lieu de la consumation de toute humanité.

6D’entrée de jeu, Joseph Tonda dissèque le discours social – qui rassemble et analyse, selon le sociologue Marc Angenot, des éléments « susceptibles de rendre raison de la totalité de ce qui s’écrit, s’imprime et se diffuse à un moment donné dans un état de société » (Angenot, 2006, § 1). Il montre la présence profonde, sur tout le continent africain, de « l’inconscient de l’impérialisme ». L’hypothèse de Tonda est que deux des moments les plus marquants de l’histoire africaine ont permis aux puissances occidentales de violemment pénétrer les structures psychiques des populations « africaines et afrodescendantes », en les rendant réciproquement captives du « rêve d’Autrui ». Comme l’illustre la première épigraphe de cet essai, une tentative de s’échapper de ce lieu carcéral, celui du « rêve de l’impérialisme », semble aporétique, car ce serait là le travail du rêve de ce dernier, qui porterait encore l’« odeur du père », selon le titre du texte de Valentin Yves Mudimbe (1980). Les usages et les cultures des personnes qui se meuvent dans le « rêve d’Autrui » miment selon Tonda la part inconsciente de « l’Argent », celui-ci s’érigeant en principe régulateur de leur vie. L’espace onirique est une métaphore du « rêve de la valeur » qui s’incarne en chaque population réduite à l’état de sujet et qui le personnifie en même temps. Le rapprochement du travail de cette « abstraction réelle » et du « ça », part pulsionnelle de l’inconscient au sens où l’entendait Freud, révèle que les populations du continent africain vivraient, selon Tonda, dans une utopie dystopique4, ce dont ils n’auraient pas pleinement conscience. Les multiples références aux expériences tirées des espaces linguistiques de l’Afrique centrale (Congo, Gabon) sont autant de mises en évidence de la présence de l’Occident, créateur de la « valeur » manifeste dans l’exercice du pouvoir. Le pouvoir auquel tout le monde aspire, utopique ascenseur social et clé d’accès à un lieu fantasmé de bonheur, se métamorphose en un lieu aliénant, déshumanisant, mortifère, donc en une dystopie. L’ensemble des récits et des événements recensés, articulés et interprétés dans l’approche pluridisciplinaire proposée dans cet essai constituent le laboratoire à partir duquel Tonda construit le paradigme de l’Afrodystopie. Il l’utilise alors comme un prisme qui rend possible la lecture des sociétés africaines. Ainsi, « ce monde onirique réel où se produit en permanence la mystification non imaginaire » (Tonda, 2021, p. 25) est analysé au croisement de plusieurs sciences humaines. Il se manifeste à travers les discours issus de l’ensemble des éléments susmentionnés.

7Les chapitres à travers lesquels Tonda développe sa réflexion sont liés par un fil à la fois factuel et thématique. Ils s’enchaînent en décrivant des faits sociaux appartenant à une « sociodicée », conçue en tant que « justification de l’ordre social, comme la théodicée est la justification de Dieu » (Tonda, 2021, p. 107. Tonda recense plusieurs discours produits par des chefs d’État, des hommes politiques, des romanciers, des musiciens et des citoyens, à partir desquels il examine les (dys)fonctionnements discursifs desquels sont extraites plusieurs thématiques. S’ensuivent des interprétations à partir d’un appareillage critique s’appuyant sur des postulats sociologiques, anthropologiques, psychologiques, mais aussi relevant des sciences politiques. Ainsi, Tonda parvient à interroger la vie psychique de « la valeur » et sa kyrielle de variants qui se cristallisent en un phénomène ambivalent, celui du « super-fétiche » (Tonda, 2021, p. 79), « l’Argent », et son pendant, « la Mort ». À partir de ce « super-fétiche », dépositaire du droit de vie ou de mort et de l’inconstance des individus, Tonda construit un principe analytique associant témoignages, fictions, légendes et théories des sciences humaines et sociales.

8Cet ouvrage pourrait en même temps ébranler certains fondements de la critique postcoloniale, de « l’idéologie coloniale » et de la pensée dominante. Le long développement qui innerve le texte souligne à quel point « [i]l est extrêmement difficile pour des pensées qui réagissent à l’idéologie coloniale de sortir complètement de l’épistémè occidentale car elles sont le produit de la rencontre coloniale » (Kodjo-Grandvaux, 2013, p. 92) au même titre que les discours diffusés auprès des populations enquêtées. Ces descriptions donnent à voir ce qui serait la cause d’une « “complication” de la vie réelle des Africain(e)s et des Afrodescendant(e)s dans le rêve d’Autrui, entendu comme rêve d’une abstraction » (Tonda, 2021, p. 45). En d’autres termes, Tonda s’applique à dégager les différentes déclinaisons de la « valeur ». L’épigraphe déjà citée, empruntée à Valentin Yves Mudimbe (Tonda, 2021, p. 7), traduit le caractère complexe de la critique « contre » l’Occident, et ce en partant de la vie des populations africaines dans le rêve d’Autrui. Autrement dit, Tonda rattache la critique contre l’Occident à une dépendance à cette dernière qui exerce aussi une influence dans la vie des populations africaines. Se référer à l’Afrodystopie permet par conséquent l’examen des structures faisant état :

des choses qui rêvent et qui font vivre des sujets réels dans leurs rêves : l’Argent, la Marchandise, l’État mais aussi « la bibliothèque coloniale » de Valentin Yves Mudimbe, qui invente l’Afrique comme un auteur de rêve crée dans l’inconscience totale, ainsi que d’autres « choses » mystiques africaines formant également cet Autrui non humain, auteur du rêve dans lequel vivent les populations noires (Tonda, 2021, p. 123).

Note de bas de page 5 :

Pour Tonda, le « genre humain est une composante » de la « Nature » (Tonda, 2021, p. 87). Elle comprend à la fois les Africains et les Occidentaux, contrairement aux considérations coloniales qui opéraient une distinction entre ces populations : les Occidentaux étaient supérieurs aux Africains, qui de fait les excluaient du « genre humain ».

9Joseph Tonda indique que si « Autrui » s’exprime dans la critique contre l’Occident et s’inscrit également dans la réalité des populations, c’est qu’il est présent dans la diachronie d’imaginaires durables, affleurant dans les discours comme dans les œuvres littéraires. Il pose donc le postulat selon lequel la dystopie africaine serait l’espace de prédilection des exactions du pouvoir de « la valeur » se confondant avec l’utopie, au-delà du sens que lui donnait donc Thomas More. L’utopie selon Tonda ne serait plus seulement « une critique du monde de l’Argent, de l’or et du luxe » mais aussi de « la destruction de la Nature » (Tonda, 2021, p. 87) regroupe aussi bien les dominants que les dominés. L’utopie, dans ce cas, englobe le « genre humain »5 dans sa totalité et se confronte au réel. Tonda élargit ainsi le champ de son analyse en associant réel et irréel.

10Cet essai est présenté comme allant à l’encontre des « critiques classiques de l’impérialisme et du néocolonialisme, les théories de la dépendance et des études postcoloniales » (Tonda, 2021, quatrième de couverture) aliénées, assimilées par l’Occident. Il n’empêche que Tonda fait un usage abondant de ces mêmes outils scientifiques, soupçonnés d’être aux services de l’hégémonie occidentale. Derrière cet usage dont souffrirait la critique (et que Mudimbe et Kodjo-Grandvaux soulignent dans les extraits choisis en guise d’épigraphes à Afrodystopie), Tonda met en évidence le paradoxe de l’intellectuel dans sa relation avec ses pairs. Parce qu’il prend part, en tant qu’intellectuel aussi bien que citoyen, à la société qu’il analyse, il montre une fois encore que « [l]a critique n’est pas seulement une aventure intellectuelle, elle est une expérimentation de soi, une exposition intime des entrelacs du savoir, du discours, de la lecture et de l’opinion » (Toudoire-Surlapierre, 2008, p. 13).

11Cet ouvrage serait-il une réception des « critiques classiques » ou un dépassement de ces dernières ? S’il est vrai que cet essai déploie à nouveau les critiques connues de l’hégémonie occidentale (rapports de forces dominant/dominé, colon/colonisé, centre/périphérie, etc.), les observations, en particulier sur les terrains de recherche de l’Afrique centrale, du Congo, et du Gabon, ainsi que la variété du corpus constituent les points forts d’une réflexion originale. Elle permet de repérer un phénomène globalisant, celui de l’influence de la valeur « sur la vie en elle-même sur cette planète » (Tonda, 2021, p. 87). Tonda ne se contente pas d’évoquer des structures évidentes, mais il recourt aussi à des imaginaires à la fois producteurs et produits de ce qu’il nomme « chose » : cette espèce d’énergie duale à l’origine des (dys)fonctionnements de la vie.

Conclusion

12En somme, il ressort combien la thèse paradoxale de Tonda apparaissait d’emblée dans le sous-titre : La vie dans le rêve d’Autrui. La vie en Afrodystopie n’est pas un nouveau malheur, mais la continuité de l’impérialisme occidental depuis l’esclavage, la colonisation et les indépendances jusqu’à nos jours. Les effets de cette persistance s’incarnent dans plusieurs dispositifs, notamment : « la valeur », « l’argent », « la Marchandise », le « Mari de nuit » etc., qui pourraient tous avoir pour synonyme « la chose », dont Tonda s’applique à dégager les déclinaisons protéennes. On soulignera l’interdisciplinarité de cet essai qui examine d’un point de vue à la fois sociologique, anthropologique, psychologique, littéraire, économique et politique les (dys)fonctionnements du monde en général, et de l’Afrique en particulier. Aussi, Tonda nous invite tous, Occidentaux ou Africains, à une distance critique et à une mise en perspective, entre passé et présent, pour un possible dépassement futur.