L’Intelligence Artificielle Contre le Cancer de la Lymphe

L’intelligence artificielle s’invite dans toutes les sphères de la connaissance, remplaçant ainsi le savoir-faire humain. Un seul domaine semble immunisé contre cette irruption : la recherche. Elle exige une analyse et une sensibilité inaccessible aux robots. Pourtant, en avril dernier, l’institut Carnot CALYM (Consortium pour l’Accélération de l’Innovation et de son Transfert dans le Domaine du Lymphome) a révélé un partenariat avec MICROSOFT et ARTEFACT. Leur but ? Utiliser l’intelligence artificielle afin de découvrir de nouvelles voies de recherches dans le domaine du lymphome. En effet, l’institut Carnot CALYM met en lumière les travaux des entités de recherches membres de son réseau dont une équipe de recherche limougeaude. En valorisant ainsi la multidisciplinarité, la complémentarité et la diversité, l’étude du lymphome ne cesse de progresser.

 

Qu’est-ce que le lymphome ?

Le lymphome est un cancer du système lymphatique qui se caractérise par une multiplication cellulaire au niveau d’un organe lymphoïde (rate, foie, moelle osseuse…) ou d’un tissu lymphoïde associé aux muqueuses.

C’est la maladie du sang la plus fréquente et la 6ème cause de cancer dans le monde.

L’augmentation des cas de lymphomes s’expliquerait par le vieillissement de la population. Toutefois, un article publié en février dernier dans ScienceDirect, annonce que le risque de développer la forme la plus fréquente de lymphome est accru de 41 % pour les travailleurs exposés aux pesticides à base de glyphosate.

 

Présentation de L’Institut Carnot CALYM

Institut Carnot CALYM est un institut de recherche souhaitant accélérer l’innovation et sa mise en application dans le domaine du lymphome exclusivement.

Il est formé de 15 entités de recherches spécialisées :

  • Le groupe coopérateur LYSA (The Lymphoma Study Association)
  • La structure opérationnelle de recherche clinique LYSARC (The Lymphoma Academic Research Organisation)
  • 13 équipes de recherches publiques et leurs tutelles dont l’UMR CNRS 7276 INSERM 1262 dirigée par Michel Cogne et Jean Feuillard.

La Recherche et le Développement de médicaments se fait suivant un processus long et coûteux. Depuis peu, l’évolution du modèle économique de l’industrie pharmaceutique fait que ceux-ci préfèrent externaliser certaines phases de R&D. L’institut Carnot CALYM est donc sollicité pour les phases précoces de R&D. Il a inclu dans son offre l’accès à la plateforme Early du LYSARC pour les phases précoces I et IIa des essais cliniques.

 

Les 4 piliers de R&D de l’institut Carnot CALYM

  • Développer de nouvelles molécules précliniques. Cet axe consiste à rechercher et à valider de nouvelles cibles biologiques et modèles in vitro et in vivo de lymphome.
  • Améliorer le diagnostic, guider la décision thérapeutique et prédire la réponse tumorale. A travers, l’identification, la validation, la protection et le licensing de biomarqueurs sanguins ou tissulaires.
  • Accélérer la recherche translationnelle. L’objectif est d’accélérer le passage de la recherche fondamentale à la recherche appliquée. Elle exige une grande collaboration entre chercheurs et médecins, d’autant plus qu’elle se développe à proximité du patient.
  • Accélérer le développement de l’accès au marché de candidats médicaments Afin d’optimiser et exploiter des outils, processus et plateformes en lien avec la recherche clinique.

 

Présentation des Projets de l’équipe de recherche UMR 7276

Il y a deux ans, l’équipe CALYM de Michel Cogné, « Contrôle de la réponse immune B et lympho-prolifération » (UMR 7276 CNRS INSERM 1262) obtenait le prix « Equipe à l’Honneur » ainsi qu’une subvention de 10 000 €. Ce prix a été remis par le conseil d’administration de la fondation ARC pour la recherche sur le cancer. En effet, les chercheurs ont étudié les mécanismes moléculaires et cellulaires impliqués dans la régulation des lymphocytes B auxquels ils se consacrent exclusivement. Leurs recherches se déclinent en différents projets :

Projet Carat : La médecine Nucléaire Contre le Cancer

Il y a 3 ans, le CHU de Limoges recevait les premiers nanogrammes de plomb-212 d’Orano Med (anciennement Areva Med), filiale d’Orano, spécialisée dans les applications thérapeutiques.

Le projet CARAT (Consortium pour des applications en Radio Alpha Thérapie) allie la radiothérapie à l’immunothérapie afin de créer de nouveaux traitements dans la lutte contre le cancer. L’utilisation de rayonnement alpha émis par des isotopes radioactifs à des fins thérapeutiques forme une discipline à part entière : L’alphathérapie.

Orano Med a mis au point un procédé unique permettant l’extraction du plomb-212, métal rare, dans le but de développer des approches d’alphathérapie ciblée afin de détruire les cellules cancéreuses tout en limitant l’impact sur les cellules saines environnantes.  L’idée est donc d’équiper des anticorps (ou vecteurs) de ce nouveau radionucléide afin d’atteindre spécifiquement les cellules tumorales pour les détruire.

Ce projet porté par Orano Med qui fournit les radionucléides et coordonne l’ensemble de la R&D a regroupé :

  • Des PME françaises
    • Eveon (Montbonnot-Saint-Martin)
    • Triskem International (Rennes)

Des partenaires académiques :

  • Le service de Médecine Nucléaire du CHU de Limoges (Pr. J. Monteil)
  • Le laboratoire CRIBL – CNRS UMR 7276 INSERM UMR 1262 – Université de Limoges (Pr. M. Cogné)
  • Le laboratoire Subatech (CNRS UMR 6457, Nantes)

Ce partenariat industriel et académique chiffré à près de 20 millions d’euros a généré des résultats encourageants présentés au congrès international d’alphathérapie en avril 2019 (TAT11 – Ottawa, Canada). En effet, il montre la pertinence de la stratégie de radio immunothérapie pour traiter les lymphomes ou encore le myélome.

Projet INCa PLBIO

Ce projet étudie le rôle des hélicases, molécules qui agissent sur l’ADN, dans le myélome multiple (cancer de la moelle osseuse). Il permet le développement de nouvelles approches thérapeutique permettant une nouvelle fois, de cibler les cellules tumorales sans détruire les cellules saines.

Dans le cadre du plan cancer 2009-2013, l’objectif est de garantir au patient l’accès à un grand panel de techniques de génétique moléculaire quelle que soit sa localisation ou sa pathologie. A Limoges près de 1500 personnes ont bénéficié de cette thérapie ciblée en 2016. (French National Cancer Institute Report 2016-2017).

Projet TIE-Skip

Le Codon Stop marque la fin de la traduction d’un ARNm en protéines essentielles à la structure et aux fonctions de l’organisme. Des erreurs peuvent provoquer l’apparition de codon Stop prématurés. Toutefois, il est possible de corriger ses erreurs. Une technique utilisée en thérapie génique est le « Saut d’Exons ». Elle permet de synthétiser une protéine manquante ou tronquée mais fonctionnelle.

Le Projet TIE Skip étudie les conséquences négatives de transcrits d’immunoglobulines (Ig) tronquées, produites par saut d’Exon, sur la survie des plasmocytes (cellule B produisant des anticorps) ; il offre ainsi un nouveau moyen original de contrôler ces cellules lorsqu’elles sont tumorales.

Projet BAR-B

Ce projet 2018-2021 coordonné par Limoges en partenariat avec Rennes et Montpellier est soutenu par l’ARC (Association pour la Recherche sur le Cancer). Il est complémentaire d’un projet ANR (Agence Nationale de la Recherche) menée avec une équipe du Généthon (projet SYN-B). Dans les deux cas, l’objectif est l’ingénierie du génome des cellules B afin de leur conférer des propriétés anti-tumorales et de les manipuler pour un usage thérapeutique.

Projet Follicular lymphoma microenvironment

Ce projet coordonné par l’U1236 Inserm de Rennes associe l’unité limousine CRIBL et un laboratoire new-yorkais pour la caractérisation et le ciblage du microenvironnement tumoral au cours des lymphomes folliculaires. Il est financé par une fondation américaine (la Leukemia Lymphoma Foundation) depuis juin 2019 et pour 3 ans.

 

Le programme d’intelligence artificielle de l’institut CALYM concentrera l’ensemble des données de la recherche cliniques, translationnelles et précliniques menées par ses membres. Ses données intégrées dans des algorithmes performants, permettraient de découvrir de nouvelles voies de recherche. Le partenariat avec CALYM offre donc une plus grande visibilité à de multiples projets. L’équipe de recherche de Michel Cogné s’inscrit ainsi dans un réseau dont le but commun est de développer des innovations pour combattre le lymphome. Les avancées sont nombreuses et les méthodes utilisées continueront de nous surprendre.


Publié le : 5 juillet 2019