[Publication] Prédiction de la résistance mécanique des ciments bas carbone à base d’argiles calcinées, basée sur l’intelligence artificielle

Les ciments à base d’argiles calcinées possèdent un important potentiel pour contribuer à réduire de manière significative l’empreinte carbone du secteur de la production de ciment. Cette nouvelle génération de ciment a notamment reçu une attention particulière de la part de l’industrie et des chercheurs en tant qu’option potentielle pour réduire les émissions de CO2 provenant de la production de Ciment Portland Ordinaire (OPC) composé de clinker (constituant du ciment obtenu par un traitement thermique d’un mélange d’environ 80% de calcaire et 20% d’argile). Alors que la fabrication du clinker Portland nécessite un traitement thermique à environ 1450 °C, la calcination d’argile – pouvant substituer une partie du clinker – se fait entre 600 et 900 °C, ce qui permet de réduire la consommation d’énergie et les émissions de CO2 de 35 à 40 %.

L’exploitation du potentiel des ciments à base d’argiles calcinées est pourtant limitée par la complexité inhérente à la modélisation de ses propriétés mécaniques à l’aide de modèles empiriques. En effet, le comportement spécifique et dynamique de l’hydratation du ciment et la compréhension incomplète de la réactivité pouzzolanique ne sont pas compatibles avec les modèles de calculs et de modélisations habituels. De plus, au cours des dernières décennies, des méthodes l’utilisation de l’intelligence artificielle, telles que l’apprentissage automatique, ont été utilisées pour prédire les propriétés des matériaux en fonction de leur composition et des paramètres de synthèse. L’approche de l’apprentissage automatique consiste à alimenter un algorithme avec des données d’entrée afin de créer des modèles qui optimisent les propriétés des matériaux. L’apprentissage automatique a été appliqué dans de nombreuses études axées sur la prédiction des propriétés des matériaux cimentaires, qui constituent un domaine de recherche émergent. Cependant, prédire avec précision les propriétés techniques de ce ciment à faible teneur en carbone reste complexe en raison des nombreux paramètres impliqués dans les processus de formulation et de durcissement, un défi scientifique qu’une équipe de chercheurs de l’IRCER et de l’institut XLIM, avec le soutien du LABEX ∑-LIM, a relevé.

En effet, ces travaux mettent en évidence l’application de modèles d’apprentissage automatique pour prédire la résistance à la compression du ciment d’argile calciné. L’évaluation de sept algorithmes d’apprentissage automatique supervisé en tenant compte de quatorze caractéristiques d’entrée, (notamment les pourcentages d’argile, de ciment Portland et de calcaire, la composition chimique exprimée sous forme de rapports de réactivité, les conditions de calcination de l’argile et les conditions de durcissement) et l’entraînement sur un ensemble de données de 323 mélanges ont permis de constater que la mise à l’échelle des caractéristiques est cruciale pour une analyse interprétable de l’importance des caractéristiques. Ces résultats ont démontré que le modèle entraîné peut prédire avec précision la résistance à la compression du ciment argileux calciné avec une erreur absolue moyenne de 2,5 MPa. Le modèle XGboost, apparu comme le prédicteur le plus précis parmi les modèles évalués pour la résistance à la compression, a révélé l’influence significative du rapport alumine/silice des argiles sur la résistance à la compression des ciments d’argile calcinés. En outre, des plages de composition intéressantes ont été identifiées pour les matières premières, offrant des pistes potentielles pour une optimisation plus poussée de ces ciments. Cette approche d’apprentissage automatique s’est également alignée sur les résultats expérimentaux publiés dans la littérature, montrant une diminution de la résistance au-dessus de 920 °C, ce qui est cohérent avec les résultats expérimentaux rapportés dans la littérature.

En conclusion, ces travaux novateurs ont permis de valider l’application de l’apprentissage automatique pour prédire la résistance à la compression du ciment d’argile calciné, ce qui constitue une première étape importante vers la conception de nouvelles compositions potentielles et optimisées. Les études futures se concentreront sur la prédiction des propriétés de rhéologie et de durabilité du ciment d’argile calcinée à l’aide de techniques d’apprentissage automatique.

En outre, Il est important de noter que l’empreinte carbone des compositions prédites par le modèle d’apprentissage automatique nécessite une évaluation complète du cycle de vie, ce qui va au-delà de la question de recherche spécifique de cet article.

 

Légende. Résumé graphique du modèle de prédiction de la résistance à la compression des ciments argileux calcinés à base de calcaire, basée sur l’apprentissage automatique

 

Informations relatives à la publication

Journal : Journal of Building Engineering – Volume 76

Date de publication : 1 Octobre 2023

Auteurs : Yassine El Khessaimi (Institut XLIM, UMR 7252 CNRS/Université de Limoges – IRCER, UMR CNRS 7315 CNRS/Université de Limoges – Limoges, France), Youssef El Hafiane (IRCER, UMR CNRS 7315 CNRS/Université de Limoges – Limoges, France), Agnès Smith (IRCER, UMR CNRS 7315 CNRS/Université de Limoges – Limoges, France), Claire Peyratout (IRCER, UMR CNRS 7315 CNRS/Université de Limoges – Limoges, France), Karim Tamine (Institut XLIM, UMR 7252 CNRS/Université de Limoges – Limoges, France), Samir Adly (Institut XLIM, UMR 7252 CNRS/Université de Limoges –  Limoges, France), Moulay Barkatou (Institut XLIM, UMR 7252 CNRS/Université de Limoges, Limoges, France)

Lien : https://doi.org/10.1016/j.jobe.2023.107062