SUMCASTEC avance sur l’étude des cellules souches cancéreuses

Interview de Sofiane Saada, prix du meilleur poster au congrès international "cancer stem cells and oncology research"

Sofiane Saada, post-doctorant au laboratoire CAPTuR (Contrôle de l’Activation Cellulaire, Progression Tumorale et Résistance Thérapeutique – EA 3842) sur le projet H2020 « SUMCASTEC » vient de recevoir le prix du meilleur poster au 11ème congrès international « cancer stem cells and oncology research«  qui s’est tenu à Dublin, Irelande du 11 au 13 juin 2018.  Le colloque dédié aux recherches et avancées sur les cellules souches cancéreuses portait cette année, sur le ciblage des cellules souches cancéreuses pour une meilleure prise en charge du cancer.


Quel est votre parcours universitaire ? Quand avez-vous commencé à travailler à CAPTuR ?

Je connaissais le laboratoire CAPTuR pour y avoir effectué mon stage de M1, et mon doctorat avec le Pr Marie-Odile Jauberteau, sa directrice, et où j’ai eu un poste d’ATER.
Après un post-doctorat à l’Université de Pittsburgh (USA), je suis revenu à Limoges en septembre 2017 pour travailler avec le Pr Fabrice Lalloué sur la partie biologie du projet SUMCATEC en tant que post-doctorant.

Sur quoi portent vos recherches ? Comment s’intègrent-elles dans le projet SUMCASTEC ?

Nos recherches portent sur le modèle du glioblastome qui est la tumeur cérébrale la plus fréquente et la plus agressive. Les traitements actuels permettent de réduire la tumeur, mais pas de l’éliminer. A ce jour, le pourcentage de survie à 5 ans est très faible – d’où l’idée de développer de nouveaux outils.

Aujourd’hui, nous savons tuer les cellules cancéreuses « classiques », dites différenciées, par des thérapies conventionnelles telles que la chimiothérapie et la radiothérapie qui ciblent les cellules en prolifération. Par contre, les cellules souches cancéreuses, dites « indifférenciées » ne prolifèrent pas ou très peu et restent en dormance. De fait, elles sont très résistantes aux traitements, de plus elles ont la particularité de pouvoir régénérer une tumeur plus agressive et conduisent à des récidives. Ainsi, mes travaux portent sur l’isolement et la caractérisation de ces cellules souches cancéreuses, par de nouvelles méthodes de détection, et ont pour objectif de les neutraliser.

Comment s’organise la collaboration entre XLIM et CAPTuR sur le projet ?

La problématique de nos recherches est biologique, mais leur finalité est médicale.

Les biologistes de CAPTuR et les physiciens d’XLIM sont des scientifiques qui essaient de comprendre les mécanismes et les fonctions des cellules responsables de l’agressivité tumorale et des résistances aux traitements, et ce, en explorant les propriétés biologiques et biophysiques des cellules souches cancéreuses.

Aujourd’hui, grâce à notre collaboration, nous sommes capables d’identifier les signatures électromagnétiques spécifiques des cellules souches cancéreuses.

Que présentait votre poster? Quelle avancée de vos recherches proposait-il ?

Mon poster présentait la caractérisation des signatures électromagnétiques identifiées dans les cellules différenciées et indifférenciées. Nous savions qu’elles étaient différentes d’un point de vue biologique, mais pour la première fois, nous pouvons démontrer qu’elles sont différentes d’un point de vue physique et biophysique, grâce à notre collaboration avec XLIM, d’une part avec Rémi Manczac, post-doctorant et Arnaud Pothier coordonnateur du projet à XLIM.

Cette découverte complètement innovante va permettre d’ouvrir des pistes vers de nouvelles techniques pour isoler les cellules souches cancéreuses et les neutraliser.

Comment se fait la sélection du meilleur poster ?

J’ai proposé le poster à un jury lors d’une session de posters en présentant le projet, ses résultats, ses conclusions et ses perspectives. Le jury s’est ensuite réuni pour désigner le meilleur poster.

Quelles seront les applications de vos recherches? Pour quels enjeux sociétaux ?

En moins d’un an, nous avons bien avancé sur la caractérisation des signatures et l’isolement des cellules souches cancéreuses.

Nous commençons même à avoir les premiers résultats concernant leur neutralisation avec dans l’idée de les basculer vers un état différencié pour qu’elles deviennent sensibles aux traitements. Nous le ferons avec des champs nanopulses électriques, qui ont la particularité d’être très courts (de l’ordre du nano seconde) et d’avoir un voltage très haut, et qui vont permettre de modifier la physiologie des cellules : de cellules indifférenciées vers des cellules proliférantes. Quand cette manipulation sera opérante, nous pourrons alors tuer les cellules souches cancéreuses avec la chimiothérapie et la radiothérapie.

L’objectif final de SUMASTEC est de développer un laboratoire sur puce (Lab-on-Chip) intégrant des puces électroniques qui permettront d’aller de la caractérisation à la neutralisation des cellules – nous sommes sur la bonne voie, puisque nous savons maintenant les identifier. Nous pourrons ensuite proposer une thérapie et commencer à expérimenter sur des patients. Cela donnera lieu à l’utilisation d’un outil complet, moins coûteux et moins envahissant que ceux utilisés actuellement, mais surtout avec une meilleure efficacité du ciblage et de la neutralisation des cellules souches cancéreuses.

Notre projet démontre l’importance de l’interdisciplinarité dans la recherche et de la nécessaire collaboration entres équipes à tous les niveaux, local, national et international pour la lutte contre le cancer.