Pierre Marquet

Pierre Marquet, directeur de l’UMR 850 pharmacologie des immunosuppresseurs et de la transplantation (INSERM /Université de Limoges/CHU) est coordinateur régional de la Fédération Hospitalo-Universitaire « SUPORT », une FHU qui devrait permettre des avancées considérables en matière de greffe d’organe.


Qu’est-ce que la FHU SUPORT ?
C’est une Fédération Hospitalo-Universitaire entre le CHU de Tours, de Poitiers et de Limoges. Nous mettons en commun nos forces dans le domaine de la recherche, de l’enseignement et des soins sur la thématique de la transplantation d’organes (reins, foie et cœur) et plus particulièrement sur l’augmentation de la survie des greffons. Cette FHU existe pour 5 ans qui pourront être renouvelés via une procédure de réévaluation.
Nous avons répondu à un appel à projet de la région HUGO (Hôpitaux Universitaires du Grand-Ouest), dont Limoges s’est rapprochée pour l’occasion. Les projets on fait l’objet d’expertises extérieures et ont été évalués par un jury international. 14 projets ont été déposés et seulement 4, dont le nôtre, ont été noté A+. Notre projet est le seul impliquant trois établissements.

Que se passe-t-il au sein de cette FHU ?
Des actions concrètes sont déjà engagées dans les trois domaines : le soin, la recherche et l’enseignement. Dans les soins, en particulier pour la greffe de rein ou de cœur, nous travaillons sur l’harmonisation de la prise en charge des patients. Ils seront diagnostiqués, traités et suivis de la même manière sur les trois sites. Le bénéfice pour le patient : il sera traité comme dans un grand centre, avec une procédure discutée entre 20 spécialistes et sera en même temps suivi par une petite équipe de sa région qui le connaîtra parfaitement.
Cette mise en commun des connaissances et des techniques permet donc d’apporter aux patients un meilleur traitement…
En effet car Poitiers est très spécialisée sur la conservation des greffons au moment où on les prélève, avant de les transplanter. Tours est plus spécialisée dans les essais cliniques de nouveaux médicaments et Limoges dans l’optimisation des traitements. De plus, les études montrent qu’il faut en moyenne 17 ans pour que des innovations entrent pleinement en application clinique. Le fait de formaliser ce genre de procédure et d’en discuter entre nous va accélérer cette pénétration des innovations en clinique.

Et concernant la recherche ?
Les équipes ont déjà déposé des projets communs à l’ANR, par exemple un projet traitant des biomarqueurs ; à Limoges, nous travaillons sur les biomarqueurs des patients déjà transplantés pour prévoir l’évolution du greffon. L’équipe de Poitiers travaille plutôt sur les biomarqueurs du greffon avant transplantation pour évaluer sa qualité. Nous allons donc mettre en commun nos connaissances sur ces champs-là. Nous montons aussi des projets de recherche clinique que nous déposerons au PHRC (Programme Hospitalier de Recherche Clinique). Tours était très sollicitée par rapport à Limoges et à Poitiers au niveau de la recherche clinique industrielle : lorsqu’un industriel veut commercialiser un nouveau médicament, il doit prouver son efficacité et sa non-toxicité et passe pour cela par des centres cliniques. Nous souhaitons aujourd’hui mettre en place un guichet unique de manière à ce que, lorsqu’un industriel vient chercher des patients pour tester son produit, on lui propose la totalité de la cohorte des trois centres.
Cela représente un gros avantage pour les patients qui sont en échec thérapeutiques et pour lesquels on ne trouve pas de solution. Ils pourront ainsi avoir accès à de nouveaux traitements avant tout le monde. L’autre avantage est aussi que l‘on sera ainsi impliqué très tôt dans les publications qui concernent les médicaments innovants, ce qui permettra à nos équipes de continuer à publier dans de très bonnes revues.

Pour l’Université de Limoges, quelles équipes sont engagées dans ce projet ?
La mienne bien sûr, mais aussi une partie de l’équipe de Marie-Cécile Ploy (UMR 1092 Anti-infectieux : supports moléculaires des résistances et innovations thérapeutiques), pilotée par Sophie Alain qui travaille sur un type particulier d’infection chez le transplanté : le cytomégalovirus.

Quels sont les projets de la FHU en matière de formation ?
Nous souhaitons mettre en commun les formations de niveau master et mettre en place des formations professionnalisantes. Par exemple, Limoges et Poitiers vont maintenant intervenir dans le master 2 « relations hôte/greffon » qui est porté conjointement par Besançon, Dijon, Tours et Paris XI. Nous souhaiterions aussi faire une offre complémentaire à ce master. Par ailleurs, nous travaillons sur des diplômes professionnalisants pour former des spécialistes de la transplantation. De même, dans le milieu paramédical, nous voulons mettre en place des formations pour les infirmiers, aide-soignants, kinésithérapeutes… qui travaillent au contact des patients transplantés afin qu’ils connaissent et comprennent les spécificités de ces patients et qu’ils deviennent eux-mêmes des spécialistes de la prise en charge des patients transplantés. Ce genre de formation n’existe pas en France pour le moment. Un autre projet est déjà en cours afin que les chirurgiens-transplanteurs puissent s’entraîner sur un simulateur ou sur des animaux avant de pratiquer chez des patients.

Votre FHU est-elle la seule concernant la transplantation en France ?
Oui. Il existe des projets concernant les maladies hépatiques y compris la transplantation hépatique, mais pas de projet centré sur la transplantation. Notre originalité est de considérer la transplantation comme un sujet propre de soin, d’enseignement et de recherche quel que soit le type d’organe.

Contact : Pierre Marquet