Le projet


CONTEXTE, POSITIONNEMENT ET OBJECTIF DE LA PROPOSITION DETAILLEE

Ce projet se positionne sur l’axe 3.7.1.1 « Formation et éducation » (3.7 – Société de l’information et de la communication) de la composante « Grands Défis Sociétaux » pour sa valence vers la formation au numérique et à l’informatique « dès le plus jeune âge, et le développement d’une culture numérique chez les enseignants ». Entre autre, le projet DALIE portera une réflexion sur l’évolution des contenus d’enseignement et d’apprentissages de l’école primaire dans un contexte social et technique en très forte évolution.

L’axe secondaire 3.8.3 « Education et apprentissages » (3.8 – Sociétés innovantes, intégrantes et adaptatives) a aussi été retenu pour cette proposition. Cet axe se positionne, entre autres, sur les enjeux liés au décrochage scolaire. Les littératures pédagogique et scientifique ont déjà montré l’intérêt de l’activité technologique, informatique ou algorithmique pour aider les élèves en difficultés scolaires à reprendre le chemin des apprentissages. Les technologies informatisées offrent de nouvelles opportunités de remédiation qu’il convient toujours d’explorer.

D’une manière générale, dans un contexte d’évolution lente du système éducatif, il nous a semblé important d’expérimenter comment l’informatique en tant qu’objet de connaissance et de culture peut contribuer à l’éducation des jeunes enfants. Il s’agit de positionner dans le champ de l’enseignement obligatoire un domaine – l’informatique – qui est appelé à intégrer, médiatiser ou encore préformer de plus en plus nos pratiques sociales et professionnelles et de valider la pertinence de ce positionnement.

L’enjeu est de proposer des éléments de curriculum pertinents et de tester non seulement comment ils peuvent faire l’objet d’un enseignement et avec quels effets sur les élèves, mais aussi de réfléchir sur les compétences nécessaires chez les enseignants pour les mettre en œuvre.

Nous avons pleinement conscience du fait que l’implémentation réelle d’un curriculum dans des écoles est une entreprise relevant principalement du domaine politique (et non pas simplement scientifique), nécessitant pour aboutir un appui institutionnel fort et un ensemble de négociations avec différents acteurs. Notre ambition est plus modeste : nous visons à tester la faisabilité de solutions dans un contexte expérimental et à diffuser et discuter les résultats obtenus sans nous faire d’illusion sur le devenir institutionnel de notre entreprise.

Notre choix de cadre curriculaire sera inspiré des travaux existants, en particulier à l’étranger. De nombreuses propositions dans le monde ont été élaborées, principalement à l’initiative d’associations d’enseignants ou d’industriels de l’informatique. Sans ignorer ces propositions, nous privilégierons les recherches issues des sciences de l’éducation. Ainsi, une communauté de chercheurs propose un modèle pour analyser les curricula en informatique. Ce cadre n’est pas prescriptif mais constitue une grille de lecture permettant les comparaisons internationales sur laquelle nous pourrons nous appuyer (Hubwieser, 2013). On constate de plus que les réflexions sur la construction d’un curriculum se structurent autour de modèles qu’il conviendra d’évaluer pour questionner leur transfert possible au cas de la France. La Bavière par exemple a choisi  comme idée essentielle le processus fondamental de traitement de l’information. Le curriculum est décliné selon le modèle orienté objet (Hubwieser, 2012), un des paradigmes de la programmation. Il ne s’agit pas d’apprendre aux élèves à programmer à tous les niveaux de classe, mais bien de mettre au cœur du curriculum la capacité à penser les objets sur lesquels on peut agir, les actions que l’on peut ou non leur appliquer, ou leur faire faire. Bref, il s’agit d’aller au-delà de la spécificité des utilisations de telles ou telles applications pour en saisir les fondements informatiques. Le développement de cette pensée doit permettre de s’adapter aux évolutions des technologies numériques. D’autres modèles sont à expliciter. Nous chercherons à conjuguer ce qui relève de la programmation, de la culture informatique et du traitement de données numériques en prenant notamment en compte les travaux effectués dans le cadre de l’approche translittératique.

Dans le cadre de la recherche DALIE, nous projetons d’expérimenter les bases d’un curriculum qui articulerait trois volets de compétences et de savoirs liés à l’informatique : 1. programmation et robotique ; 2. traitement, production et manipulation de données numérisées ; 3. éléments de culture numérique. Le volet 1 se développe sur les trois cycles de l’école primaire (niveaux maternelle et élémentaire), le volet 2 sur les cycles 2 et 3 (niveau élémentaire), le volet 3 sur le cycle 3 (CM1 et CM2). Dans le cadre des expérimentations, nous privilégierons les modalités de type « pédagogie par projet » pour permettre cette articulation. En fin de curriculum, les élèves doivent pouvoir faire des liens entre les 3 volets : comprendre la place de la robotique dans des dispositifs d’ensemble, savoir repérer un bouquet de fonctionnalités dans différentes interfaces, mobiliser les ressources nécessaires pour réaliser un projet, avoir la maîtrise du processus dans la réalisation d’une tâche…

L’informatique, phénomène protéiforme, entretient avec l’institution scolaire une histoire tissée de malentendus et de rendez-vous ratés. Elle est marquée par une sorte de mouvement de balancier entre l’idée qu’il fallait l’enseigner dès l’enseignement obligatoire et celle qu’il était inutile de créer des enseignements nouveaux et par l’établissement d’une sorte d’alternative entre d’un côté une discipline et, de l’autre, un outil ou, au mieux, un ensemble d’outils ne nécessitant guère de formation spécifique.

Un problème souvent relevé est celui de la vitesse d’évolution des environnements informatiques : enseigner simplement leurs usages sans analyser les choix sur lesquels ils reposent et les concepts qu’ils mettent en œuvre se révèle une entreprise désespérée. Les travaux sur les connaissances acquises par les usages des technologies de l’information et de la communication ont montré la pauvreté ou l’absence de conceptualisation chez les utilisateurs. Parmi les dispositifs institutionnels en vigueur, les certifications (B2I et C2I2E), centrées sur l’appropriation de compétences présentent l’inconvénient d’écarter les savoirs en jeu lors des utilisations des technologies informatisées en insistant sur les savoir-faire et les procédures. Les compétences à construire ne trouvent aucune base curriculaire dans les disciplines dispensées au cours de l’enseignement obligatoire.

Depuis quelques années, l’idée que l’informatique est une science méritant enseignement formel s’est répandue, avec la montée d’une prise de conscience que l’algorithmique et la programmation, comme savoir faire-faire, sous leurs différentes formes, sont au cœur de l’informatique.

Cette idée nécessite cependant une déconstruction : la question ne se pose en effet pas de la même manière pour un enseignement en classes préparatoires scientifiques, en section scientifique au lycée, au collège et à l’école primaire.

Un point central, dans cette situation est le rapport à la programmation, ou plutôt aux différentes formes de programmation maintenant très répandues, allant de la mise à jour de fichiers textes ou l’automatisation de procédures dans les tableurs à la programmation de systèmes en temps réel.

Des travaux de didactique de l’informatique ont été menés dans le passé sur ces questions, en particulier de la fin des années 1970 et jusqu’à la fin des années 1990 (Baron & al., 1989 ; AFDI, 1991, 1993, 1996). Un phénomène massif invite à reprendre la question à nouveaux frais : il n’est plus possible d’établir une dichotomie entre novices et experts dans le domaine informatique. Il conviendrait plutôt de considérer un continuum, avec trois séparations plus ou moins floues et dépendant contextuellement du domaine : des utilisateurs naïfs, ne conceptualisant pas les processus en jeu, des utilisateurs éclairés (Collet, 2006) et des professionnels, dont le domaine de compétence est souvent assez étroit : entre webmasters, administrateurs systèmes, certificateurs de programmes en temps réel, par exemple, de nombreuses différences existent. L’enjeu est à la fois de former les enseignants et les élèves à l’appropriation instrumentale des dispositifs techniques en contexte éducatif et de former à un regard critique et instruit sur la nature et les implications de ces dispositifs techniques.

Le champ de l’enseignement primaire fait ici l’objet de notre attention. Notre projet a pour ambition de mieux comprendre comment enseigner les éléments permettant l’émergence d’une « culture informatique » à ce niveau, en tenant compte des contextes d’apprentissages et des curricula, à un moment où l’on ne peut – plus – séparer les usages d’instruments informatisés de l’appropriation de concepts spécifiques.

Quatre grands objectifs sont assignés au projet DALIE. Les deux premiers relèvent de production de nouvelles connaissances et les deux autres sont relatifs à la diffusion des résultats dans le milieu des praticiens de l’enseignement primaire et des prescripteurs que sont les inspecteurs de l’éducation nationale.

–        Faire le point sur les représentations que les enseignants, les élèves ont de l’informatique. Voir s’il y a évolution des représentations de l’informatique des enseignants et des élèves suite à l’expérimentation : enseignement du type pédagogie par projet. Si c’est le cas, la mettre en évidence.

–        Faire le point sur les représentations que les étudiants se préparant à l’enseignement primaire  et leurs formateurs se font de la place à donner aux technologies informatisées à l’école.

–        Produire des résultats de recherche en didactique de l’informatique à l’école primaire, en tenant compte des contraintes des curricula actuels, pour les classes d’écoles maternelles et élémentaires, de l’évolution des technologies et des capacités des apprenants.

–        Relancer l’intérêt des chercheurs, des politiques via la diffusion large des résultats de ces travaux, de fédérer des équipes dispersées, d’assurer la visibilité de ces travaux dans les colloques internationaux, etc.

–        Contribuer à l’amélioration des dispositifs de formation en informatique dans l’enseignement supérieur à destination des maîtres, par une meilleure connaissance des processus d’apprentissage et d’appropriation (construire un certain nombre de représentations adaptées et opératoires concernant l’informatique, savoir décrire et contextualiser le dispositif utilisé, apprendre à programmer en faisant faire à une machine…).

L’informatique, phénomène protéiforme, entretient avec l’institution scolaire une histoire tissée de malentendus et de rendez-vous ratés. Elle est marquée par une sorte de mouvement de balancier entre l’idée qu’il fallait l’enseigner dès l’enseignement obligatoire et celle qu’il était inutile de créer des enseignements nouveaux et par l’établissement d’une sorte d’alternative entre d’un côté une discipline et, de l’autre, un outil ou, au mieux, un ensemble d’outils ne nécessitant guère de formation spécifique.

Un problème souvent relevé est celui de la vitesse d’évolution des environnements informatiques : enseigner simplement leurs usages sans analyser les choix sur lesquels ils reposent et les concepts qu’ils mettent en œuvre se révèle une entreprise désespérée. Les travaux sur les connaissances acquises par les usages des technologies de l’information et de la communication ont montré la pauvreté ou l’absence de conceptualisation chez les utilisateurs. Parmi les dispositifs institutionnels en vigueur, les certifications (B2I et C2I2E), centrées sur l’appropriation de compétences présentent l’inconvénient d’écarter les savoirs en jeu lors des utilisations des technologies informatisées en insistant sur les savoir-faire et les procédures. Les compétences à construire ne trouvent aucune base curriculaire dans les disciplines dispensées au cours de l’enseignement obligatoire.

Depuis quelques années, l’idée que l’informatique est une science méritant enseignement formel s’est répandue, avec la montée d’une prise de conscience que l’algorithmique et la programmation, comme savoir faire-faire, sous leurs différentes formes, sont au cœur de l’informatique.

Cette idée nécessite cependant une déconstruction : la question ne se pose en effet pas de la même manière pour un enseignement en classes préparatoires scientifiques, en section scientifique au lycée, au collège et à l’école primaire.

Un point central, dans cette situation est le rapport à la programmation, ou plutôt aux différentes formes de programmation maintenant très répandues, allant de la mise à jour de fichiers textes ou l’automatisation de procédures dans les tableurs à la programmation de systèmes en temps réel.

Des travaux de didactique de l’informatique ont été menés dans le passé sur ces questions, en particulier de la fin des années 1970 et jusqu’à la fin des années 1990 (Baron & al., 1989 ; AFDI, 1991, 1993, 1996). Un phénomène massif invite à reprendre la question à nouveaux frais : il n’est plus possible d’établir une dichotomie entre novices et experts dans le domaine informatique. Il conviendrait plutôt de considérer un continuum, avec trois séparations plus ou moins floues et dépendant contextuellement du domaine : des utilisateurs naïfs, ne conceptualisant pas les processus en jeu, des utilisateurs éclairés (Collet, 2006) et des professionnels, dont le domaine de compétence est souvent assez étroit : entre webmasters, administrateurs systèmes, certificateurs de programmes en temps réel, par exemple, de nombreuses différences existent. L’enjeu est à la fois de former les enseignants et les élèves à l’appropriation instrumentale des dispositifs techniques en contexte éducatif et de former à un regard critique et instruit sur la nature et les implications de ces dispositifs techniques.

Le champ de l’enseignement primaire fait ici l’objet de notre attention. Notre projet a pour ambition de mieux comprendre comment enseigner les éléments permettant l’émergence d’une « culture informatique » à ce niveau, en tenant compte des contextes d’apprentissages et des curricula, à un moment où l’on ne peut – plus – séparer les usages d’instruments informatisés de l’appropriation de concepts spécifiques.

 

Les verrous identifiés portent à la fois : (1) sur l’état de la recherche du champ, éclatée, peu visible et en bute à certaines représentations sociales sur le statut des TIC dans les pratiques scolaires ; (2) sur l’accès aux terrains de recherche, aux écoles et aux classes ; (3) sur certains points méthodologiques et pratiques à prendre en compte pour la mise en œuvre d’activités informatiques en classe.

Le champ de la didactique de l’informatique mène une existence discrète mais indéniable, comme en témoignent la série de productions et colloques scientifiques qui lui sont et lui ont été consacrés. Au début des années 2000, devant le phénomène puissant de la diffusion de logiciels disposant de fonctionnalités de description et de manipulation de données, la communauté s’est recentrée sur les enjeux didactiques des progiciels (André & al., 2004 ; Pochon & al., 2006 ; Baron & al., 2009 ; Baron & al., 2011). Ce champ comporte une dimension francophone importante.

Nous constituons un collectif de chercheurs ayant des thématiques de recherches connexes, que nous souhaitons faire converger au sein du projet DALIE. Nos pratiques de recherches nous ont conduits à ouvrir des terrains d’exploration dans les écoles et rendent possibles l’accès à des classes, volontaires pour participer au projet DALIE. Dans cette optique, nous entretenons des partenariats avec les Rectorats, les DASEN et les ESPÉ.

Nous n’opposons pas la science informatique aux technologies de l’information et de la communication (TIC) mais prenons acte d’un continuum entre novices et experts, les frontières se brouillant de plus en plus (participation, création, expression, modification, etc.). L’idée est donc de ne pas considérer qu’il y aurait des savoir-faire « justes suffisants » pour en faire correctement en classe, mais que nous sommes tous inscrits dans un processus d’évolutions instrumentales, et que nous sommes tous appelés à devoir développer des connaissances nécessaires pour interpréter le fonctionnement d’environnements numériques en permanente évolution et pour les adapter à des besoins particuliers.

Notre projet repose sur l’idée que la mise en œuvre d’enseignements opérant principalement par projets est de nature à favoriser la transmission de concepts et de méthodes fondant une éducation à l’informatique pour tous, de la maternelle à des jeunes adultes, utilisateurs avancés des technologies de l’information et de la communication, pourvu que l’intervention enseignante permette d’aller au-delà de la simple résolution de problèmes ou du tâtonnement expérimental et visant à faire s’approprier des concepts.

˗    Élaboration de curricula pour les classes primaires (les particularités de cette culture seront caractérisées, les complémentarités et les redondances avec d’autres cadres disciplinaires seront étudiées).

˗    Conceptualisation d’un prototype pour la pratique pédagogique de l’informatique à l’école, avec un module auteur dédié à l’enseignant pour la production de situations-problèmes.

˗    Formalisation de choix d’activités pédagogiques en direction des élèves de l’école primaire.

˗    Propositions de contenus en direction de la formation des étudiants des masters MEEF « métiers de l’enseignement ».

˗    A travers la création d’un réseau, fédérer les travaux de recherche sur la place que peuvent prendre les technologies informatisées dans l’enseignement obligatoire, notamment au niveau de l’école primaire.

˗    Production d’un livre d’interface à destination des enseignants (sera soumis au Scérén/CNDP) et de fiches pédagogiques.

˗    Valorisation des travaux : colloques, séminaires, publications… et production d’un ouvrage scientifique issu de ces travaux et du colloque éTIC 2.

˗    Production d’un livre blanc sur la place et les modalités possibles d’un apprentissage d’éléments informatiques à l’école primaire à destination des acteurs de l’éducation.

Elle est bien loin l’année 1970, ce moment pivot de l’entrée de l’informatique dans le champ éducatif, qui a notamment vu le déroulement à Amsterdam de la première conférence mondiale Ordinateurs et éducation (WCCE). C’est à ce dernier colloque qu’a été pour la première fois énoncée une alternative qui va avoir un certain succès : il est nécessaire que les enfants apprennent à programmer, plutôt qu’ils se fassent programmer par l’ordinateur (Papert, 1970). On est à l’époque dans le cadre d’une alternative simpliste, dont le second terme, énoncé pour effrayer, fait explicitement référence aux théories behavioristes de l’enseignement programmé.

À vrai dire, cette alternative a d’abord eu très peu d’écho en France, où les politiques publiques de l’époque portaient surtout sur le niveau lycée. La taille et le coût des ordinateurs rendaient irréaliste toute solution concernant l’école primaire (Baron, 1989). C’est une dizaine d’années plus tard que l’intérêt pour l’informatique dans l’enseignement primaire se développera, avec le succès de l’ouvrage de S. Papert Mindstorms : children, computers, and powerful ideas (1980), traduit en français dès 1981 (Jaillissement de l’esprit : ordinateurs et apprentissages). Cet ouvrage sera un puissant promoteur de l’approche LOGO, dont des expérimentations limitées montreront l’intérêt pédagogique (Robert, 1985).

Il est donc logique que l’approche LOGO ait été promue par le plan informatique pour tous (IPT) de 1985, première politique nationale à s’intéresser à l’enseignement primaire. Mais cet engouement se heurtera assez vite à une réalité qui résiste. Selon un schéma très classique (Cuban, 1986), l’innovation se révèle moins belle que prévu. Elle demande, de la part des enseignants, une compréhension de l’informatique que peinent à leur donner des politiques de formation fondées sur des sessions courtes. Alors qu’un corps d’enseignants « experts » avait été spécifiquement créé pour accompagner ce plan dans les années 1980, leur mission d’accompagnement à l’innovation, s’est rapidement vidée de son sens premier pour promouvoir un discours essentiellement orienté « usage des outils » et promotion de dispositifs prescrits (Villemonteix, 2011).

De plus, la roue tourne et les politiques ministérielles se fixent sur l’outil informatique, puis, dans les années 2000, sur un ensemble de compétences listées dans le brevet informatique et internet (B2i), qui nie la nécessité de mettre en place un curriculum et ne considère rien qui soit relié à l’algorithmique et à la programmation.

La grande idée du début de la décennie 2000 est que les jeunes seraient désormais des « indigènes du numérique » (Prensky, 2001a, 2001b) qui n’auraient pas besoin de formations spécifiques à l’égard de technologies désormais « usuelles ». Dans leur état de question de 2009, Baron et Bruillard ont argumenté sur le fait que, au-delà de la posture de consommateur de ressources, « l’acquisition » d’une compétence critique à l’égard des technologies suppose la conceptualisation d’un certain nombre de réalités et de notions liées à l’exécution de processus se déroulant derrière un écran. Cette conceptualisation peut être acquise au sein de la famille quand cette dernière a le capital culturel nécessaire à la transmission aux jeunes. Mais, comme le suggère Fluckiger dans son étude sur des enfants de collège, bien souvent cette transmission ne s’effectue pas et les jeunes ne savent pas nommer ce qui advient. Il revient alors au collège (les professeurs de technologie) d’assurer cette transmission nécessaire (Fluckiger, 2007). À l’école primaire, les résultats vont dans le même sens : sans action pédagogique spécifique, les jeunes restent démunis en termes de conceptualisation (Giannoula & Baron, 2002). Ils ont besoin d’une éducation, qui peut venir soit du système scolaire (Holo, 2005), soit plutôt des parents (Holo, 2008). Du coup le système éducatif, surtout dans son segment obligatoire, a une responsabilité particulière à assumer.

La mise en œuvre de cette idée, jusqu’à présent, a buté sur des instructions officielles remarquablement stables continuant à nier que l’informatique puisse être enseignée comme matière particulière au primaire.

Tout récemment, notamment à l’initiative de l’Académie des sciences, s’est manifesté un intérêt pour la mise en place de curricula d’informatique dès le niveau primaire,[1] comme cela est le cas dans d’autres pays comme le Royaume-Uni (Royal Society, 2012).

Au cours du temps, l’offre de systèmes de programmation a sensiblement évolué. De nouveaux environnements destinés à être pris en main par des enfants sont apparus. En particulier, dans les années 2000 s’est diffusée une sorte de descendant spirituel de Logo : SCRATCH. Ce langage, élaboré au sein du Massachusetts Institute of Technology, est fondé sur le langage Smalltalk (Resnick & al., 2009). Le système est conçu pour permettre les essais et erreurs : il ne suppose pas qu’on ait d’abord écrit un algorithme puis qu’on le code. Au contraire, on peut littéralement jouer avec des situations, modifier des paramètres à la volée, bricoler en somme. Cette approche favorisant le tâtonnement expérimental, comme disait C. Freinet, est adaptée à de jeunes enfants (Wilson & Moffat, 2010).

Des recherches se sont poursuivies sur la question de la didactique de l’informatique, donnant lieu à publications argumentant l’intérêt de l’apprentissage d’une pensée informatique dès l’école maternelle. Cela s’est manifesté dès les années 1990 dans le domaine de la robotique pédagogique, avec l’expérience de « l’enfant-robot » prenant appui sur l’expérience psychomotrice de l’enfant (Greff, 1998), jusqu’à récemment avec l’utilisation de jouets programmables, assurant une médiation puissante, compte tenu de leur caractère anthropomorphique (Komis & Misirli, 2011).

Les attitudes, croyances et représentations sociales des élèves envers l’informatique sont le plus souvent analysées pour tenter de comprendre les freins ou les facteurs favorisant le désintérêt ou l’intérêt pour cette science et cette technologie, et à terme une carrière professionnelle dans ce domaine (Palaigeorgiou & al., 2005 ; Forssen & al 2011 ; Heersink & Moskal, 2010). Les populations étudiées dans ce cas sont des élèves de lycée ou des étudiants. L’idée sous-jacente dans ces recherches est souvent de tenter de comprendre pourquoi il n’y a pas plus d’étudiantes dans les filières de formation dédiées à l’informatique. Les facteurs recensés dans la littérature sont la confiance qu’ont les élèves/étudiants dans leur propre capacité à développer des compétences en informatique, l’intérêt pour l’informatique, leur perception de l’informatique comme un champ masculin, l’utilité, c’est-à-dire leur croyance dans l’utilité de l’apprentissage de l’informatique et enfin les représentations des élèves/étudiants sur les professionnels de l’informatique. Ces facteurs détermineraient leur intention de s’engager plus avant dans l’apprentissage de l’informatique. Différents instruments de mesure (enquêtes) ont été ainsi créés. Ils ne seront pas directement utilisables dans notre projet car ni les objectifs, ni les publics visés ne sont les mêmes. Cependant, l’analyse des méthodologies et des techniques mises en œuvre sera menée afin de construire nos propres instruments de mesure, adaptés à de jeunes publics.

Mais les représentations ne sont pas uniquement des représentations sociales, elles peuvent aussi être des représentations mentales concernant par exemple le fonctionnement de l’ordinateur (Komis, 1994), de tel ou tel logiciel ou application (les moteurs de recherche : Drot-Delange, 2011). Une revue de littérature sur cette question permettra de recenser les méthodes et les instruments de mesure que nous pourrions mettre en œuvre au sein de DALIE.

[1] L’enseignement de l’informatique. Il est urgent de ne plus attendre. Rapport de l’Académie des sciences, mai 2013.

[En ligne] http://www.academie-sciences.fr/activite/ rapport/rads_0513.pdf