Masse musculaire et qualités sensorielles de la viande
Les objectifs de nos recherches visent à mieux comprendre le contrôle génétique et/ou épigénétique de l’homéostasie de la masse musculaire pour une meilleure maitrise de la production quantitative et qualitative de la viande bovine. Pour atteindre ces objectifs, nos travaux allant d’une stratégie de criblage de gènes/QTL à des analyses fonctionnelles de gènes d’intérêt se focalisent particulièrement sur trois points :
Afin de mieux comprendre le déterminisme génétique des caractères liés au développement musculaire et aux qualités de la viande dans les races françaises de bovins allaitants, nous avons très récemment analysé les données du projet Qualvigène comportant les phénotypes de 24 caractères et les génotypes de 37000 marqueurs SNP pour 1290 animaux en race limousine, 1162 en race charolaise et 977 en race blonde d’Aquitaine. Une analyse d’association par la méthode BayesC a permis d’identifier 720 QTLs robustes impliqués dans 13 caractères dans les trois races. L’identification du statut hétérozygote des reproducteurs aux QTLs a permis d’en sélectionner 24. Le séquençage complet du génome de ces animaux est en cours et devrait permettre l’identification de mutations causales et/ou de marqueurs utilisables en sélection. L’identification de nouveaux gènes impliqués dans le développement musculaire a été entreprise par la mise en place d’un crible fonctionnel dans un modèle cellulaire en utilisant la technologie d’ARN interférence. L’analyse de l’extinction d’une centaine de gènes montre que 70% de ces gènes seraient impliqués dans le développement musculaire. L’étude des orthologues bovins des gènes murins ainsi identifiés est menée selon une approche innovante qui consiste à analyser le polymorphisme et la variation de l’expression de ces gènes chez des animaux de phénotypes extrêmes afin d’identifier des mutations ou des épimutations causales au sein des QTLs liés à la masse musculair.e
La myostatine (Gdf8) joue un rôle primordial dans le contrôle de la croissance musculaire en inhibant à la fois la prolifération et la différenciation des myoblastes. L’inhibition exercée par la myostatine est telle qu’elle est dépendante d’une régulation physiologique très fine, majoritairement effectuée par ses inhibiteurs tels que son propeptide, la follistatine ou les protéines Gasp. Nos travaux, basés sur la création et la caractérisation de lignées mutantes de souris, se focalisent sur l’étude fonctionnelle des gènes Gasp-1 et Gasp-2 dans le développement squeletto-musculaire ainsi que de gènes modificateurs du phénotype Gdf8. Nous avons montré que Gasp1 constitue un inhibiteur particulier de la myostatine, avec une action indépendante de la voie canonique de la myostatine (Monestier et al., 2012a, 2012b, Brun et al., 2012, Brun et al., soumis). Les mêmes études sont réalisées pour le gène Gasp-2. L’identification d’un modificateur de la myostatine est en cours par la caractérisation phénotypique et moléculaire d’une lignée de souris ENU présentant un fort développement musculaire.
Certaines races bovines notamment la race blonde d’Aquitaine présentent un fort développement musculaire sans qu’aucune mutation perte de fonction du gène de la myostatine ne soit observée. Nous avons entrepris une étude fine du gène GDF8 pour identifier d’éventuelles mutations introniques qui engendrent des transcrits aberrants qui échapperaient aux mécanismes de surveillance cellulaire. Nous avons identifié un allèle ‘leaky’ du gène GDF8 qui engendre la production d’un transcrit aberrant et stable conduisant à la production d’une protéine tronquée inactive. Cette mutation fondatrice est associée à une variabilité post-transcriptionnelle et phénotypique des animaux chez la race bovine Blonde d’Aquitaine. C’est une mutation inédite dans la mesure où elle permet une production de viande de qualité et économiquement rentable tout en évitant une hypertrophie excessive pour le bien être de l’animal. Par ailleurs, le séquençage à haut débit de l’ensemble des miRNA musculaires chez la Blonde d’Aquitaine a été réalisé. L’exploitation fonctionnelle de ces miRNA est en cours.
Nous avons concentré nos efforts sur l’étude des protéines de la famille serpine A3 bovine. Nous avons ainsi pu contribuer à la compréhension du mode d’action de deux d’entre elles, bovSERPINA3-3 et bovSERPINA3-7. Les études structure / fonction in vitro réalisées sur la protéine bovSERPINA3-3, purifiée du muscle squelettique bovin ou recombinante, nous ont permis de mettre en évidence son activité anti-caspases 3, une protéase à cystéine impliquée dans les phénomènes apoptotiques qui surviennent après la mort de l’animal, confortant ainsi son rôle dans le processus de maturation post-mortem. La modification, par mutagenèse dirigée, de plusieurs résidus proches du site catalytique nous ont également permis de démontrer l’implication de l’aspartate D371 dans le phénomène d’homodimérisation de cette protéine, ce qui nous a conduit à proposer également un modèle structural du dimère. Contrairement à bovSERPINA3-3, l’étude structure / fonction réalisée sur bovSERPINA3-7 indique que celle-ci ne présente pas d’inhibition croisée vis-à-vis des caspases. La production et l’utilisation d’un anticorps polyclonal dirigé spécifiquement contre cette anti-protéase, nous ont permis de localiser, par immunohistochimie, cette protéine au niveau de la strie M du sarcomère, localisation jamais décrite pour une serpine.
Responsable d’équipe : Véronique BLANQUET
Enseignants Chercheurs : Anne BLONDEAU DA SILVA, Khaled BOUHOUCH, Laure BREMAUD, Didier DELOURME, Fabrice DUPUY, Laëtitia MAGNOL, Ahmad OULMOUDEN, Patrick PELISSIER
Doctorants : Jessica BAMBA, Carole EL HAKAM, Victor GONDRAN-TELLIER, Luce PERIE