Amateurs de théâtre

Alain Rouhaud

Texte

Extrait de « Le temps de la fête », dans le Bulletin municipal de la commune de Bazoges-en-Pareds, année 2014, pages 34 à 52.

https://bazoges-en-pareds.fr/fr/rb/83007/articles-historiques

Très difficiles à dater précisément et encore plus à identifier, ces précieuses images 1 de divertissement de la jeunesse montrent des Bazogeais nés entre 1914 et 1920. La photographie de studio qui met en scène la bande de copains assis autour d’une table mimant le boire et le manger serait à dater du début des années 1930 et celles des militaires serait plus tardive… Filles et garçons présentaient alors leurs pièces séparément puisque la mixité ne fut pas tolérée au théâtre avant le début des années 19502.

1. Théâtre, Bazoges-en-Pareds, vers 1930, studio Châtaigner

1. Théâtre, Bazoges-en-Pareds, vers 1930, studio Châtaigner

2. Théâtre, Bazoges-en-Pareds, vers 1930, studio Châtaigner

2. Théâtre, Bazoges-en-Pareds, vers 1930, studio Châtaigner

On a reconnu les frères Louis et André Thomas, Jean et Michel Châtaigner, René Philippeau (père), Joseph Pelloquin (fils), André Brivet, Georges Chauvet, Jean Raingeaud, chez les garçons et chez les filles : Madeleine Thomas, Mélanie Marchand, Philomène Hucteau, Aurélie Frouin, Suzanne Châtaigner…3.

3. Théâtre, Bazoges-en-Pareds, vers 1930, studio Châtaigner

3. Théâtre, Bazoges-en-Pareds, vers 1930, studio Châtaigner

Les frères André et Louis Thomas, en particulier, ont pu développer leurs talents d’acteurs. Tous deux charrons dans le bourg de Bazoges4, ils étaient des animateurs très drôles sur les planches du patronage d’après le souvenir ému qu’ils ont laissé.

Comme partout en Vendée depuis le début du siècle, on joue à Bazoges dans le cadre du patronage. Les séances sont composées de mélodrames mais aussi de petites comédies. Dans l’immédiat après-guerre, sous l’égide de la cure, la troupe du patronage monta une adaptation de La Terre qui meurt, un ouvrage à succès de René Bazin5. Aux entractes de cette pièce sérieuse, les deux frères Thomas animaient l’assemblée de sketches gais et de jeux de mots tout en finesse. La musique aussi était conviée puisqu’on se rappelle que Joseph Pelloquin jouait du violon à l’entracte des théâtres.

Les théâtres du patronage évoluèrent grâce à une véritable troupe paroissiale qui connut un certain succès dans les années 1960 puisqu’elle se produisit dans les communes alentour comme à Saint-Pierre-du-chemin et à Saint-Vincent-Sterlanges. Sur des pièces choisies par monsieur le curé, Biteau puis Poyer6, la troupe était menée par André Blézeau à la mise en scène. Il reste difficile de trouver des documents d’archives concernant cette culture populaire mais les témoignages recueillis redonnent toute la vie et l’énergie de ces fêtes d’hiver qui rassemblaient les Bazogeais au patronage 7.

4. Troupe du patronage, pièce J'y suis j'y reste, Ouest-France, 1968

4. Troupe du patronage, pièce J'y suis j'y reste, Ouest-France, 1968

Parmi les quelques dix pièces données entre 1966 et le milieu des années 1970, il faut citer La roulotte aux sortilèges, La maison de L’aiguilleur et surtout J’y suis j’y reste, en 1968. Sur la photo de presse de l’époque8, on peut reconnaître malgré leur maquillage, de gauche à droite André Blézeau, Jean-Pierre Brivet, Francine Ferchaud, Jeanne-Marie Raingeaud et François Patarin, et assis, Marthe Alland, Paul Portrait et Madeleine Philippeau. On voit à peu près les mêmes sur la photo9 qui rassemble les personnages dans La maison de l’aiguilleur, l’année précédente en 1967.

5. Troupe du patronage, pièce La maison de l'aiguilleur, 1967

5. Troupe du patronage, pièce La maison de l'aiguilleur, 1967

Pour encadrer les activités d’une jeunesse de plus en plus nombreuse et exigeante dans ces années des « Trente Glorieuses », un foyer des jeunes ne tarda pas à voir le jour, toujours dans le cadre paroissial et sous la houlette de François Patarin, en 1967. Là encore, c’est une autre histoire… à raconter…

Malgré la concurrence de la télévision, le théâtre amateur resta toujours vivant jusque dans les années 1980 et en 2003, une nouvelle jeune troupe céda à la nostalgie de ces années théâtre et rejoua J’y suis j’y reste, le succès des années 1960. Cependant, ces « Gais de la loge » ne se sont pas essoufflés et poursuivent leur bel élan théâtral depuis dix ans, à la suite du théâtre de patronage mais dans des locaux mieux chauffés.

Dès 1946, stimulée par le succès de la troupe privée, l’école laïque menée par de dynamiques jeunes enseignants dont Renée Pineau Soulard, avait pris le pas de ceux d’en face et avait décidé de créer son théâtre. Ainsi, une pièce sérieuse et une pièce comique furent montées avec succès. Sur la belle photographie10 des acteurs de la pièce comique Le tampon du capiston, on reconnaîtra de gauche à droite monsieur Garnier : instituteur, René Pineau Soulard : institutrice, Roger Bely, Jeannine Bely, Maurice Vincent, Jacqueline Hucteau, Marcel Calandreau, François Baudry, Yves Jurion (réfugié des Ardennes), Marc Bibard et Roger Poupin, tous amateurs de théâtre.

6. Troupe de l'école laïque, Le Tampon du capiston, 1946

6. Troupe de l'école laïque, Le Tampon du capiston, 1946

Petits et grands aimaient se déguiser et faire la fête. On les voit dans ce cortège de mariage d’enfants, autour de Jean-Claude Guérin, Bernadette Baudry, René Philippeau, Jeannette Châtaigner et les autres qui restent à identifier… On le sent aussi lors de cette kermesse d’école, vers 1945. Trois Bretons11 amusent et animent la fête : André Thomas au centre accompagné de Marceline Bluteau et de Joseph Pelloquin, instituteur de l’école libre de garçons qui porte sous le bras son violon et à la main son archet.

7. Trois Bretons à la kermesse des écoles privées, vers 1945

7. Trois Bretons à la kermesse des écoles privées, vers 1945

Les kermesses permettaient d’aider financièrement les écoles mais étaient aussi des occasions de s’amuser et de se retrouver dans les prairies du bourg, d’abord au doué, en bas des Ouches aussi puis le long du Loing.

On les avait croisés lors des noces vendéennes et on les a vus cet été sous les murs du donjon : manants, travailleurs et blagueurs : ils sont toujours de la fête. Cela rappelle combien le bénévolat était important pour la fête et le reste toujours aujourd’hui !

8. Défilé de la noce des enfants, kermesse des écoles privées, cliché studio Boitrel, 1947.

8. Défilé de la noce des enfants, kermesse des écoles privées, cliché studio Boitrel, 1947.

9. Parents et bénévoles devant un stand de kermesse, vers 1945

9. Parents et bénévoles devant un stand de kermesse, vers 1945

Comme tous les ans ce sont les Bazogeais de Bazoges et d’ailleurs qu’il faut remercier pour cette chronique. Après le thème de la résistance et de la déportation qu’inspira l’histoire de Pierre Tisseau et des protestants de Bazoges, madame Counathe Tisseau me suggéra d’écrire sur un sujet plus léger. Elle a eu raison. La fête permet de sortir de sa souffrance ne serait-ce qu’un moment, et d’aller à la rencontre des autres... Madame Soulard Pineau garde des souvenirs précis des joyeuses fêtes bazogeaises. Merci à elle d’avoir lancé l’idée et de m’encourager à écrire.

Merci beaucoup à Joseline Baudry Belaud, Joseph et Mamate Alland, Francine Ferchaud, Jacky et Chantal Bridonneau, Jacqueline Belaud Bobot, Louisette et Michèle Belaud et André Orion dans le bon souvenir des moments à partager ensemble la mémoire de Bazoges, à partir des photographies prêtées et commentées. Merci aussi à Laurent Raingeaud, Jeannette Calandreau, Françoise Linyer, Jeanne-Marie Rouhaud, Titi Blézeau, Jacques et Thérèse Bordron pour les photographies prêtées et commentées lors de nos échanges.

Merci à Geneviève Linyer et à Jean-Louis Bobot pour leur travail de collecte d’images depuis des années. Merci aussi à Marguerite Chevreau, Jérôme Avril, Jeanne Thomas, Claude Thomas, Paul et Jeannine Frouin, pour leur aide.Merci enfin à Sylvie Alland et Virginie Evrard pour leur soutien dans la réalisation de cette chronique. Les notes de bas de pages permettent souvent d’aller plus loin, de citer nos sources et de lancer des pistes.

Rappelons quelques références bibliographiques importantes : Coutumes en Vendée, 1 et 2, « La Boulite collection », Editions union Pour la Culture Populaire en Poitou-Charentes Vendée./ Geste Paysanne, ouvrage collectif.

Faire sa jeunesse en Vendée dans le canton de la Châtaigneraie, Hérault-Editions, 1988, par Christian Hongrois

« L’enquête orale d’Edmond Bocquier Ethnographie, « Tradition(s) » et « folklore » : en Vendée, où en est-on ? », par Jean-Loïc Le Quellec, La Vendée Histoire d’un siècle 1900-2000, Recherches vendéennes, Annuaire de la Société d’Emulation de la Vendée et revue du Centre vendéen de recherches historiques, n° 6, 1999, page 73.

« 1951, la mixité est tolérée sur scène Le théâtre en Vendée », par Claude Mercier, La Vendée Histoire d’un siècle 1900-2000, Recherches vendéennes, Annuaire de la Société d’Emulation de la Vendée et revue du Centre vendéen de recherches historiques, n° 6, 1999, page 73.

Alain Rouhaud, décembre 2013