La radio-immunologie pour lutter contre le cancer

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Le projet CARAT – Consortium pour des Applications en Radio Alpha Thérapie a pour objectif de développer une filière française de production de plomb 212 et de traitements utilisant ce métal pour guérir certains cancers.
A Limoges, Michel Cogné – Directeur du laboratoire Contrôle de la Réponse Immune B et des Lymphoproliférations (CRIBL) participe à ce projet d’envergure – chiffré à près de 20 millions d’euros.
Le projet est conduit par Areva Med et regroupe des PME françaises (Eveon et Triskem International) et un autre laboratoire labellisé par le CNRS (Subatech).

Quel est ce projet ?
C’est un projet de partenariat industriel qui porte sur le dopage d’anticorps thérapeutiques. Les anticorps sont des cellules produites par l’organisme. Ils nous protègent contre les microbes mais aussi contre les cellules tumorales. Ces anticorps naturels sont très intéressants. Ils sont de plus en plus utilisés sous forme de médicaments pour soigner les cancers contre lesquels ils sont particulièrement efficaces. Comme dans tout traitement, il y a des résistances. Certaines cellules tumorales se défendent. Nous essayons de doper ces anticorps pour en faire des armes plus puissantes. Ce projet porte donc sur de la radio-immunothérapie. Nous cherchons à soigner avec des anticorps radio marqués. Nos cibles de cancers sont ceux du sang, de la moëlle osseuse et des ganglions – lymphomes et myélomes en particulier.

Comment ces anticorps radio marqués vont-ils agir ?
Les anticorps vont être équipés de radionucléides – dans notre cas le plomb 212. Ils cibleront la cellule cancéreuse et la détruiront en s’y fixant. Ces radionucléides sont très puissants. Ils ont l’avantage d’avoir une portée et une durée de vie très courtes. Ils peuvent détruire une cellule en limitant les dommages aux cellules saines avoisinantes. Leur toxicité – pour l’individu comme pour l’environnement – est aussi la plus réduite possible.

De quelle façon allez-vous contribuer à ce projet ?
Ce projet se situe parfaitement dans le savoir-faire de notre laboratoire. Nous menons la phase d’essais précliniques sur plusieurs pathologies pendant une durée de 3 ans. Nous espérons que cela marchera bien pour pouvoir enchaîner avec les essais cliniques. Nous travaillons avec le service de médecine nucléaire du CHU de Limoges qui apportera son expertise clinique et pratique ainsi que son savoir-faire en termes de radio marquage. Areva Med – initiateur du projet – nous fournit en radionucléides dont il maîtrise parfaitement la production. Ce projet nous a aussi conduit à créer une cellule de transfert technologique et à recruter une personne qui gèrera ce contrat, entre autres.

En quoi est-ce novateur ?
La radio-immunothérapie bêta existe déjà pour traiter certains cancers mais engendre beaucoup d’effets secondaires. Ces traitements sont très énergétiques et détruisent les cellules situées autour de la cellule cancéreuse. Les patients n’ont alors plus de globules rouges, ni de globules blancs, ni de plaquettes. L’avantage de notre approche – dite de radio-immunothérapie alpha – est que la distance de propagation des anticorps armés de ces radionucléides est très courte.

Quel est l’objectif final ?
L’objectif est de proposer un produit clé en main – sous forme de kit – à un pharmacien hospitalier. Il n’aura qu’à constituer son anticorps marqué grâce aux différents produits et l’injecter au patient. La commercialisation de ce kit est prévue dans les 5 à 10 ans à venir. L’idéal serait aussi que ce traitement soit applicable au plus grand nombre de cancers.

Y-a-t-il d’autres travaux de la sorte ?
Un nombre croissant d’acteurs s’intéresse à la radio-immunothérapie alpha mais le plomb 212 n’est pas le seul radionucléide possible. En revanche, il y a de nombreux d’arguments techniques qui laissent à penser qu’il pourra être plus adapté (stabilité, durée de vie, disponibilité…). Les essais avec le plomb 212 que nous réaliserons seront uniques en France.
Ce projet vise aussi à développer une filière française d’excellence en médecine nucléaire.
Le marché des anticorps thérapeutiques est en très forte expansion. Ils sont naturels, efficaces et engendrent peu d’effets secondaires. L’immunologie française est bien positionnée et la France dispose d’une réelle expertise dans le nucléaire. Il y a donc une vraie place à prendre en matière de radio-immunothérapie.

Contact : Michel Cogné

> Article sur le site de l’Université de Limoges
> Dossier de presse
> Reportage TF1 du 6 septembre 2015 : « Le plomb 212, le plus prometteur des traitements du cancer »