F. Louradour


SYNTHESE DES
ACTIVITES DE RECHERCHE
(décembre 2000)

    Mes activités sont principalement relatives aux domaines suivants : génération et caractérisation d'impulsions lumineuses brèves ; étude de leur propagation non linéaire dans des matériaux volumiques et dans des guides d'ondes. Mes compétences sont de nature très majoritairement expérimentale.

    L'ensemble de mon travail de recherche s'est déroulé à Limoges au sein de l'équipe de recherche en optique initialement dirigée par Claude FROEHLY et dont Alain BARTHELEMY est actuellement responsable. Notre équipe fait partie de l'IRCOM (Institut de Recherche en Communications Optiques et Micro-ondes) qui est unité mixte de recherche CNRS-Université (n° 6615).
Notre groupe s'intéresse actuellement à trois thématiques principales : le premier axe de recherche concerne l'interférométrie stellaire à fibres optiques et est animé par François REYNAUD (professeur) et Laurent DELAGE (maître de conférence). Le deuxième thème est relatif au contrôle des propriétés spatiales des résonateurs lasers. Il concerne surtout Agnès DESFARGES (maître de conférence), Bernard COLOMBEAU (professeur), Vincent KERMENE (chargé de recherche) et Michel VAMPOUILLE (professeur). Alain BARTHELEMY (directeur de recherche), Vincent COUDERC (chargé de recherche) et moi-même sommes plus particulièrement impliqués dans des recherches en optique non linéaire. Ces trois thématiques aux interactions fortes et fructueuses bénéficient enfin du dynamisme et des compétences irremplaçables de Claude FROEHLY (directeur de recherche).

Dans la présente synthèse, je résume les objectifs et les résultats obtenus dans chacun des thèmes abordés. Je souhaite également insister dans cette partie sur l'importance des collaborations que j'ai établies durant ces douze années avec des collègues chercheurs, français et étrangers, mais également l'apport fructueux des étudiants du niveau BTS, maîtrise, DEA et doctorat avec qui j'ai travaillé.

    La première partie de ma thèse dont Claude FROEHLY assura la direction fut consacrée à la mise en �uvre d'une méthode originale de réduction de la diffusion Raman stimulée dans une fibre optique monomode de silice en régime picoseconde. La technique proposée  nécessita notamment la fabrication d'une chaîne laser bifréquence composée de deux sources picosecondes jumelles accordables comportant chacune un oscillateur à colorant à contre réaction distribuée et un étage d'amplification à colorant. J'ai alors eu le plaisir de travailler avec François REYNAUD et Bernard COLOMBEAU dont les activités de recherche se situaient alors majoritairement dans le secteur de l'optique non linéaire et des impulsions brèves. La chaîne laser dont j'ai assuré la construction comportait un étage de mise en forme temporelle des impulsions fonctionnant sur un principe initialement démontré par Bernard COLOMBEAU. Ce travail s'effectua également en collaboration avec Jacques MONNERET du Laboratoire P.M. DUFFIEUX de l'Université de Besançon.
Durant ces premiers travaux, j'ai pu mesurer l'ampleur des problèmes liés aux instabilités des sources d'impulsions brèves alors disponibles dans le commerce, surtout dans le cas où ces sources alimentent une chaîne laser constituée d'une cascade d'éléments non linéaires. Une conclusion importante pour moi fut qu'il n'existait pas à cette époque de source laser suffisamment stable, aussi bien en terme de puissance crête qu'en terme de durée d'impulsion, adaptée à des expériences d'optique non linéaire. Cette constatation contribua par la suite au développement au sein de mon équipe d'un nouvel axe de recherche visant à la conception et au développement de nouvelles sources lasers tout solide d'impulsions brèves stables pompées par diodes lasers pour l'optique non linéaire. La génération d'impulsions brèves picosecondes ou femtosecondes fait encore partie aujourd'hui des thèmes prioritaires auxquels je contribue.

Dans le cadre de ma thèse, j'ai également abordé le problème de la caractérisation d'impulsions ultrabrèves lors de l'exécution d'un contrat de recherche visant au test des performances ultimes d'une caméra picoseconde à balayage de fente. A cette occasion, j'ai bénéficié d'une collaboration fructueuse avec Michel VAMPOUILLE qui proposa la méthode de test originale utilisant astucieusement les deux lasers jumeaux développés initialement pour l'expérience de réduction de la diffusion Raman stimulée.

De façon plutôt fortuite, au cours de la campagne de test de la caméra picoseconde, j'ai pu mettre en évidence en compagnie de François REYNAUD et de Gilbert MARTINELLI, alors étudiant en thèse chez nous, des franges d'interférences stationnaires observables à l'�il nu entre les deux lasers à colorants alors utilisés . La possibilité de faire interférer deux sources lasers différentes suscita une discussion avec des spécialistes de mécanique quantique dont les développements auraient peut-être mérité d'être plus fournis. La présentation de ce résultat de physique fondamentale reçu l'appui de Monsieur le professeur Maurice FRANÇON et donna lieu récemment à une demande d'autorisation de publication dans l'ouvrage d'enseignement général intitulé "OPTICS" de la part de son auteur le professeur Eugène ECHT.

Pendant la période de ma thèse, notre laboratoire accueillait le chercheur américain Stuart SHAKLAN dans le cadre d'un travail post-doctoral concernant l'utilisation de fibres optiques multimodes en interférométrie stellaire. J'ai alors eu la chance de collaborer avec Stuart lors de la caractérisation de propriétés linéaires et non linéaires de fibres faiblement multimodales grâce à l'utilisation d'impulsions picosecondes dans des techniques originales d'analyse spatio-temporelle ou spatio-spectrale . Alain BARTHELEMY participa également à ce travail lors de la première mise en évidence expérimentale de l'effet de modulation de phase croisée par effet Kerr entre modes d'une fibre optique.

Dès le début de ma thèse, j'ai été Attaché Temporaire d'Enseignement et de Recherche (ATER) à temps plein, puis professeur de physique en classe préparatoire de mathématiques spéciales technologiques. J'ai soutenu ma thèse en février 1991 avant de devenir maître de conférence à la Faculté des Sciences de Limoges.
 

Après ma thèse, j'ai participé avec Alain BARTHELEMY au démarrage d'une nouvelle thématique relative à la conception de sources tout solide d'impulsions brèves pompées par diodes lasers avec, comme cela a déjà été mentionné, la finalité d'une application à l'optique non linéaire. Vincent COUDERC prit rapidement part de façon très dynamique à cette recherche tout d'abord dans le cadre de son stage de DEA dont je fus responsable en 1992, durant sa thèse pour laquelle j'ai assuré une partie de l'encadrement et enfin aujourd'hui encore en tant que chargé de recherche CNRS. Un autre étudiant en thèse, Olivier GUY, contribua également au développement de cette activité.

Nos premiers efforts dans ce domaine allèrent vers l'amélioration de la cohérence spatiale des diodes lasers de puissance utilisées pour le pompage de lasers solides. Vincent COUDERC et Jean KHALIL, lors de leurs stages de DEA respectifs, participèrent en ma compagnie à l'étude de ce point particulier.

Ensuite, nous nous sommes intéressés à la conception et à la réalisation d'un nouveau type de résonateur laser pompé par diode laser à haut rendement. Ce travail s'inscrivait alors dans le prolongement des études menées à Limoges par Bernard COLOMBEAU, Michel VAMPOUILLE et Claude FROEHLY sur les résonateurs confocaux dits "à Transformée de Fourier". Successivement, trois étudiants en stage de DEA, Ali MIFDAL, Eric ROISSE et Omar CHERIFI prirent part avec moi à l'étude de ce type de résonateur dans des configurations de pompage longitudinal ou/et transverse. Sur ce thème, j'ai également eu la chance de participer à une collaboration avec le professeur Vaslav KUBECEK de l'Université de Prague lors de la première démonstration expérimentale d'une source au Nd:YAG émettant à la longueur de sécurité oculaire de 1,44 microns.

Parallèlement à ces efforts portant sur les lasers infrarouges, je me suis également intéressé au secteur de l'optique non linéaire relatif aux conversions de fréquence de ces sources vers le domaine visible et ultraviolet. J'ai contribué à une collaboration avec l'équipe d'Optique Non Linéaire de l'Institut d'Optique sur un projet concernant la réalisation d'une source d'impulsions picosecondes ultraviolettes pompée par diodes pour la biologie. Inou ALLAL qui démarrait alors une thèse dans notre équipe contribua à ce projet. Ce sujet donna lieu au développement à Limoges de deux sources spécifiques d'impulsions visibles ou ultraviolettes. C'est ainsi qu'Éric ROISSE alors en thèse travailla avec moi notamment sur l'optimisation d'une cavité externe résonnante pour le doublage et triplage d'un laser infrarouge au Nd:YAG.
Sur ce sujet, j'ai également contribué au travail de stage de DEA de Shaïd NAEEM ASHRAF lors d'une tentative d'application des conversions de fréquence à l'interférométrie stellaire à fibres optiques.

Les compétences acquises précédemment dans le domaine de l'optique non linéaire d'ordre 2 me permirent par la suite de contribuer aux efforts de mon équipe en vue de la réalisation de sources lasers d'impulsions brèves. En effet, à la suite des travaux sur les diodes de pompage et sur les résonateurs, nous nous sommes orientés vers l'étude de méthodes passives de synchronisation intermodale basées sur l'emploi de non-linéarités quadratiques. Je me suis alors plus particulièrement intéressé à une méthode originale mettant en �uvre un effet de commutation de polarisation à l'intérieur d'un cristal doubleur de fréquence. Après la validation expérimentale de cette méthode dans le domaine picoseconde, j'ai entrepris son extension à la femtoseconde avec en premier lieu une étape numérique de modélisation. Le travail de stage de DEA d'Antoine ALBERT a porté notamment sur l'application de ce modèle au cas d'un laser femtoseconde à fibre dopée ytterbium. Les conclusions positives qu'il a obtenues le conduisent actuellement à la mise en �uvre expérimentale de cette méthode dans le cadre de son travail de thèse. Nous nous apprêtons également à expérimenter cette méthode originale de synchronisation intermodale à l'intérieur d'un laser au saphir dopé titane à la longueur d'onde de 800 nm.

En 1994, notre laboratoire a procédé à l'acquisition d'un laser femtoseconde au saphir dopé titane pour la caractérisation de photoconducteurs ultra-rapides. Ce nouveau matériel me permit d'aborder le secteur en plein essor encore aujourd'hui des femtosecondes. J'entreprit alors une collaboration avec le professeur Levon MOURADIAN de l'Université de YEREVAN en Arménie. Celui-ci était alors particulièrement intéressé par les compétences de notre équipe dans le secteur de l'holographie temporelle. Notre travail porta sur la mise en �uvre expérimentale d'une technique originale de caractérisation du profil temporel d'impulsions de durée femtoseconde. Cette technique conduit à la formation dans le domaine spectral d'une image du profil temporel de l'impulsion, ce qui permet de procéder au diagnostic de l'impulsion à l'aide d'un analyseur de spectre optique conventionnel.

Sur ce thème du diagnostic d'impulsions femtosecondes, j'étudie actuellement une deuxième technique permettant d'accéder cette fois à la phase spectrale de l'impulsion, ceci sans qu'il soit nécessaire de disposer d'une impulsion de référence. Cette méthode originale passe par la mesure des phases de battements temporels entre différentes composantes du spectre à analyser. La détection de ces battements s'effectue à l'aide d'une porte optique ultra brève réalisée par mélange avec l'impulsion initiale à l'intérieur d'un cristal doubleur de fréquence. Ce projet bénéficie de travaux antérieurs réalisés par l'équipe de recherche de l'Université Libre de Bruxelles dirigée par Philippe EMPLIT avec qui nous collaborons. La mise en place expérimentale de cette technique a constitué le sujet de stage de BTS de Julien SOZEAU et son développement fait partie du travail de thèse de Valérie MESSAGER.

 La découverte de matériaux présentant de fortes non-linéarités optiques suscite actuellement un intérêt croissant à l'intérieur de la communauté scientifique internationale surtout à cause des perspectives d'application de tels matériaux dans le domaine en plein essor des télécommunications optiques. Nous participons à cet effort de recherche au travers de plusieurs collaborations avec des équipes de chimistes français.
J'interviens notamment dans la réalisation d'un contrat de recherche avec le Laboratoire des Verres et Céramiques de l'Université de Rennes dont le sujet porte sur l'étude de verres de chalcogénures et de chalcohalogénures. Dans le cadre de cette activité, je me suis occupé de la mise au point d'une technique simple et novatrice de mesure de susceptibilités non linéaires d'ordre 3 applicable aux matériaux volumiques et aux guides d'onde. Cette méthode consiste à relever l'évolution du spectre d'une impulsion femtoseconde ayant subi successivement une étape préliminaire de dispersion chromatique variable et une étape d'auto modulation de phase mettant en �uvre le composant à tester.
Valérie MESSAGER s'occupe de l'étude expérimentale de cette technique innovante. Elena LOPEZ-LAGO a également contribué au développement de cette méthode de caractérisation lors de l'élaboration d'un modèle numérique complet permettant d'en exploiter les relevés expérimentaux. Elena LOPEZ-LAGO a effectué ce travail pendant un séjour post-doctoral de deux ans dans notre équipe. Grâce à l'étude numérique qu'elle a menée, nous avons montré qu'il était possible grâce à cette technique, d'accéder à une mesure des parties réelle et imaginaire de la non-linéarité mais également de son temps de réponse. Nous utilisons actuellement cette technique pour la caractérisation de nouvelles fibres non linéaires au GaLaS fournies par Peter KAZANSKY de l'Optical Research Center de Southampton.
 

 A l'automne, mon équipe s'est engagée dans un projet visant à la réalisation d'une source laser femtoseconde à fibre dopée ytterbium à structure hétérogène air-silice. Ce travail s'effectue en étroite collaboration avec l'équipe OGI (Optique Guidée Intégrée) de l'IRCOM Limoges et avec le Laboratoire de Physique de la Matière Condensée (LPMC UMR CNRS n°6622) de Nice. La réalisation de sources femtosecondes à fibre Yb:SiO2 passe par la maîtrise d'un part des effets dus à la forte dispersion chromatique de la fibre amplificatrice et d�autre part des effets non linéaires liés à l'existence d'un régime d'impulsions. Nous proposons de contourner ces difficultés par l�emploi de fibres innovantes à microstructures air-silice (fibres à cristal photonique) dont le c�ur sera dopé par l�ion actif. En premier lieu ce projet conduira à concevoir, à fabriquer et à caractériser ces fibres très particulières dont l�effet de bande interdite photonique permettra d�annuler la dispersion chromatique à la longueur d�onde d�émission (1030-1080 nm), d�établir un mode unique de taille importante, tout en assurant un gain suffisant. En second lieu cette fibre aux propriétés inédites permettra d�exploiter dans l�infrarouge proche les techniques passives de blocage en phase propres au régime guidé et déjà employées avec succès à 1,5 microns.
A plus long terme l'expérience acquise lors de l'étape de fabrication de ces fibres structurées à dispersion décalée vers les courtes longueurs d'ondes devrait par ailleurs permettre de disposer de composants aux propriétés non linéaires inédites. J'envisage par exemple d'étudier la génération d'un continuum de lumière blanche (lambda=500 nm) par propagation non linéaire à l'intérieur d'une fibre cristalline, à petit c�ur cette fois et forte proportion d'air, d'une impulsion femtoseconde issue d'un simple oscillateur au saphir dopé titane. Ce type de rayonnement et de fibre spéciale trouvera de nombreuses applications, par exemple en tomographie cohérente, en amplification paramétrique optique ou encore pour la génération d�ondes THz accordables.