Récits des TVL

44 OU LE CROSS ! 2001-09-01

10h30
- allô, c’est Franck !
- oui ! je me lève (Thierry)
- c’est bon, on y va…
- attends, je regarde dehors… oh putain !!! il pleut (ou presque)
- si si, ça va être bon…
- ok à tout à l’heure à la Moné.
Voilà comment a commencé un cross avec Franck un dimanche 22 avril 2001.
Arrivés sur place, on ne peut pas dire que les conditions étaient encore vraiment là, des bouffes, puis pétol, alors comme d’habitude, on commença à refaire le monde, et le reste.
Après une profonde léthargie, Rémi se réveilla décidé à voler, et nous fit une super démo de sa motivation. Il partit loin devant chercher le thermique, 2 ou 3 tours dedans et le voilà à 2000m. Mince, le bazar est allumé ! il faut y aller…
Le Franck décolle, gratte sur la forêt et réussit à se hisser lui aussi vers 2000m. A mon tour de jouer, je commence péniblement à m’extirper dans du haché lorsque Franck m’appelle à la radio.
- Thierry… c’est Franck… je suis à 1800… et je t’attends… pour partir.
- oui Franck, je vais essayer de monter mais ce n’est pas très facile là où je suis.
Un rapide coup d’œil sur le site me fit découvrir que Frédo n’était pas très loin et qu ‘il montait comme une bête en faisant des huit (ou presque) sur la forêt, cela rajoutait une pincée de motivation à l’invitation de Franck. Ayant réussi à me rapprocher laborieusement du plafond il y eut à la radio comme un vent de motivation générale.
. Olive, qui au sol, avec sa petite famille, vociférait dans le micro : « vas-y Thierry, fais-nous voir que tu n’es pas une tapette, pars en cross ! »
. Fabienne nous annonçait qu’elle faisait la récupe.
. Opal invitait Olive à lui amener le plus prestement possible un vario car le sien ne fonctionnait plus, et il voyait bien qu’il allait louper le thermique où l’on était .
. Francky attendait que ses petits poulets le rejoignent comme un vrai papa coq.
Et c’est parti, direction au Nord, je m’applique, je suis le Franck un petit regard derrière et je vois la Moné s’éloigner. Tiens, le Frédo a loupé le wagon, le Rémi aussi. Bon ! allez ! on y croit ! On prend la direction Bugeat et là, étant dans du négatif, mes premières pensées commencèrent déjà à trahir mes ambitions de cross man : « si on arrive là bas, on trouvera bien un bistro pour boire un chocolat chaud ». Mais arrivé sur la dite ville… « mince on remonte… +2, mais on remonte vraiment… j’y crois pas… mais si, mais si… » et nous voilà à nouveau au plafond. Le vol commence vraiment à être magique. Transition tout droit sur Tarnac et là, remagie, rethermique +2 +3 replafond, le Franck est de l’autre coté du thermique à la même altitude que moi, si près que l’on peut se causer.
lui : il…fait…froid.
moi : houa hou ! houa hou ! super génial ! je suis mort de froid, mais on continue c’est trop bon.
La vue était féerique, un gaz d’enfer et le casque rose fluo de Franck tachait l’horizon comme le chapeau de la Reine d’Angleterre lors des grandes cérémonies.
Une voix surgit de la radio :
- je vous ai en visu, c’est super !
C’était Rémi qui nous faisait la récupe et qui nous surveillait de la voiture. Cela faisait drôle de le savoir en dessous alors qu’un peu plus tôt, il était avec nous au plafond. Je commence à réaliser le super vol, que l’on est en train de faire, un peu gâché par le froid, mais heureusement l’envie de voler nous fait surmonter tout ça.
Devant, 3 petits nuages, le Franck va droit dessus et je m’applique à le suivre, un peu décalé certes, mais il faut ratisser pour être sûr de ne rien perdre, et là, papa coq surveillant toujours son apprenti poulet :
- recentre-toi…derrière…moi…
Effectivement je passais du –1 à +2 ça marchait mieux. On monte tout droit sans un virage, le pied, on a gagné au moins 10Km dans cette position « cool »
Je commence à réaliser que l’on a fait quelques km lorsque j’aperçois le lac de Vassivière sur ma gauche. Une bouffée d’euphorie me gagne et pour me réchauffer je me mets à chanter « oh mon bateau oh, oh, oh, … t’es le plus beau des bateaux »
Après ces 3 petits nuages un long vol de transition dans du zéro et je vois le Franck toujours au-dessus faire un 360 et me disant à la radio :
- je n’enroule pas…je fais juste un tour pour t’attendre…continue tout droit
Là, il est en train de me pourrir grave, mais je suis là et tellement content d’ être là. Il n’était pas loin de 17h30 et le vol se terminait. Il me manquait un peu de motivation pour enrouler dans du tout petit, car le froid m’avait tout de même un peu usé et ce dernier vol plané dans l’huile terminait notre super vol, mains hautes et orteils de pieds tendus pour gagner quelques centimètres, (distance oblige). Je me pose frigorifié et me couche sur le dos ne sentant plus mes pieds, mes mains et tout le reste à cause du froid, mais QUEL BONHEUR d’être ici ! Dernier message de Franck :
- je me pose près du village…si le portable ne passe pas…je trouverai bien une cabine téléphonique
RE RE POURRI !
Heureux comme l’oisillon qui vient de faire son premier grand vol, je pris le chemin pour rejoindre Franck au petit village GIOUX, nous étions en Creuse. Le sourire jusqu’aux oreilles, une franche poignée de mains entre le Franck Perrin de pure race creusoise et le Thierry Boudeau de pure race Limousine laissait présumer qu’ils étaient contents d’eux. Ils se seraient bien embrassés mais les autochtones nous voyant arriver déjà du ciel ne se seraient peut-être pas remis d’un baiser entre ces deux. Il restait tout de même un moment encore extra, Franck sortit la carte et m’annonça :
- on a bien fait 40 bornes
J’avais le sourire qui devait passer derrière les oreilles. Pour terminer cette super journée, notre super récupe était déjà là 30mn après s’être posé, génial de chez génial, merci encore Rémi. Je regrette simplement que tu ne sois pas parti avec nous ainsi que le Frédo, ça aurait été encore plus super si on avait pu partager ça tous les quatre.
De retour à la maison, mes pieds ne touchant plus le sol, le démon du centimètre me fit prendre la carte pour mesurer la distance que l’on venait de faire, je me rendis dans la chambre de mes enfants où la maman essayait de leur lire une histoire, afin de leur faire partager mon enthousiasme, mais l’euphorie qui m’envahissait ne les rendaient pas très attentifs lorsque sautant comme un indien autour de la carte je leur annonçai :
- 44Km, 44,44…
- Papa papa ?
- quoi ?
- ça va ?
- OUI ! 44,44,44…
- oh papa….. calme toi !
Me faisant virer de la chambre des enfants par la maman, il me restait une dernière chose à faire avant d’aller me coucher et de refaire une centaine de fois ce vol en rêve, je pris le téléphone :
- allô Olive !
- oui ?
- 44,44,44,44, 44,44,44, 44,44,44,44,44,44, 44,44,44…


Thierry Boudeau

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