Récits des TVL

CHAMPION DU MONDE 1999-08-09

Et oui, deux parapentistes des TVL sont allés dans le Cantal faire leur première compétition.
A vrai dire, nous n’avions pas trop le choix, c’était notre pote qui l’organisait, et si nous n’y allions pas, nous étions bannis des sites du Cantal jusqu’à la 6ème génération, mais également privés à vie de la truffade de " La Raymonde ", le resto du Super Lioran où avait lieu la compète.
Arrivés le 3 Juillet pour un entraînement intensif et soutenu, notre ardeur sportive n’allait pas tarder à se calmer,car ce jour là, la météo en avait décidé autrement. Trop hard pour nous, le paramou n’a pu sortir du coffre..., en revanche, l’entraînement gastronomique pouvait commencer, tripoux, charcuteries, truffade, magrés...
du Bordeaux, mais pas trop, contrôle antidopage oblige, bref, après la sieste, nous étions au top.
Le soir arrivant, le stress aussi, nous demandons à notre coach un petit briefing, sur le contenu d’une compétition en général. Là, l’angoisse nous a lentement envahis, à coup de F.A.I., balises, fréquence secours..., allant même vers un début de claustrophobie, qui apparut lorsqu’il nous annonça que la fenêtre ne serait ouverte qu’une heure ou deux. Mais notre self-control James Bondiens prit le dessus, et la Salers (médicament local anti-stress), nous aida à nous calmer, et à nous endormir après la 2ème ou 3ème bouteille.
Samedi 4 au matin, jour de la compète, la pression monte, les visages se ferment, l’ambiance est tendue: en effet, la cafetière donne des signes de faiblesse, le café est remplacé par la Salers, et lorsque le coach nous annonce " il faut y aller ", la tension nerveuse est au maximum.
Ca y est, nous y voilà, 12 heures, 18OO mètres, plafond 23OO, petits cums, on est en haut du Plomb du Cantal, et sans avoir le temps de flâner devant ce paysage bucolique, qui emplissait nos coeurs de sagesse intérieure, que la technique froide et sans vie nous submergeait, briefing, Q.N.H., Q.F.E., fréquence fédé, points G.P.S., balises à contourner, trajet max sur axe, Jean Passe et des meilleurs, bilan, le pouls à 18O et 28-5 de tension.
Heureusement, et comme une délivrance pour l’oiseau dans la cage, la fenêtre allait bientôt s’ouvrir ( cela tombait bien, il commençait à faire chaud ). Vingt deux volatiles s’étaient déjà envolés, nous étions 28. Le regard oppressant du coach nous invitait à décoller prestement, il fallait y aller.
Frédo décolle très serein " cui-cui... ", 23 et moi derrière 24, ça y est on y est ! Frédo s’accroche, il est dans le paquet, et moi, je commence à flâner, discutant avec les marmottes, n’étant qu’à quelques mètres au dessus de leurs têtes. Un rapide coup d’oeil en dessous me fit comprendre, que je n’allais pas tarder à me poser, si je continuais à faire du social avec les bestioles. Là, la bête (l’aigle) cachée en moi, allait se réveiller, le regard rivé sur mon nouvel appareil magique, le Fly... 4O1O turbo GTI 16V, allait m’aider à enrouler le premier pétard pour me hisser vers 2OOO mètres.
Les gâteaux aux géraniums trempés dans la Salers du petit-déjeuner devaient faire effet, le bien-être total, j’avais fait 8km, déjà un miracle, on doublait l’objectif initial, mais Frédo n’était plus là. L’appelant à la rescousse, il m’annonçait qu’il se posait à la verticale, au dessous de moi, ha Frédo!!!, ce satanesque accélérateur! si tu n’avais pas oublié que ton raplapente en avait un et que tu pouvais t’en servir !
Malgré la promesse de la veille, se jurant de se poser au même endroit, un égoïsme effréné me fait dire à le radio " Frédo je continue, j’ai du gaz et je suis à porter de Vic sur Cère " 15 km, le nirvana.
Arrivé au dessus de Vic, l’euphorie m’envahit " je pissais partout ", je pris la photo de la balise, et en taillant plein sud, sur l’axe, pour aller le plus loin possible. Mais là, l’aigle royal que j’étais se transforma vite en petit moineau.
Une couche de cisaillement, -4 -5 par moment, j’étais scotché accélérateur à fond, bref, les oreilles pour la tabasse, et l’attéro un peu chaud, je devais avoir fait 2Okm.
Le soir, 7ème de la première manche, j’étais le champion du monde de ma rue, et je m’étais élevé de " grouillo de base ", au rang de, " porteur de leste de compétiteur national de parapente ", le rêve devenait réalité, j’allais enfin pouvoir parler au grand du chiffon mou, ils allaient enfin m’adresser la parole.
Toutefois pour ceux qui en rêveraient, les portes de l’empire Delta ne seraient toujours pas franchissables. Vous n’imaginez tout de même pas que les Empereurs du vol libre puissent vous regarder, quand bien même auriez vous fait 100km, qu’il faudrait encore être propre sur vous, pour qu’ils s’égarent d’un mot ou d’un regard. En effet dans cette caste, la promotion sociale est toute autre. Il faut, pour passer de " laquais de chariote " (appelé aussi récup), à " porteur de côte de maille " (appelé également harnais), avoir été à leur entière dévotion pendant des années, pliage de l’aile, cirage de la barre de contrôle, repassage de la toile... et surtout, ne pas oublier de les appeler Monseigneur, à chaque sollicitation. Si malgré tout le royaume du delta vous intéressait, attention, cela reste exclusivement réservé à des lignées de nobles. Bref ... je m’égare !
Dimanche 5 matin, lever 7 heures, où sont les thermiques, je vais tous les bouffer!
Oh Bijou ! oooh!!! on se calme...!!!
Onze heures: " re " le Plomb du Cantal, grand bleu sans cum, mais cette fois il faut tourner 4 balises et là ??? Le meilleur en a tourné une et fait 28 km. Eh oui! le champion du monde que j’étais devenu redevint vite le blaireau de base que j’étais. En plus, le Frédo se vengea, et me pourrit, en posant 5O314 centimètres plus loin; résultat: 2 places de mieux au classement de la 2ème manche.
Le classement général des deux manches ? Cela aurait pu être pire, mais nous ne dévoilerons les chiffres qu’aux personnes susceptibles de faire moins bien, autrement-dit, pas grand monde. Rappelons toutefois, en toute modestie, que nous avions pulvérisé nos objectifs les plus fous, en posant 4 voire 5 fois plus loin que prévu.
Si je pouvais déconner sur deux lignes, je dirais tout de même que ce doit être en compétition que l’on peut faire des progrès, et que l’ambiance était plutôt sympa. Coup de chapeau aux Volplanautes qui l’organisaient ( bouffe le soir super chouette chez " La Raymonde ", récup tip-top...).

PS: A tout ceux qui voudraient se moquer, vous auriez bien raison, mais nous ne nous prenons pas au sérieux, le principal, je crois, est de prendre du plaisir, nous en avons pris un max.


Thierry Boudeau

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