2025, première quinzaine d’août. Solène Fogret
2025, première quinzaine d’août. Solene Forget
1 août 2025. Ethiopie. Violences sexuelles généralisées et délibérées durant et après la guerre du Tigré. Les ONG Physicians for Human Rights et l’Organization for Justice and Accountability in the Horn of Africa affirment que « des violences sexuelles et reproductives généralisées, systématiques et délibérées liées au conflit ont été commises au Tigré et se poursuivent depuis la signature de l’accord de paix », de 2020 à au moins 2024. Elles rappellent que « de tels actes constituent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, notamment des violences sexuelles, des grossesses forcées, de l’esclavage sexuel et des persécutions fondées sur des motifs ethniques, de genre, d’âge et politiques », affirmant que ces crimes ont été commis dans l’intention de « détruire les communautés et l’ethnie tigréenne ». Elles rapportent également que la majorité de ces violences, dont certaines ont été commises sur des mineurs, l’ont été par des Erythréens, qui « n’étaient pas motivés par le désir sexuel mais plutôt par le désir d’infliger de la douleur et de la souffrance » : des pierres, des clous, et des morceaux de plastique sur lesquels étaient écrits des messages anti-tigréens ont été retrouvés dans l’utérus des victimes qui affirment que « tout le personnel militaire érythréen avait reçu pour instruction de blesser le vagin des femmes tigréennes ». La guerre du Tigré (nord de l’Ethiopie) est une guerre civile qui a opposé de novembre 2020 à novembre 2022 les forces fédérales éthiopiennes, appuyées par l’armée érythréenne et des milices locales, aux rebelles du Front de libération du peuple du Tigré (FLPT). Au moins 600 000 personnes ont été tuées au cours de cette guerre, selon l’Union africaine. Bien qu’un accord de paix ait été signé, des soldats érythréens sont toujours présents dans la région, ainsi que des milices amhara (du nom d’une région voisine du Tigré), hostiles au FLPT. Toutes les parties au conflit ont été accusées de crimes de guerre, dont la majorité auraient été commis par les Erythréens. Ainsi, le rapport précise que « des violences sexuelles liées au conflit ont également eu lieu en Amhara et en Afar, où les auteurs ont exprimé leur intention de se venger des violences commises au Tigré ».
1 août 2025. Italie. La Cour de justice de l’Union européenne invalide les transferts de migrants vers l’Albanie. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a confirmé ce jour la décision d’un tribunal italien qui avait remis en question la désignation par l’Italie du Bangladesh comme « pays d’origine sûr ». Cette désignation permet, en vertu d’un accord conclu entre l’Italie et l’Albanie, l’expulsion et la détention d’hommes seuls originaires de « pays d’origine sûrs » dans des centres albanais financés par l’Italie. Depuis ces centres, les migrants peuvent demander l’asile comme s’ils se trouvaient sur le sol italien. La CJUE a jugé qu’un pays ne peut être qualifié de « sûr » s’il ne l’est pas pour certains groupes vulnérables et que cette qualification doit pouvoir faire l’objet d’un contrôle juridictionnel et être étayée par des preuves claires et accessibles. Toutefois, depuis avril 2025, la Commission européenne considère également le Bangladesh – tout comme l’Egypte – comme un « pays d’origine sûr ». En outre, depuis mars 2025, l’UE propose un cadre légal permettant aux Etats membres d’ouvrir des centres pour migrants dans des pays en dehors de l’UE, afin d’y envoyer des personnes dont la demande d’asile aurait été rejetée et faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire.
1 août 2025. Gaza. Crimes de guerre commis dans le cadre de la distribution d’aide alimentaire. Depuis mai 2025, après plus de 11 semaines de blocus total imposé par Israël à Gaza, de la nourriture est distribuée par la Gaza Humanitarian Foundation (GHF), gérée par deux sociétés privées sous-traitantes américaines, Safe Reach Solutions (SRS) et UG Solutions, en coordination avec l’armée israélienne. L’objectif des autorités israéliennes est de substituer la GHF à l’ONU et aux autres organisations humanitaires, au motif que le Hamas détournerait l’aide fournie par ces dernières. Toutefois, la GHF ne peut fournir qu’une soixantaine de camions de nourriture par jour, comparés aux 600 camions entrés chaque jour à Gaza dans le cadre du programme d’aide dirigé par l’ONU pendant le cessez-le-feu début 2025. Par ailleurs, les quatre sites de distribution se trouvent dans des zones militarisées et aucun n’est accessible aux habitants du nord de Gaza. De plus, à l’intérieur des sites, la distribution est incontrôlée, laissant souvent les personnes les plus vulnérables sans nourriture, et de nombreux Palestiniens ont déclaré avoir été témoins de tirs de soldats israéliens sur les civils. Au moins 859 Palestiniens ont été tués, presque quotidiennement, alors qu’ils tentaient d’obtenir de la nourriture sur les sites de la GHF entre le 27 mai et le 31 juillet.
3 août 2025. Bangladesh. Début du procès de Sheikh Hasina. Le procès par contumace de l’ancienne Première ministre, Sheikh Hasina, s’est ouvert ce jour devant le Tribunal des crimes internationaux du Bangladesh. Elle est accusée de crimes contre l’humanité commis lors de la répression des manifestations contre son gouvernement en juillet et début août 2024. L’accusation estime le nombre de personnes décédées durant ces évènements à plus de 1 400 ; le ministère de la Santé du Bangladesh l’estime quant à lui à plus de 800. Sheikh Hasina se trouve actuellement en Inde après avoir fui le pays le 5 août 2024, tout comme son ancien ministre de l’Intérieur, Asaduzzaman Khan Kamal, également jugé par contumace. Le seul accusé présent est l’ancien inspecteur général de la police, Chowdhury Abdullah Al-Mamun. L’accusation a déclaré qu’elle allait se concentrer sur « 11 incidents symboliques » à travers lesquels elle démontrera « comment des crimes tels que le meurtre, la persécution, la torture, la détention arbitraire et les violences sexuelles ont été commis de manière systématique et généralisée en utilisant l’ensemble de l’appareil d’Etat ». S’ils sont reconnus coupables, Sheikh Hasina et Asaduzzaman Khan Kamal pourraient être condamnés à mort ; Chowdhury Abdullah Al-Mamun sera quant à lui « plus probablement condamné à une peine de prison », selon Justice Info.
(https://www.justiceinfo.net/fr/149165-bangladesh-proces-hasina-demarre.html)
4 août 2025. Soudan. L’ONU confirme la présence de mines antipersonnel dans l’Etat de Khartoum. Le bureau au Soudan du Service de lutte antimines des Nations unies a confirmé la présence de mines terrestres dans plusieurs localités de l’Etat de Khartoum, notamment des mines antipersonnel à Mogran et des mines anti-véhicules à Omdurman et Bahri. Depuis le début du conflit entre les Forces armées soudanaises et les paramilitaires des Forces de soutien rapide le 15 avril 2023, les deux camps auraient posé des centaines de mines dans les zones sous leur contrôle afin d’entraver l’avancée de leurs adversaires. Une grande quantité de munitions non explosées a également été retrouvée dans d’autres zones urbaines, telles qu’El Obeid dans le Kordofan du Nord, El Fasher dans le Darfour du Nord, El Geneina dans le Darfour de l’Ouest et Nyala dans le Darfour du Sud. Ces informations interviennent alors que les mouvements de population massifs se poursuivent dans le pays : la localité de Tawila, dans l’Etat du Darfour du Nord, est submergée par un afflux massif d’environ 330 000 personnes. Or, la ville fait désormais également face à une augmentation des cas de choléra : plus de 1 180 cas, dont environ 300 chez des enfants, et au moins 20 décès y ont été signalés depuis que le premier cas a été détecté le 21 juin 2025.
(https://news.un.org/fr/story/2025/08/1157232)
4 août 2025. Italie. Giorgia Meloni mise hors de cause dans l’affaire de la libération d’Osama Elmasry Njeem. La cheffe du gouvernement italien, Giorgia Meloni, a affirmé ce jour avoir été mise hors de cause par le tribunal des ministres dans l’affaire concernant la libération et l’expulsion vers la Libye le 22 janvier 2025 d’Osama Elmasry Njeem, chef de la police judiciaire libyenne et objet d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre présumés commis à partir de février 2015. Elle était soupçonnée, tout comme le ministre de la Justice Carlo Nordio, le ministre de l’Intérieur Matteo Piantedosi et le sous-secrétaire d’Etat à la présidence Alfredo Mantovano, chargé des services de renseignement, d’avoir facilité cette mise en liberté. Pour que les deux ministres et le sous-secrétaire d’Etat à la présidence puissent être jugés, le tribunal des ministres doit demander l’autorisation au Parlement. Cependant, la coalition de Giorgia Meloni possède une large majorité au sein de ce dernier.
6 août 2025. République démocratique du Congo. L’ONU dénonce l’escalade des attaques menées par les groupes armés contre les civils. Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’Homme, Volker Türk, a condamné ce jour l’escalade des attaques meurtrières menées par le M23, soutenu par le Rwanda, et d’autres groupes armés au cours du mois dernier. En effet, au moins 319 civils ont été tués entre le 9 et le 21 juillet dans quatre villages du territoire de Rutshuru, dans la province du Nord-Kivu : il s’agit de l’un des bilans les plus élevés jamais recensés dans ce type d’attaques depuis la résurgence du M23 en 2022. La plupart des victimes, dont au moins 48 femmes et 19 enfants, étaient des agriculteurs locaux. Le gouvernement congolais et le M23 ont signé une déclaration de principes au Qatar le 19 juillet 2025, convenant d’un cessez-le-feu et de la poursuite des négociations en vue d’un accord global ; un accord de paix avait précédemment été signé entre le gouvernement congolais et le Rwanda, le 27 juin à Washington.
(https://news.un.org/fr/story/2025/08/1157249)
7 août 2025. République démocratique du Congo. Procès de Joseph Kabila. La Haute Cour militaire de Kinshasa procède à partir d’aujourd’hui au jugement par contumace de Joseph Kabila, ancien président au pouvoir de 2001 à 2019 et accusé de participation à un mouvement insurrectionnel, de crime contre la paix, d’homicide intentionnel par balles, de trahison, d’apologie du terrorisme, de viol, de torture, de déportation et d’occupation à force ouverte de la ville de Goma. Il risque pour ces crimes la peine de mort, laquelle est à nouveau applicable dans le pays depuis la levée, en mars 2024, d’un moratoire adopté en 2000. Il s’agit de la première traduction en justice d’un ancien chef d’Etat dans le pays. Le 22 mai 2025, le Sénat congolais s’était prononcé en faveur de la levée de l’immunité parlementaire de Joseph Kabila. Cette levée avait été vivement critiquée par des spécialistes qui affirmaient que, du fait que Joseph Kabila est un ancien président, la levée de son immunité exigeait un vote au Parlement à la majorité des deux tiers. D’autres ont ajouté que l’actuel président, Félix Tshisekedi, a également commis des violations des droits de l’Homme et que ce procès semblerait être une vengeance en raison de l’incapacité du gouvernement à faire reculer le M23, groupe paramilitaire auquel Joseph Kabila est accusé de « participation directe ».
8 août 2025. Libye. Levée des scellés sur le mandat d’arrêt contre Saif Suleiman Sneidel. La Chambre préliminaire I de la Cour pénale internationale a levé ce jour les scellés sur un mandat d’arrêt émis le 10 novembre 2020 à l’encontre du Libyen Saif Suleiman Sneidel, soupçonné d’être membre du Groupe 50 de la brigade Al-Saiqa. La Chambre a estimé qu’il existait des motifs raisonnables de croire qu’il est responsable de crimes de guerre commis à Benghazi ou dans les alentours, approximativement entre le 3 juin 2016 et le 17 juillet 2017.
11 août 2025. Soudan. Utilisation par les paramilitaires de la faim comme arme de guerre dans les camps du Darfour. Les Forces de soutien rapide (FSR) ont attaqué ce jour le camp de réfugiés d’Abou Chouk, à El-Fasher, au nord du Darfour : plus de 40 civils sont morts et au moins 19 ont été blessés. Les camps de réfugiés, souvent placés à l’extérieur de la ville et non défendus, sont systématiquement pris pour cible par les paramilitaires. El-Fasher est la dernière ville du Darfour encore contrôlée par l’armée régulière mais, depuis 16 mois, aucune aide humanitaire n’y entre car tous les accès sont bloqués par les FSR. Un rapport de l’ONU du 5 août indique que des habitants sont poussés à consommer du fourrage animal et des déchets alimentaires pour survivre. La famine a officiellement été confirmée par l’ONU le 1er août 2024 dans le camp de Zamzam, au sud de la ville.
12 août 2025. République populaire démocratique de Corée. Examen de la Corée du Nord par le Comité des droits des personnes handicapées. Malgré l’adoption en 2023 de la loi sur la promotion et la protection des droits des personnes handicapées, le Comité a regretté que certaines législations (y compris cette dernière) et politiques relatives au handicap ne soient toujours pas pleinement harmonisées avec la Convention. Il a également regretté que la Constitution n’ait pas été amendée pour interdire explicitement les discriminations fondées sur le handicap. Par ailleurs, les enfants atteints de certains types de handicaps font l’objet de ségrégation dans le système de réadaptation et, de manière générale, les personnes handicapées subissent des restrictions à la liberté de mouvement à l’intérieur du pays. La délégation coréenne a, quant à elle, rappelé les mesures prises dans le cadre de la politique dite « 20 fois 10 » pour améliorer la situation des personnes handicapées, en particulier des femmes handicapées, vivant dans les zones rurales et reculées. Enfin, tandis que le Comité a demandé si des personnes handicapées étaient détenues dans le « Service 49 » et dans le « Service 83 », dans lequel se pratiqueraient des expérimentations biomédicales, la délégation a précisé qu’il n’existe pas de « Service 49 » où des personnes handicapées seraient détenues, mais des services de réadaptation et de récupération à long terme.
12 août 2025. Myanmar. Torture de détenus par les forces de sécurité. Le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar, créé par le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies en 2018, a indiqué ce jour avoir trouvé des preuves « d’actes de torture systématiques » commis par les forces de sécurité dans les centres de détention du Myanmar. Les victimes, parmi lesquelles figuraient des enfants, souvent détenus illégalement à la place de leurs parents disparus, ont été soumises à des coups, des chocs électriques, des strangulations et d’autres formes de torture, comme l’arrachage des ongles à l’aide de pinces. Les enquêteurs ont également trouvé « des preuves crédibles de crimes sexuels » – viols collectifs, esclavage sexuel, torture sexuelle, mutilations sexuelles, agressions sexuelles, nudité forcée – commis contre des civils dans le cadre des divers conflits armés au Myanmar. S’agissant des exécutions sommaires de combattants capturés ou de civils accusés d’être des informateurs, les enquêteurs ont trouvé des preuves attestant qu’elles ont été commises par les forces de sécurité du Myanmar, les milices affiliées, mais aussi les groupes armés de l’opposition.
(https://news.un.org/fr/story/2025/08/1157276)
12 août 2025. Cameroun. Emmanuel Macron reconnaît que la France a mené une « guerre » au Cameroun pendant la décolonisation. Dans un courrier du 30 juillet 2025 (rendu public ce jour) au président camerounais, Paul Biya, le président français, Emmanuel Macron, a officiellement reconnu que la France avait mené une « guerre » au Cameroun contre des mouvements insurrectionnels avant l’indépendance de 1960, mais également après en appuyant les « actions menées par les autorités camerounaises indépendantes ». Ce terme avait été employé par les historiens ayant rédigé le rapport remis au président français en janvier 2025.
13 août 2025. Pérou. Promulgation d’une loi d’amnistie. La présidente du Pérou, Dina Boluarte, a promulgué ce jour une loi accordant une amnistie générale aux membres des forces armées, de la police et des comités d’autodéfense accusés ou faisant l’objet d’une enquête pour des crimes présumés commis pendant le conflit armé interne qui a touché le Pérou entre 1980 et 2000. Les tribunaux péruviens ont prononcé des condamnations définitives dans plus de 150 affaires, et plus de 600 autres sont toujours en instance. Les crimes de guerre commis durant cette période, tels que des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des actes de torture et des violences sexuelles ont conduit au décès d’environ 70 000 personnes et à la disparition de 20 000 autres, d’après la Commission nationale pour la vérité et la réconciliation. En décembre 2023, l’ancien président, Alberto Fujimori, au pouvoir de 1990 à 2000 et qui purgeait une peine de 25 ans de prison pour violations graves des droits humains avait déjà était libéré par le Tribunal constitutionnel péruvien. Egalement, en août 2024, la présidente péruvienne avait promulgué une loi établissant un délai de prescription pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis avant 2003.
(https://www.hrw.org/fr/news/2025/08/13/perou-le-projet-de-loi-damnistie-a-ete-promulgue)
14 août 2025. Somalie. Déplacement forcé de plus de 15 000 personnes en trois jours. Depuis le 11 août 2025, alors que des affrontements armés ont éclaté à Belet-Hawo, dans la région de Gedo (sud-ouest), entre deux groupes armés affiliés au gouvernement fédéral de Somalie et à l’Etat de Jubaland, 15 000 personnes ont été contraintes de fuir vers les zones environnantes, notamment Liilan, Idaan, Gaawido, Hodan et Oda. Ces personnes s’ajoutent aux 100 000 déplacées au cours des deux derniers mois par les conflits dans le centre et le sud de la Somalie.
(https://news.un.org/fr/story/2025/08/1157293)
14 août 2025. Syrie. Violences contre les Alaouites qualifiables de crimes de guerre. La Commission d’enquête des Nations unies sur la Syrie, créée en août 2011 par le Conseil des droits de l’Homme, a rapporté ce jour que les violences commises par les forces gouvernementales contre la minorité alaouite depuis janvier 2025 ont été « généralisées et systématiques » et pourraient, dans certains cas, constituer des crimes de guerre. Les enquêteurs ont identifié des cas de meurtres, de torture, de traitements inhumains infligés aux morts, d’enlèvements de femmes, d’arrestations arbitraires, de disparitions forcées, ou encore de pillages.
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