Est-il possible de chanter du flamenco en français ? Can Flamenco Be Sung in French?

Anne-Sophie RIEGLER 
y Vinciane TRANCART 

https://doi.org/10.25965/flamme.563

Le présent article revient sur l’historique de l’atelier Trad. Cant. Flam., le corpus qui constitue son objet d’étude et l’avancement des travaux pendant l’hiver 2021-2022. Cet atelier se réunit à distance depuis 2019 afin de traduire en français les cantes de la Antología del cante flamenco de Perico el del Lunar enregistrés par Hispavox pour la première fois en 1954, et réédités ultérieurement par le même label. À ce jour, quatre traductions ont été réalisées et approuvées suite à une collaboration entre chercheurs et artistes, qui ont testé la chantabilité des versions obtenues. Ces enregistrements assortis de transcriptions en espagnol et en français ne constituent que l’une des étapes d’un travail en cours, ouvert à de futures collaborations.

The aim of the paper is to discuss the history of the Trad. Cant. Flam. workshop, the corpus which is the object of its interest, and the progress of its work by winter 2021-2022. The workshop has been held remotely since 2019 in order to translate into French the cantes from Antología del cante flamenco by Perico el del Lunar, recorded by Hispavox for the first time in 1954 and subsequently reissued by the same label. To date, four translations have been made and approved as a result of a joint collaboration between researchers and artists, who tested the singability of the obtained versions. These recordings, along with their transcriptions, are published both in Spanish and French and are just one of the steps of a work in progress which stays open to future collaborations.

Índice

Texto

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Introduction

Note de bas de page 1 :

Voir glossaire pour les termes en italique.

Note de bas de page 2 :

Johan Franzon rappelle qu’il existe cinq choix possibles s’offrant au traducteur de chants ou de chansons : 1. Ne pas traduire le texte chanté. 2. Traduire les paroles sans tenir compte de la musique. 3. Écrire de nouvelles paroles sur la musique originale, sans lien avec le texte original. 4. Traduire les paroles et adapter la musique en fonction de ces nouvelles paroles – parfois en donnant lieu à une nouvelle composition musicale. 5. Adapter la traduction à la musique originale (Franzon, 2008, p. 377). Toute traduction peut ponctuellement faire appel à l’une ou l’autre de ces stratégies, même si dans le cas de l’atelier Trad. Cant. Flam., la cinquième et dernière est souvent privilégiée.

1Depuis 2019, l’atelier de traduction de cantes flamencos Trad. Cant. Flam. s’est donné pour objectif d’offrir des traductions de letras flamencas chantables en français, grâce au travail collectif de membres provenant de divers horizons et disciplines1. La finalité de chacune de ces traductions est donc liée à la possibilité de les chanter réellement, en français, sur une musique flamenca, ce qui correspond au terme « chantabilité », traduit de l’anglais « singability », tel qu’il a été défini et analysé notamment par Johan Franzon (2008, 2015). Ce substantif, issu de l’adjectif « chantable » ou « singable », apparaît désormais, en anglais comme en français, dans différents dictionnaires pour désigner « the quality of being singable » (« Singability », 2000), soit la « capacité à pouvoir être chanté » (« Chantabilité, nom », 2021) ou encore la « qualité de ce qui peut être chanté » (« Définition “Chantabilité” », 2021). Dans le domaine de la traduction de chants ou de chansons, ce concept est désormais bien accepté et fréquemment utilisé, quoiqu’il ait fait l’objet de plusieurs définitions, plus ou moins étroites ou précises (Franzon, 2008, 2015 ; Gorlée, 2005 ; Pruvost, 2017). D’abord exclusivement appliqué au genre de l’opéra, par Kaindl par exemple (1995), ou en lien avec l’articulation des voyelles (Nida), il a donné lieu à plusieurs théories et méthodologies, dont celles de Dürr (2004), Franzon (2008) et Low, qui offrent un cadre intéressant pour l’atelier Trad. Cant. Flam., comme cela est exposé dans la charte qui suit ce document. La définition que donne Johan Franzon de la chantabilité (« singability ») est intéressante dans la mesure où elle part « d’un point de vue fonctionnel » (« from a functional point of view ») : « the ambiguous term "singabilityˮ can be defined as a musico-verbal fit of a text to music » (Franzon, 2008, p. 373). Ce concept implique donc une concordance, une adéquation entre le texte et la musique qui permet à un texte d’être effectivement chanté, interprété oralement, sur la musique en question. La chantabilité suppose qu’une telle performance soit possible vocalement. Ce concept peut être utilisé dans le cadre d’une traduction de chant ou de chanson, à la fois pour le texte de la langue source et celui de la langue cible. Franzon fait donc fusionner les définitions étroite et large de la notion, pour expliquer ce qui rend des paroles « chantables » : « the attainment of musico-verbal unity between the text and the composition » (Franzon, 2008, p. 375). Selon lui, la réussite d’une telle entreprise, qui vise à obtenir une « unité musico-verbale entre le texte et la composition », dépend de trois conditions, qui sont requises pour toute performance chantée : la nécessité d’une adaptation prosodique, poétique et sémantico-réflexive entre le texte et la musique (« a prosodic match », « a poetic match » et « a semantic-reflexive match » (Franzon, 2008, p. 391). Autrement dit, le texte et la musique doivent être adaptés l’un à l’autre. Ceci apparaît musicalement, au niveau de la mélodie, de la structure et des modalités expressives et, dans le texte, cette adéquation est également perceptible aux trois niveaux (prosodique, poétique et sémantique). Une telle définition du terme « chantabilité » correspond à la démarche de l’atelier Trad. Cant. Flam., qui s’est engagé dans la manière la plus évidente et la plus complète de traduire le chant flamenco, à savoir celle qui consiste à adapter la traduction à la musique originale2.

2Ce texte vise à présenter l’historique de cet atelier, le corpus choisi et l’état d’avancement des travaux à l’hiver 2021. Une charte est publiée à la suite de ce document. Les auteures de ces lignes s’expriment au nom des membres de l’atelier, en tant que cofondatrices et codirectrices de celui-ci.

1. Historique

Note de bas de page 3 :

Ces recueils ont fait l’objet d’éditions imprimées (Amaya, 1993; Andrade de Silva, 1954; 333 coplas populaires andalouses, 1939; Bois, 1985, 2016; Dumas, 1973; Prieto, 1996; Joulia, 2001; Lévis Mano, 1965, 1970, 1955, 1964, 1958, 1961, 1993, 1998a, 1998b, 2000a, 2000b, 2001a, 2001b, 2004a, 2004b, 2016, 1951a, 1951b, 1960; Pradal, 2014; Rouanet, 1896; Vidal, 1992). Pour plus de précisions sur ces ouvrages, voir Trancart (2020, 2021).

Note de bas de page 4 :

Ce phénomène est aussi confirmé par le développement de cours de cante en France, en présentiel ou à distance, ces dernières années, avec des professeurs comme Cécile Evrot, Alberto García ou Andrés de Jerez. Le distanciel permet également à des élèves de différents pays d’accéder à des cours de cante dispensés depuis l’Espagne.

Note de bas de page 5 :

À ce titre, la question de la traduction chantée de musiques orales comporte à la fois des points communs et des différences avec le fait de chanter en langue étrangère des œuvres musicales plus littéraires ou dont l’origine est une partition écrite, comme les opéras. Ceux-ci étaient autrefois largement traduits et chantés (donc chantables) dans la langue du pays où ils étaient donnés, quitte à altérer le sens du texte pour adapter ce dernier au rythme de la composition. Les premières études sur la traduction de la musique chantée ont d’ailleurs porté sur ce genre (Franzon, 2008, p. 375; Frutos Domínguez, 2013).

3Si le flamenco connaît un succès international depuis ses débuts, au XIXe siècle, c’est surtout grâce aux dimensions non traduisibles de cet art, à savoir la danse et la musique. Ce sont, en effet, les bailaoras, qui ont été les premières à susciter l’intérêt des étrangers en Andalousie et dans les grandes villes d’Europe telles que Paris, Londres, Vienne ou Saint-Pétersbourg (Steingress, 2006). La danse et la musique sont donc les arts les plus exportables du flamenco. Pourtant, le cante bénéficie aussi d’un certain succès auprès des étrangers, surtout en complément de la danse : pour ceux qui ne comprennent pas les paroles, il peut être apprécié comme simple accompagnement musical, indépendamment du sens qu’il véhicule. Néanmoins, de plus en plus de non hispanophones souhaitent aussi comprendre ces paroles, ce qui explique les traductions de letras dans des programmes de concert, dans des livrets adjoints à des CD ou sur d’autres supports écrits, qu’il s’agisse d’œuvres de fiction ou non (entre autres exemples : Curro Piñana, 2011 ; El Barullo & Moraito, 1995 ; Fauquemberg, 2013 ; Frayssinet-Savy, 1995, 1996, 2002 ; Zentner & Veracruz, 2002). Surtout, depuis la parution des Chansons populaires de l’Espagne, en 1896, par Léo Rouanet, une quinzaine de traducteurs français ont entrepris de publier des recueils dédiés spécifiquement aux coplas ou aux letras qu’ils ont entendues ou lues. Ces ouvrages ont rencontré un succès croissant, comme le prouvent les multiples rééditions d’une partie d’entre eux, ou le fait que certains soient épuisés3. Il existe donc un public francophone demandeur de comprendre les paroles des chants flamencos4. Toutefois, jusqu’à présent, ces traductions de textes flamencos ont été publiées essentiellement dans des livres imprimés, ce qui implique une modification substantielle du genre, celui-ci étant par essence un art sonore interprété et transmis oralement, avec tous les paramètres musicaux que cela suppose (mélodie, harmonie, rythme et prosodie, mais aussi intensité, tempo, timbre et accompagnement instrumental le cas échéant, voire participation sonore de l’assistance à travers le jaleo…). Ces dimensions, qui disparaissent dans les traductions écrites, méritent pourtant d’être prises en compte, de manière à aboutir à une version plus complète et plus fidèle de l’ensemble des éléments qui composent le flamenco, en tant qu’art vivant5. C’est pourquoi, au sein du laboratoire Espaces Humains et Interactions Culturelles de l’université de Limoges (EHIC – EA 1087), Anne-Sophie Riegler et Vinciane Trancart ont fondé l’atelier Trad. Cant. Flam., comme laboratoire expérimental visant à répondre au besoin du public francophone de comprendre et entendre le flamenco vivant en français – que ce public soit flamencophile ou qu’il souhaite découvrir ce genre esthétique. L’objectif est de proposer et de publier des traductions chantables, dont on vérifie de manière effective la chantabilité, grâce à la mise en voix du chant en français, par des artistes flamencos. La présente publication en ligne, en open access, permet de rendre ces traductions accessibles à tous, non seulement dans une des versions écrites possibles, mais également sous forme d’enregistrements audios, dans des versions orales testées et approuvées collectivement au sein de l’atelier.

Note de bas de page 6 :

Voir sa biographie sur https://caminitodelaire.wordpress.com/juan-murube/, consultée le 25/11/2021

Note de bas de page 7 :

Voir des éléments biographiques sur http://musiquealhambra.com/andres-de-jerez.htm et https://www.trident-scenenationale.com/spectacle/flamenco/andres_de_jerez__samuelito/1524, consultés le 25/11/2021.

Note de bas de page 8 :

Les enregistrements peuvent être demandés aux responsables de l’atelier, qui conservent les archives : trad.cant.flam@gmail.com

Note de bas de page 9 :

Ces rencontres universitaires ont ensuite été suivies de stages de cante et de baile, avec Andrés de Jerez, Mercedes Ruiz et Santiago Lara Puerto, et d’un spectacle proposé par ces trois artistes, les stages et le spectacle ayant été organisés du 25 au 27 septembre 2020 à Limoges, par l’association Triana Flamenca, sous la direction de Marion Chabassier.

4Depuis septembre 2019, l’atelier Trad. Cant. Flam. réunit donc des chercheurs, des enseignants, des traducteurs et des artistes de langue maternelle française ou espagnole, pour étudier et traduire des chants flamencos en français, de manière à ce que ce répertoire soit interprété dans cette langue cible. Au terme d’une année de travail (2019-2020), les premières expérimentations artistiques de cantes en français et les premières analyses scientifiques ont été présentées lors des journées « Traduire le chant flamenco » organisées à l’université de Limoges. Ces rencontres débutèrent par une journée d’étude incluant des communications universitaires et une performance vocale du cantaor sévillan Juan Murube6 qui interpréta des cantes de trilla en français. La seconde journée fut composée de workshops au cours desquels la cantaora française Chloé Houillon et le cantaor Andrés de Jerez7, chantèrent des letras en français, en étant accompagnés par le tocaor Santiago Lara Puerto, également né à Jerez de la Frontera. Toutes ces performances, présentées à titre expérimental, ont été enregistrées8. Suite à ces interprétations vocales, les workshops se sont poursuivis par des séances de traduction collective, nourries par des échanges avec la cantaora Chloé Houillon, toujours dans la perspective d’obtenir des textes chantables en français et de comparer leurs spécificités aux originaux espagnols, qui se conforment aux moules poétiques et musicaux que constituent les palos9.

Figure 1 : Affiche des journées « Flamenco et traduction » (journées d’étude, workshop, stage et spectacle), 24-27 septembre 2020, Limoges

Figure 1 : Affiche des journées « Flamenco et traduction » (journées d’étude, workshop, stage et spectacle), 24-27 septembre 2020, Limoges

Réalisation : Marion Chabassier

5Ces premières manifestations ont permis de vérifier l’intérêt esthétique et scientifique de la démarche consistant à produire des traductions de cantes chantables. Ceci fait, l’année suivante (2020-2021) a été consacrée à la poursuite de cette tâche au sein de l’atelier, avec la collaboration de trois artistes, sollicités à la fois pour contribuer à traduire des letras en français, pour tester leur chantabilité dans un style flamenco, et pour enregistrer les traductions, de manière à publier les deux versions, écrite et orale, dans la présente revue du laboratoire EHIC. Les trois artistes qui, depuis fin 2020, ont accepté d’exercer leurs talents au service de cette expérience, sont Chloé Houillon et Maguy Naïmi pour le cante, ainsi que Claude Worms à la guitare.

2. Corpus

6Dans un premier temps, l’atelier Trad. Cant. Flam. s’est fixé de traduire les letras de la Antología del cante flamenco. Cette anthologie a été choisie car elle forme un ensemble restreint et cohérent, composé de trente-trois chants accompagnés par le tocaor Perico el del Lunar. En 1954, elle avait été la première anthologie sonore de chants flamencos dans la discographie et portait alors le titre français Anthologie du cante flamenco. La version de 1958, choisie initialement par l’atelier, en est une réédition par le même label, Hispavox ; c’est la plus ancienne des éditions facilement accessibles. Claude Worms explique les différences entre ces enregistrements :

La fameuse anthologie dirigée par Perico el del Lunar, publiée en 1954 par Ducretet-Thomson sous licence Hispavox et couronnée par l’Académie Charles Cros, a fait l’objet de nombreuses rééditions et fait depuis longtemps partie de la discothèque de base de tout amateur de flamenco. Sa parution en France en un album de trois 33t 25cm, sous le titre Anthologie du Cante Flamenco (LA 1051-52-53) fut suivie en 1955 et 1958 de deux éditions espagnoles sous label Hispavox (même format, puis en deux 33 tours 30 cm en 1971, en deux Cds en 1988…), avec un livret de Tomás Andrade de Silva qui n’existait pas dans la première édition française, mais qui sera repris et traduit pour un tirage « de luxe » par les Éditions du Tambourinaire (Worms, 2017).

7La version enregistrée en 1958 est complétée par des transcriptions et des traductions des cantes, ce qui peut servir d’élément de comparaison avec les écrits des membres de l’atelier. Cette version a été enregistrée sur vinyle au départ, puis commercialisée sous forme de CD. Une version remasterisée en 2007 par Fonotrón et Calé Records se trouve aussi disponible sur Internet (Spotify ou You tube, notamment). Ces versions sont répertoriées ci-dessous :

Note de bas de page 10 :

Le titre est en français puisque c’est Ducretet-Thomson qui s’était chargé de cette première édition.

Note de bas de page 11 :

Il s’agit ici du livre uniquement, comme l’indique l’absence d’enregistrement dans la colonne suivante.

Note de bas de page 12 :

Peut-être sera-t-il envisagé ultérieurement de traduire les cantes en anglais, si des anglophones se montrent intéressés. Cette première version écrite en anglais sera alors précieuse.

Note de bas de page 13 :

Par exemple, https://www.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_nhVcNKYGeaI5NyjDYAs9mKVCC-774eswY, dernière mise à jour 29-10- 2021 ; consulté le 19-11-2021. Cette version comporte trente-six titres et non pas trente-trois, car les quatre saetas finales apparaissent comme quatre enregistrements séparés et non pas comme un seul titre. La remasterisation, différente d'un réenregistrement, consiste à modifier le son avec des logiciels à partir d’un enregistrement préexistant. Différents paramètres peuvent ainsi être modifiés grâce à un ingénieur du son ou par un logiciel automatique. Il est ainsi possible de changer l’équilibre entre les instruments et les voix par le mixage (ici, entre voix et guitare, et éventuellement palmas), d’agir sur la dynamique, d’ajouter de la reverb, d’élargir la bande passante (vers les deux extrêmes, graves et aigus), de renforcer certaines fréquences (en général les graves). Les effets recherchés dépendent des réflexes d’écoute induits par l’usage des smartphones, notamment, et la consommation en ligne de genres dominants, tels que le hip-hop, le rap, le rock, les variétés, etc. — d’où le renforcement systématique des basses. Cependant, le plus important est que le contenu musical reste inchangé. Calé Records est une sous-marque de Fonotrón, les deux labels étant basés à Séville. Ils ont pu collaborer sur l’ensemble du processus ou se répartir les missions de remasterisation, d’édition et de commercialisation. En 2014, tous deux ont été rachetés par Magnesound. (Ces dernières informations ont été apportées par Claude Worms, via correspondance électronique, en décembre 2021).

Date

Titre

Enregistrement audio

Support papier

1954 

Anthologie du cante flamenco10 (LA 1051-52-53) (Perico el del Lunar, 1954)

Vinyle (Ducretet-Thomson). Trois 33 tours 25 cm

L’anthologie en vinyle ne comporte pas de transcription, mais seulement une double page avec une préface, en français, par Roger Wild.

1954

Tomás Andrade de Silva, Anthologie du cante flamenco11

Néant

Publication de luxe aux éditions du Tambourinaire, comportant un avant-propos et des illustrations de Roger Wild, des commentaires de Tomás Andrade de Silva ainsi que des transcriptions et des traductions en français réalisées par Marie-Loup Sougez, Adolphe Falgairolle et Jean Babelon (Andrade de Silva, 1954).

1955, 1958

Antología del cante flamenco

Vinyle (Hispavox). Trois 33 tours 25 cm

Avec livret de transcriptions et de traductions en français et en anglais. Transcriptions en espagnol et traductions en français comme dans le livre de 1954 + ajout d’une version anglaise dont on ignore le traducteur12. (Perico el del Lunar, 1958)

1960

Antología del cante flamenco

(Hispavox)

Livret adjoint de transcriptions et de traductions en français (même typographie que celle de 1958, mais sans l’anglais).

1971 et 1980

Antología del cante flamenco

Deux 33 tours 30 cm (Hispavox)

1988

Antología del cante flamenco (Perico el del Lunar et al., 1988)

Deux CD (Hispavox)

Livret adjoint de transcriptions et de traductions en français (même typographie que celle de 1958, mais sans l’anglais). (Perico el del Lunar et al., 1988)

2007

Antología del cante flamenco, Calé Records (Perico el del Lunar, 2007)

Trente-six titres remasterisés en 2007 sous forme de 2 CD, et désormais téléchargeables en ligne, depuis Spotify ou You Tube13

Néant

8Dans ce tableau, ne sont pas répertoriées les versions de la Antología completa del cante flamenco commentées par Claude Worms dans son article qui retrace l’histoire des cinq CD Calé Records parus sous ce titre « complet » (Worms, 2017). Pour plus de clarté, les traductions et les articles scientifiques des membres de l’atelier Trad. Cant. Flam. spécifient les versions qui ont été utilisées pour les transcriptions, les traductions et les commentaires, en en donnant les références précises. En effet, l’objectif de l’atelier est de transcrire et de traduire les chants de cette anthologie à l’écrit, d’en proposer des versions orales chantées (dont au moins une enregistrée), et d’analyser les productions réalisées, en tenant compte des variantes provenant d’autres sources, que ces dernières soient en espagnol (chantées ou écrites) ou en français (uniquement à l’écrit, pour les variantes en français, puisque aucun enregistrement antérieur n’a été trouvé dans cette langue).

3. État d’avancement

Note de bas de page 14 :

Chloé Houillon et Maguy Naïmi, « Essais de chantabilité des cantes en français : retours d’expérience »

9Pour cette première édition des travaux de l’atelier dans la revue FLAMME, il a été possible de présenter quatre traductions de cantes tirés de la Antología del cante flamenco, dont les versions orales ont été enregistrées par Maguy Naïmi ou Chloé Houillon (cante) et Claude Worms (toque). Ces quatre cantes sont la caña, le polo, les nanas et les alboreás, composés chacun, respectivement, d’une, deux, quatre et, de nouveau, quatre coplas. Ces enregistrements ne prétendent pas être des réalisations définitives : il s’agit d’expérimentations que les artistes ont eu l’amabilité de partager avec le public. Ainsi, les versions orales présentées constituent une proposition parmi plusieurs options qui ont été envisagées et discutées collectivement, sachant que le point de départ est un matériau multiple : diverses variantes existent pour une même copla en espagnol (que ce soit dans l’enregistrement choisi lui-même, quand un chanteur répète un fragment en lui faisant subir des variations, ou dans des productions écrites ou orales issues d’autres sources). De la même manière, plusieurs variantes ont pu être envisagées en français. Pour uniformiser les choix effectués en matière de transcription et de traduction, la charte de l’atelier est publiée dans ce numéro, à la suite de ce texte de présentation. Concernant les versions adoptées à l’écrit ou à l’oral, elles ne sont pas conçues comme des ensembles figés, mais comme des propositions d’étude, de manière à respecter la liberté des artistes quant aux variations qu’ils sont amenés à opérer ou qu’ils pourraient réaliser ultérieurement pour le même corpus, s’agissant de musiques de tradition orale. Les chanteuses Maguy Naïmi et Chloé Houillon ont rédigé un texte sur les tests de chantabilité effectués afin d’offrir un retour d’expérience sur leurs pratiques. Ce document fait suite à cette présentation et à la charte de l’atelier Trad. Cant. Flam14.

Note de bas de page 15 :

Pour tous les mots techniques, voir glossaire.

10Outre les quatre palos mentionnés, d’autres traductions ont d’ores et déjà été validées et feront l’objet d’une prochaine publication : les bulerías et les fandangos, notamment. D’autres encore font actuellement l’objet de réflexions et de tests, comme les alegrías, les soleares, les saetas, les tarantas, les tangos et les jaberas15. Les enregistrements ont commencé pour certains de ces cantes. Enfin, une partie des pistes de la Antología del cante flamenco reste à traduire et à interpréter : c’est le programme de l’atelier Trad. Cant. Flam. pour les mois à venir.

11En plus des transcriptions, des traductions écrites et des enregistrements, sont publiés dans la revue FLAMME des articles scientifiques afin d’analyser les sources (notamment les variantes écrites et orales). Ces textes visent aussi à expliciter les démarches et les réalisations de l’atelier ou à aborder des sujets connexes. Enfin, les transcriptions et les traductions écrites sont parfois assorties de notes de bas de page, de même que les enregistrements sont complétés par quelques commentaires des artistes. Cependant, ces notes complémentaires ont été restreintes au minimum, de manière à ne pas embarrasser l’écoute des documents audios ou la lecture des chants, qui sont autant d’œuvres musicales et de textes poétiques. L’appareil critique est davantage développé dans les articles qui sont publiés à la suite des productions artistiques.

Conclusion

Note de bas de page 16 :

Sur le parcours du musicien Justin Bonnet, voir https://www.franceculture.fr/personne-justin-bonnet.html, consulté le 19/11/2021.

12L’atelier Trad. Cant. Flam. en est encore à ses débuts, mais ses membres sont heureux de pouvoir offrir au public le fruit des réflexions menées depuis deux ans. Ce texte de présentation, permettant de revenir sur l’histoire de l’atelier, le corpus choisi depuis 2019 et le bilan actuel des travaux, est complété par sa charte, qui fait état des objectifs, des modalités de fonctionnement et de la méthodologie élaborés au cours de ces deux années. Le travail continue, avec une série de projets pour l’année 2021-2022 : une dizaine de cantes de la Antología del cante flamenco sont en cours de transcription et de traduction. Ils seront enregistrés en français dans les mois à venir. De plus, il est question d’en tester prochainement la « dansabilité », pour les palos qui s’y prêtent : des bailaoras ou des bailaores seront sollicités pour exercer leur art sur ces traductions. L’objectif sera d’analyser les éventuelles modifications qu’ils ou elles opéreraient en fonction de la langue chantée pendant qu’ils évoluent. À terme, l’on voudrait aussi étudier les adaptations de ces chants traduits en français sur des musiques non flamencas. Le musicien Justin Bonnet s’y est déjà essayé avec son ensemble vocal polyphonique « La Note Jaune », dédié aux musiques populaires de tradition orale16. Enfin, la traduction de chants flamencos en anglais ou dans d’autres langues permettrait d’approfondir et d’élargir la perspective. L’atelier Trad. Cant. Flam., qui prévoit d’organiser un colloque en 2022-2023, est ainsi ouvert à de futures collaborations.

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Para citar este documento

RIEGLER, A.-S. y TRANCART, V. (2022). Est-il possible de chanter du flamenco en français ?. Fédérer Langues, Altérités, Marginalités, Médias, Éthique, (2). https://doi.org/10.25965/flamme.563

Autores

Anne-Sophie RIEGLER
Anne-Sophie Riegler est docteure en philosophie de l’Université de recherche Paris-Sciences-et-Lettres. Elle a soutenu en 2018 une thèse intitulée Les Enjeux d’une esthétique du flamenco. Étude analytique et critique du duende. Ses recherches portent sur l’esthétique de la musique et de la danse ainsi que sur la traduction du chant flamenco. C’est à ce titre qu’elle codirige l’atelier de traduction Trad. Cant. Flam. au sein du laboratoire EHIC, dont elle est membre associée. Ses recherches sont étroitement liées à sa pratique de la danse flamenca et du chant traditionnel. Elle enseigne par ailleurs la philosophie en sections d’arts appliqués.
EHIC – Université de Limoges
annesophie.riegler@gmail.com
Artículos del autor publicado en Fédérer Langues, Altérités, Marginalités, Médias, Éthique
Vinciane TRANCART
Agrégée d’espagnol, Vinciane Trancart est maîtresse de conférences à l’université de Limoges depuis 2017. Ses recherches, menées au sein du laboratoire EHIC (Espaces Humains et Interactions Culturelles – Université de Limoges) et du CREC (Centre de Recherche sur l’Espagne Contemporaine – Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3), portent sur la musique dans l’Espagne contemporaine. En 2015, elle a obtenu le premier prix Andrew Britton, octroyé par le Consortium for Guitar Research de Cambridge pour ses recherches sur la guitare, dont sa thèse de doctorat, publiée sous le titre Visiones desafinadas. Prácticas y representaciones de la guitarra en Madrid y en Andalucía (1883-1922) (Trancart, 2019). Elle a cofondé et codirige la revue scientifique du laboratoire EHIC, FLAMME, ainsi que l’atelier de traduction de cantes flamencos Trad. Cant. Flam.
EHIC – Université de Limoges
https://orcid.org/0000-0002-9391-6071
vinciane.trancart@unilim.fr
Artículos del autor publicado en Fédérer Langues, Altérités, Marginalités, Médias, Éthique

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