Récits des TVL

DE NATURA RERUM 2004-08-15

En cette journée d'été, je marchais sur le chemin les pieds sur terre et la tête en l'air. Je méditais en bon pélerin sur le chemin de St Jacquot, allant vers Mauprié, passé Poitiers, à la sortie de la traversée de la forêt de St Sauvant. Ce fut probablement l'effet de la chaleur qui me fit voir au dessus des champs de paille d'étranges papillons qui n'avaient rien à voir avec l'effet de boissons hallucinogènes.

Je ressentais comme un début de déshydratation, je me vis content d'arriver à la croisée de chemins marqués par un signe cabalistique qui disait \"Championnat de de-ta\". je ne savais pas ce qu'était un -ta. Il y avait là un groupe d'hommes, et quelques femmes, qui suspendaient des ampoules dans une cour d'école. de longues tables blanches étaient dressées comme pour une cène. Il m'apparut judicieux de faire halte pour m'éclaircir l'esprit, me reposer les jambes et satisfaire ma curiosité.

Il y avait dans l'air une effervescence sans rapport avec l'aspirine. \"Vous êtes arrivé au but ?\" me demanda-t-on. Je répondis que ma quête était sans but, et je présentais ma requete concernant les papillons. Il s'agissait d'assemblages volants pilotés par des champions venus de partout, meme de la Haute-Loire.
Je suis peu au fait des champions de la performances, mais l'endroit semblait buccolique, bien approvisionné et hospitalier.

Ainsi donc, je posais sac et j'acceptais un verre. Les convives s'installaient et conversaient dans un langage quelque peu ésotérique : ils parlaient de tumulus de Bougon, de cumulus de couillon, et de fromages de chèvre. Ma voisine tenait à la main un grattoir de silex probablement préhistorique, tandis que son interlocuteur disait qu'il avait gratté bas avant de faire parler la poudre. \\"Mais pas comme sur la Blanche\\" dit un autre.
Le cochon rotissait sur la broche. Il y avait aussi un Mouton qui avait sauvé sa peau et un Mulet qui se prenait pour un baudet de Poitou à la pilosité généreuse. Une tribu locale, les Pitrous, était embauchée comme pusheurs de carrioulettes. \\"Il faut la tenir avec la sangle\\" suggérait l'un. Curieuse pratique. Ils placent aussi un homme sur un chariot, pour le jeter dans les trous d'air. Ces rites nécessitent le recours à des amulettes diverses telles que l'anneau du seigneur ou l'aiguille du largueur. Dans leur transe, il passe parfois trop de courant de torture et ils fondent un fusible. C'est un peu de la magie : un corde, le mors au dent, et le bouffon dans la bouche. Comme dans toute secte, il y a des schismes. Ces gens discutent beaucoup du problème du voile. Ils se soucient du corps, mais savent que l'âme agit. Ils se soignent par un genre de thérapie de groupe, le soir, après la mort sûre du Thermique, pour panser leurs blessures ; le! ur pharmacopée inclut des plantes telle la bourrache : de l'arabe abou- rache, qui veut dire \"père de la sueur\", ou du latin \"burra\", étoffe à longs poils ; m'explique-ton. J'avais pensé à \"burro\" (l'âme), ou \"borracho\"\". Effet sudorifique. Pour l'effet calmant il y a le cynoglosse, et le mélilot est stupéfiant à haute dose.. Le cholagogue facilite l'évacuation de la bile.

Ces gens sont très proches de la nature. Ils pollénisent le thermique en partant de files dioïques et paripenneées pour parvenir aux limbes. Il y a plusieurs types d'inflorescences : l'épi, le cyme, la grappe, le corymbe, l'ombelle, la capitule (qui vient à la fin). La grappe est à part : d'un côté il ne faut surtout pas la lacher, et de l'aure il faut qu'on vous la lache.

La graine vole au vent et l'errance est l'essence de la quête. Certains portent un maillot \"Equipe des Rances\". Ce sont les plus héliotropes. Ils sont tubérisés (gonflés de réserves) et savent comment faire dans la panicule (inflorescence rameuse).
A ce stace, j'avais déjà du mal à suivre leurs explications, et je n'en étais plus à mon premier verre. Je vois alors passer un mystique agité psalmodiant \"mes docs ! mes docs ! mes docs ! Version 3.2.0.; 3.2.0., 3.2.0. Ca envoie Graves. Une caisse. Toutes les 13 minutes ouverture de la fenêtre, French Windows.Suis-je bouchonné, boisé ou vaché ? Mon purinomètre a décroché. Je n'ai pas pu me les poudrer !\"

Je fus impressionné par les effets engendrés par les abus dangereux évidents de cet homme en mal de dépuratif vulnéraire et je me jurais bien de ne pas confondre les gesses et les vesces, tant il est vrai que même les belles plantes peuvent avoir des effets pervers.
Le pélerin doit maintenant rentrer dans sa coquille. Cette fête champêtre était bien belle. Sur en paille jaune des champs les bottes empilées construisaient des chateaux en Espagne. De nombreux rêves de victoires s'envolaient chaque jour. Pour moi, la route est encore longue avant de troquer mes semelles de plomb pour les escarpins magiques du vent.


Pascal Legrand

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